La présidente de l’Association des Magistrats tunisiens (AMT), Raoudha Grafi, a émis des appréhensions au sujet de la « politisation» de la Cour constitutionnelle en cas de désignation de membres non-indépendants.
En vertu du projet de loi sur cette cour, la majorité des membres sera désignée par le pouvoir politique, a-t-elle ajouté. Raoudha Grafi s’exprimait, vendredi, en marge d’une conférence organisée par le Tribunal Administratif sur le thème :
« La Cour constitutionnelle : quels défis pour la justice administrative ? ». Elle a souligné que les organismes internationaux, actifs dans le domaine judiciaire, telle la Commission de Venise, déconseillent la nomination de membres « politisés » au sein des instances constitutionnelles en période transitoire, dès lors que cela pourrait « servir les intérêts du régime politique et violer la Constitution ».
La Tunisie est une « démocratie naissante » et ne peut être comparée aux démocraties bien établies, a-t-elle soutenu. Pour Raoudha Grafi, quelle que soit la partie qui va désigner les membres de la Cour constitutionnelle (Président de la République ou Parlement), « le risque de politisation » persiste encore.
C’est pourquoi, s’il n’y a pas de garanties réelles pour des candidatures indépendantes, on retrouvera des magistrats connus pour leur appartenance partisane dans la composition de la Cour.
Le juriste Amin Mahfoudh, président de la Commission d’élaboration du projet de loi organique sur la Cour constitutionnelle, a, pour sa part, plaidé en faveur de la suppression du critère de non-appartenance partisane des membres de la Cour constitutionnelle.
« Cessons cette hypocrisie juridique », a-t-il lancé. « Nous connaissons les magistrats qui seront désignés dans cette cour ainsi que ceux qui seront à l’origine de leur nomination ».
Il a appelé à ne pas « diaboliser » les partis politiques et à ne plus établir une « rupture » entre eux et la Cour constitutionnelle, dès lors que le 2/3 des membres de la Cour sont désignés par des parties politiques.
L’article 7 du projet de loi sur la Cour constitutionnelle stipule, entre autres, que les membres de la Cour ne doivent appartenir à aucun parti politique, ni à un Conseil constitutionnel, ni à l’Instance provisoire de controle de la constitutionnalité des projets de loi.
La Commission de Législation générale au sein de l’Assemblée des Représentants du peuple envisage la suppression de ces critères pour ne pas exclure les compétences ayant été obligés de travailler sous l’ancien régime.