Tunisie – Violence : Quand va-t-on arrêter ce cirque salafiste?

Il faut être sourd pour ne pas entendre les salafistes, et aveugle pour ne pas les voir! Alors que dirons-nous, “surenchère salafiste“ ou “alerte aux salafistes“?

Depuis la semaine dernière, ils passent à une vitesse supérieure. Aux habituels «takbbir» et «takffir», ils nous servent une collection belliqueuse pour un été 2012 qui semble déjà détonant. Spectaculaires, leurs manifestations se multiplient.

Ils commencent par semer la terreur chez les vendeurs, contrebandiers et consommateurs d’alcool, incendier un hôtel et un poste de police à Jendouba, envahir la municipalité de Hammamet, manifester contre un événement artistique taxé de «pro homosexualité» à La Marsa …

Si ces incidents ne sont pas l’œuvre de groupuscules venus «de la planète Mars», comme les qualifie Hamadi Jebali, ils ne sont pas le fruit d’un travail constructif de «nos jeunes» comme les présente Rached Ghannouchi, chef du Parti Ennahdha, selon qui le mouvement salafiste est un mouvement qui n’a pas d’avenir en Tunisie et qu’il ne représente qu’un phénomène passager.

Les islamistes au pouvoir risquent gros en laissant faire les salafistes dans la rue. S’ils considèrent que tester la résistance du peuple tunisien peut leur être profitable, cela est surtout une porte ouverte pour l’accrochage. D’ores et déjà, les populations appellent à des batailles rangées pour défendre leurs intérêts et biens face à la passivité de la machine sécuritaire nationale…

Si la confrontation semble de plus en plus inévitable entre les populations, celle-ci ne peut plus qu’être un prélude à une guerre civile ou à une intervention de l’armée. Dans les deux cas, la transition démocratique tunisienne passe par de grandes turbulences et si les salafistes ne viennent pas de Mars, ils veulent nous conduire tout droit en enfer.

Les salafistes soufflent un vent de terreur sur les Tunisiens. Ceux qui les menacent «veulent imposer un mode de vie précis et menacent les libertés en Tunisie», a précisé, à l’occasion de la célébration du 35ème anniversaire de la LTDH (Ligue tunisienne des droits de l’Homme), doyenne des organisations de défense des droits de l’Homme en Afrique et dans le monde arabe, son président d’honneur, l’avocat Mokhtar Trifi. La mouvance en question se partage entre les piétistes, qui ne se mêlent pas de politique, les politiques et les djihadistes, pour qui la violence est légitime pour imposer la religion. “Des groupes violents, qui sont hors-la-loi, propagent la terreur et agressent physiquement et moralement des femmes, des intellectuels, des journalistes, des créateurs, des syndicalistes, des politiciens ainsi que des militants des droits de l’Homme“, selon Abdessatar Ben Moussa, le président de la LTDH.

Le tout sous un regard pour le moment passif ou craintif, contemplatif et complaisant d’un ministre de l’Intérieur qui a donné l’alerte sur de vraies menaces qui pèseraient sur la Tunisie. Après Ali Larryedh, voici venu le tour de Nourreddine Bhiri, ministre de la Justice, de siffler la fin de la récréation. Un coup de sifflet qui a surtout servi à démultiplier les noyaux de dissidences et de violences.

Du côté d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, disait le 28 octobre 2011 au journal Le Monde: «Il n’y a aucune preuve que la base d’Ennahdha soit plus radicale que la direction. Si c’était le cas, cela se serait vu. La direction aurait changé lors des congrès». Il expliquait que «cette accusation vient de nos adversaires politiques qui ont aussi utilisé, durant la campagne électorale, l’argument du double langage sans la moindre preuve. S’agissant des salafistes, ils sont là. Nous avons quelques débats avec eux afin qu’ils changent leur vision de l’islam, comme le fait de dire que la démocratie est “haram” [interdite] ou “kafir” [mécréante]… Les salafistes ont le droit d’avoir leur opinion. Même si elle n’est pas bonne, l’Etat n’a pas à s’en mêler, sauf s’ils commettent des violences».

Reste désormais une question et une seule: le curseur de la violence chez Rached Ghannouchi et chez le peuple tunisien se situe-t-il au même niveau?

Entre temps, allez dire à tous ces Tunisiens et tunisiennes qui, depuis des mois, sont persécutés, intimidés et insultés dans les rues. Allez dire à ces hommes pieux qui ont arrêté d’aller dans les mosquées y faire leurs prières, car dans cette conjoncture, ils ne s’y reconnaissent plus. Allez dire à ceux qui ont envie de leur bière, d’une pièce de théâtre, ou d’une soirée entre amis qu’ils n’y ont plus droit. Allez dire à tous ces gens qui subissent les affres d’une situation sécuritaire marquée par des troubles de moins en moins éparses. Bien que dans une récente déclaration, le colonel major Mokhtar Ben Nasr, porte-parole du ministère de la Défense nationale, ait déclaré que la situation stable, mais tout en reconnaissant que les incidents ont triplé au mois de mai (par rapport à avril 2012), alors que les barrages des routes ont doublé dans la même période.

Ali Laareydh reconnaît difficilement les faits et tente de rassurer en affirmant que ses services sont en train de faire leur possible pour rétablir l’ordre. Qui le croit? Au vu de l’actualité d’un week-end à feu. Il inquiète plus qu’il ne rassure. Qui et quand va-t-on arrêter ce cirque salafiste?

Par Amel Djait

Article publié sur WMC

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