Le premier élément important à analyser est de savoir s’il y a une corrélation entre les taux élevés de l’inflation et la décélération de l’activité économique. Il est évident que La récession économique que la Tunisie est en train de vivre s’accompagne de taux élevés d’augmentation des prix. Mathématiquement il y a déjà un équilibre entre les prix, l’offre et la demande qu’il ne faut pas d’ailleurs détériorer (mathématiquement, nous n’avons pas de problème). Puis si on veut vraiment contrôler les prix, Il faut prendre en considération les marges de profit et la rentabilité des investissements. Sinon, nous risquons de ruiner toute notre économie!
La principale caractéristique du processus inflationniste en Tunisie est la faiblesse des récoltes agricoles et de la production des secteurs primaires. En fait, les prix agricoles jouent un rôle important dans l’augmentation de l’indice général des prix. Tout cela a été aggravé par la politique gouvernementale en matière de stocks régulateurs. C’est le ministère des Finances qui doit s’occuper de la coordination générale de la politique d’approvisionnement. Il faut noter que ceux-ci devraient être constitués, sur la base moyenne de trois mois de consommation, pour les produits fondamentaux comme les pommes de terre, les céréales, le riz et les tomates en boites de conserves.
Le gouvernement semble avoir perdu le contrôle du processus inflationniste et je crains même l’hyperinflation à la suite de la baisse provisoire et artificielle des prix. Le blocage des prix à long terme ne peut qu’aggraver la situation. Il n’est qu’une simple rhétorique afin de calmer les esprits des Tunisiens. Il ne faut pas déséquilibrer artificiellement l’équation mathématique naturelle entre l’offre et la demande. Sinon, on va consommer le peu que l’on a et après ça sera la famine! Il faut plutôt expliquer aux Tunisiens que 200 grammes de viande par famille sont largement suffisantes pour faire de la bonne cuisine nutritive sans se ruiner et ruiner notre pays…
Nos agriculteurs sont à 90% ignorants et routiniers et ne font qu’un très petit profit (ou même pas). Nous consacrons un espace énorme et un travail considérable dans tous les domaines économiques mais la rentabilité est minimale, de tel façon qu’il n y a pas assez pour tous les tunisiens. Le problème principal est que nous ne ressentons pas la nécessité d’améliorer nos méthodes de production. Il faut que l’on sorte de cette routine. Nos agriculteurs et une grande partie de nos industriels manquent de stimulation et ils restent dans leur ignorance et routine. La perte de rentabilité causée par une faible production porte tout le peuple tunisien. Nous avons baissé les bras et on s’est résigné à suivre les mêmes routes tracées depuis des décennies. Nous restons ainsi aussi pauvres qu’auparavant parce que nos frais de productions absorbent tous. Qu’est-ce qui nous empêche d’aller plus loin ? Qu’est-ce qui nous frêne? La grande problématique des tunisiens c’est bien cette difficulté à mener une activité à son terme. Il semble que tout nous fasse envie mais nous ne menons jamais les choses jusqu’à leur optimum (rien n’est réellement fini). Et c’est ici où nous avons besoin de nos académiciens et de leur capacité scientifique et analytique. Nous avons besoin de tous ceux qui ont fait des études universitaires et qui sont doués d’un esprit supérieur. La Tunisie a besoin de diplômés qui s’investissent à fond dans les projets même s’ils n’ont rien avoir avec ce qu’ils ont appris auparavant. Nous voulons augmenter notre productivité dans tous les domaines économiques. Il faut permettre au peuple de manger, de s’habiller et d’habiter à bon prix. Il faut augmenter la productivité et diminuer le prix de revient et celui de vente. Oui, tout cela est possible…
Notre problème principal est que nous nous contentons d’avoir un regard extérieur sur les choses, sans être prêt à faire vivre ce regard à travers une implication à l’intérieur de nous-mêmes qui peut nous guider automatiquement à des nouvelles démarches inspiratrices. Tout ce que l’on veut faire, il faut le faire de toutes ses forces, avec toute son énergie, que ce soit dans la construction de soi-même, de son couple, de son identité ou de notre pays. Ce qui donne de la valeur à la chose, c’est l’intensité de l’effort que je mets à l’intérieur de celle-ci. La Tunisie a une exigence vis à vis du Tunisien, c’est d’être en permanence dans cette notion d’effort, d’aller au-delà des choses et de réapprendre à regarder le monde, regarder autour de soi, être capable d’avoir un horizon une vision qui va au-delà de l’instant présent.
Commentaire de Dr. Jamel Tazarki à l’article Les prix salés de la « Chakchouka » (mise à jour)