Les experts et acteurs de la société civile qui ont participé samedi à une rencontre-débat à Béja, étaient très partagés sur le projet de loi sur la réconciliation économique et financière
De l’avis du président du réseau “Doustourna” Jawher Ben Mbarek, cette loi initiée par le président de la République est contraire à la Constitution et au principe de l’indépendance de la magistrature dans la mesure où elle va permettre à une commission administrative de prendre des décisions et des dispositions. Plus encore, a-t-il relevé, cette loi « menace la stabilité de la société tunisienne.»
D’après lui, le peuple a besoin d’une autre forme de réconciliation, celle de rétablir la confiance avec les institutions de l’Etat.
La loi sur la réconciliation économique, a-t-il argumenté, n’aura pas « un impact financier positif, car c’est une loi qui concerne les propriétaires de biens confisqués faisant l’objet de poursuites judiciaires ». Tous ceux qui ont dilapidé les fonds publics ne doivent en aucun cas être pardonnés, selon lui.
De son côté, l’expert en économie, Mustapha Jouili a estimé que cette loi représente une forme de « blanchiment de la corruption et un retour en force du système de corruption », relevant que « les arguments avancés selon lesquels cette loi serait un moyen d’améliorer l’investissement sont erronés ».
Dans ce sens, il a précisé que cette loi ne présente aucune garantie sur la contribution des personnes concernées à l’impulsion de l’investissement.
Aucune partie n’est capable d’évaluer les gains dès lors que l’ampleur de la corruption ne peut être chiffré, a-t-il dit.
D’un autre côté, le président de l’Association tunisienne de gouvernance Moez Joudi a appelé à la « régularisation de la situation », relevant que l’administration tunisienne est « bloquée suite à un climat de peur d’assumer la responsabilité; ce qui est susceptible de freiner la marche économique ».
Il a, à ce propos, relevé que le projet de loi sur la réconciliation économique, en tant que principe, n’est pas une normalisation avec la corruption mais un moyen d’améliorer le climat des affaires à condition d’y apporter certains amendements.
Corroborant cet avis, l’universitaire Sami Mahbouli a indiqué qu’après quatre ans de « revanches et de tensions », il s’avère aujourd’hui que l’adoption de cette loi est « incontournable ».
Cette loi peut être adoptée avant la fin de l’année en cours, a-t-il proposé, car elle constitue un pas positif sur la voie de la réconciliation totale de manière à rétablir la confiance des acteurs de l’économie et de l’administration et améliorer la situation en Tunisie.