Je partage ce bel hommage de Tahar Ben Jelloun à la Constitution Tunisienne, aux femmes tunisiennes et à la Tunisie tout court et ce malgré ses imprécisions, note Radhi Meddeb sur sa page faceBoo,, en réaction à l’article de Tahar B en Jelloun sur le point.fr.
L’arbre du Printemps arabe vient de donner ses premiers fruits en Tunisie. C’est la première fois qu’un pays arabe et musulman inscrit dans sa nouvelle Constitution l’égalité entre l’homme et la femme (“Les citoyennes et citoyens sont égaux devant la loi sans discrimination”). En même temps, il a réussi à mettre de côté la charia en instaurant la liberté de conscience (“L’État est le gardien de la religion. Il garantit la liberté de conscience et de croyance et le libre exercice du culte”). Il garantit aussi la liberté d’expression et interdit la torture physique et morale (“La torture est un crime imprescriptible”).
Mais tout n’est pas joué. Encore faut-il que les élections législatives et présidentielle puissent confirmer dans les urnes ce progrès et ce choix de société. Les forces de la régression n’ont pas désarmé. Les salafistes n’ont pas disparu du paysage et, de temps en temps, ils se manifestent en s’attaquant aux forces de police ou aux citoyens qui vivent librement. Leur mouvement Ansar al-Charia (les défenseurs de la charia), dirigé par un vétéran de la guerre en Afghanistan, le Tunisien Abou Iyadh, a été classé par le gouvernement comme “organisation terroriste”.
Les pays du Golfe, notamment l’Arabie saoudite et le Qatar, suivent le rite wahhabite, qui est un dogme rigide et rétrograde datant du XVIIIe siècle. Aujourd’hui, des femmes manifestent pour avoir le droit de conduire une voiture, en Arabie, un pays où l’on continue d’appliquer la charia. L’hypocrisie occidentale qui aime signer des contrats juteux avec ces pays fait mine de ne pas savoir qu’elle traite avec des champions de la régression.
On verra dans le proche avenir comment ils réagiront face à ce tournant historique et exceptionnel d’une nation qui s’est mise sur le chemin de la laïcité, étant entendu que celle-ci n’est pas le refus de la religion, mais la séparation de la sphère publique et de la sphère privée, avec cependant la liberté de croire ou de ne pas croire. L’Égypte, dans le passé, a condamné à mort des citoyens qui avaient une lecture non orthodoxe du Coran. Ils ont été désignés comme apostats, crime absolu du point de vue islamique. Dans la Tunisie nouvelle, la Constitution a aussi interdit la référence à l’apostasie.