“L’emploi précaire, le manque de motivation, l’injustice au sein de l’entreprise et le niveau bas des salaires empêchent le Tunisien de s’investir pleinement dans son travail, ce qui influence négativement sur le rendement des entreprises” ont relevé des spécialistes dans le domaine du travail.
Un recensement effectué, récemment, par l’Institut américain Gallup de recherches statistiques a révélé que 5% seulement des Tunisiens s’impliquent réellement dans leur travail.
Le sondage réalisé au cours de la période 2011-2012, juste après la révolution tunisienne, justifie ces résultats par le fait que les Tunisiens seraient encore bouleversés par les événements survenus dans le pays, ce qui a provoqué une certaine perturbation au niveau de l’administration tunisienne.
Le sondage indique que 54% des Tunisiens sont insatisfaits de leur situation au travail et des entreprises qui les emploient. Ce taux est le plus élevé dans les pays du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord suivi par un taux de 53% enregistré en Algérie et 45% en Syrie. Le sondage mené dans 142 pays révèle que sur un total de 230 mille employés, seulement 13% s’engagent à faire leur travail.
L’Institut de sondage a indiqué que les protestations populaires massives observées en Egypte, Libye, Tunisie et Yémen en 2011 ont révélé que les peuples de ces pays sont fortement insatisfaits de leurs situations sociales notamment en raison du chômage et des mauvaises conditions économiques.
Analysant ces données, l’universitaire et conseiller au département des études relevant de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), Abderrahmane Lahgha a souligné que ces indicateurs sont liés au contexte politique et socioéconomique du pays, faisant remarquer que les protestations ont révélé l’existence d’une crise de confiance entre l’employé et l’employeur.
Il a estimé que le sondage réalisé par Gallup est partiel et ne peut illustrer la réalité des rapports entre les employés et les employeurs et la valeur du travail chez la population active, faisant remarquer que l’emploi précaire influence le rendement de l’entreprise et démotive l’employé.
“C’est injuste de rendre l’employé coupable de cette situation et de l’accuser d’irresponsabilité surtout que plus de la moitié des employés perçoivent des salaires inférieurs au salaire minimum garanti et 60% d’entre eux travaillent dans des conditions précaires”, a- t-il signalé. Par ailleurs, Lahgha a reconnu que le travail a perdu de sa valeur au cours de ces dernières années, mettant l’accent sur la nécessité de changer les mentalités notamment en motivant les employés. De son côté, le spécialiste en sociologie et développement, Belaïd Ouled Abdallah a indiqué qu’au cours des deux dernières décennies, des problématiques ont été enregistrées au niveau de la valeur du travail.
Sur le plan économique, le spécialiste a souligné qu’il existe un grand écart entre les salaires dans la fonction publique et dans le secteur privé. “Les travailleurs du secteur public perçoivent des salaires largement inférieurs à leurs collègues dans le secteur privé”, a-t-il fait savoir, indiquant que cette situation renforce chez eux le sentiment d’injustice et les démotive. “Parallèlement, les entreprises privées bénéficient de plusieurs avantages accordés par l’Etat alors que ses employés ne bénéficient ni de primes ni d’encouragements et services sociaux divers”, a-t-il noté.