Des juges administratifs ont appelé à ce que soient institutionnalisées, dans la future Constitution, l’ensemble des règles garantissant l’indépendance de la justice administrative et à même de conférer plus d’effectivité et d’efficience au fonctionnement du Tribunal administratif.
Ils ont réclamé la constitutionnalisation des arrêts de cette juridiction et la criminalisation de quiconque refuserait l’exécution de ces arrêts. Ces revendications ont été exprimées lors du colloque international organisé ce jeudi à Tunis par l’Union des magistrats administratifs à l’occasion du 40e anniversaire du Tribunal administratif.
Tenue à la Bibliothèque nationale, la rencontre avait pour thème : « L’effectivité de la justice administrative ». Le juge Mohamed Ayadi, porte-parole de l’Union, a mis en évidence, dans une déclaration à l’agence TAP, « la nécessité d’évaluer à quel point la justice administrative est effective et efficiente, en particulier pour ce qui est de la question lancinante de l’exécution des arrêts, du non déploiement du Tribunal administratif dans les différentes régions et de la lenteur notoire des procédures d’examen des dossiers.
Pour lui, ces lacunes que connaît la justice administrative « gagneraient à faire l’objet d’une pause de réflexion que commandent les spécificités de la période de transition et de manière à ce que le juge administratif puisse remplir sa fonction dans des conditions optimales ». Le nombre annuel d’affaires sur lesquels le Tribunal administratif est appelé à statuer s’est élevé à quelque 12 mille dossiers après la révolution alors que cette juridiction ne compte pas plus de 120 juges, selon Ayadi.
Ce dernier a, par ailleurs, réclamé la publication du rapport annuel du Tribunal administratif pour « permettre au public d’en connaître en détail la teneur, notamment les données statistiques et les arrêts rendus, et ce dans un souci de transparence et d’indépendance de la justice ».
Les interventions et le débat général se sont focalisés sur « l’impératif de conforter le rôle de la justice administrative par l’institutionnalisation de nouveaux mécanismes à même de favoriser l’exécution des arrêts rendus à l’endroit des administrations publiques, notamment celles ouvrant droit à des indemnisations ». Les intervenants ont engagé l’Etat à déployer un système de justice administrative cohérent sur l’ensemble du territoire national afin d’en faire un service de proximité et d’assurer l’aboutissement des requêtes dans des délais raisonnables. Pour le conseiller près le Tribunal administratif Moez Boubaker, la création de tribunaux et chambres régionaux consacrerait la décentralisation administrative et assurerait une répartition plus judicieuse des affaires entre la justice judiciaire et la justice administrative.
Certains intervenants ont préconisé de mettre à profit les expériences internationales avancées en matière de développement des modalités de règlement des contentieux administratifs, appelant en outre à la refonte de la loi organisant le fonctionnement du Tribunal administratif et des autres textes y afférents. Un intervenant s’est interrogé sur la question de savoir jusqu’à quel point le pouvoir est disposé à oeuvrer pour l’avènement de l’Etat de droit, dans le contexte de la polémique actuelle sur des questions comme le caractère civil de l’Etat ou la place de l’Islam dans la future Constitution. Plusieurs autres thèmes figurent au menu de ce colloque, notamment « le juge de référé », « l’aide judiciaire » et « le rôle consultatif du tribunal ».