Tribune A la Une – Jamel Tazarki : La crise, c’est la faute aux autres

Pour le Premier ministre, tout va bien. La Tunisie est sur la bonne voie. Sans surprise, la réconciliation nationale et l’autocritique n’ont pas eu leur place dans l’interview (qui était plutôt un monologue).

Le Premier ministre, comme à son habitude, a ponctué son intervention de chiffres, toutefois sans donner aucune unité de monnaie: Franchement, je n’ai pas su s’il parlait de Millions de dinars, de millimes, de dollars ou d’euros!

Il se félicite des pronostics économiques de madame Lagarde (la patronne du FMI) dont il n’a pas vraiment compris le message. Madame Christine Lagarde exige indirectement du gouvernement tunisien une croissance réelle (nette) de 2,7% allant jusqu’à 6 % de notre PIB durant les prochaines années tout en remboursant nos dettes! C’est une mission impossible! Il va falloir bientôt nous faire de nouvelles dettes afin de rembourser les dettes que Monsieur Ben Ali a eues sans aucune difficulté du FMI! Mais cette fois-ci à un taux d’intérêt très élevé! Ceci signifie aussi qu’il faut abandonner tous nos projets d’investissements publics: la crise du logement, la pénurie d’eau et d’électricité, l’aide sociale… Madame Lagarde nous demande poliment de bloquer l’investissement public pour permettre aux profits financiers de capter une part croissante de la richesse produite afin de rembourser en particulier nos dettes.

 

Ce gouvernement a apparemment réalisé une croissance de 1,8% de notre PIB mais il ne faut pas oublier que nous n’avons pas encore remboursé un centime de nos dettes et que Les intérêts dus ont été pris en charge par nos amis les américains! Puis, je rappelle à Monsieur Jebali que la croissance économique offre seulement une certaine mesure quantitative du volume de la production.

Mais elle ne dit rien sur le déficit budgétaire, le chômage et la situation sociale du pays. Peu importe pour le FMI s’il y a progression de la société tunisienne dans l’absolu : Toute augmentation de la valeur ajoutée signifie des revenus afin de rembourser nos dettes. Et, c’est seulement ça qui compte pour madame Lagarde.

Monsieur Hamadi Jebali a trouvé les coupables de la crise: la crise c’est la faute aux autres ! Sauf à lui et à son gouvernement. Et si ce ne sont pas les autres, alors la crise est la faute à la crise. Monsieur Hamadi jebali, aurait pu évoquer l’absence de programme précis de son gouvernement. Voici presque une année que le parti politique Ennahdha est au pouvoir et il veut toujours faire croire aux Tunisiens que si le pays va mal, c’est à cause de l’opposition et de l’UGTT.

Cet entêtement démagogique coûte cher à notre pays. Si le parti Ennahdha est réélu en 2013, il amplifiera cette politique inefficace et injuste, parce qu’il est idéologiquement convaincu qu’il y a les bons (les pieux) et les mauvais (les non pratiquants) Tunisiens. S’il est réélu en 2013, il continuera de mener sa politique résolument pensée et tournée contre les Tunisiens.

Nous ne voulons pas retirer tout pouvoir à la légitimité démocratique de l’ANC. Le problème, c’est que la majorité du peuple n’a pas confiance en Monsieur Rached Ghanouchi et en Monsieur Hamadi Jebali.

Le monde entier et la majorité des Tunisiens ont une image négative d’eux et ils ne pourront jamais la changer en quelques jours. Les images existent, elles sont opérantes et Monsieur Rached Ghanouchi ne peut pas les modifier du jour au lendemain! L’image d’une personne ne peut guère se déconnecter de son passé, dans lequel elle plonge pour prendre ses racines. Les images sont des projections de la réalité! La confiance du peuple ne se décrète pas, elle se gagne!

Monsieur Jebali a intimidé ses interlocuteurs (les journalistes qui ont mené l’interview) en se servant de l’agressivité verbale (des actes blessants psychologiquement) et du contrôle pour conserver une position de pouvoir par rapport à eux. Ces actes blessants sont répétés au cours de l’interview, de sorte que les journalistes qui en sont victimes ont de plus en plus de difficulté à s’en sortir.

Au cours de l’interview le déséquilibre de pouvoir dans la relation et sa dynamique se sont renforcé du côté du premier ministre. Enfin de compte, les journalistes ont perdu toutes confiances en eux et ils ont fini par bégayer! Cette technique d’intimidation est la seule arme de Monsieur Jebali. Il ne cherche jamais à convaincre mais il cherche plutôt à intimider…

Monsieur Jebali a montré des troubles de la concentration et de la mémoire lors de l’interview. Alors, on se demande comment peut-il prendre des décisions dans des domaines quotidiens.

Les journalistes ont dû lui poser les questions à compte-goutte (une par une). Comment fait-il alors durant les rencontres internationales où il faut être capable du multitasking (il faut être capable de jongler simultanément avec plusieurs idées et plusieurs thèmes afin de tirer des conclusions intéressantes). Il est temps que Monsieur Jebali parte à la retraite. Il est en train de ruiner sa santé et celle de la Tunisie! J’espère que le prochain remaniement gouvernemental le libèrera de ses charges…

 

Commentaire de Dr. Jamel Tazarki à l’article Tunisie: Les raisons de la démission de Dimassi, selon Hammadi Jebali