Raoudha Garafi : Le dernier mouvement des magistrats n’aide pas la profession dans sa lutte anticorruption

“Le dernier mouvement opéré dans le corps des magistrats ne peut, aucunement, aider la profession à conforter la transition démocratique, particulièrement en matière de lutte contre le crime et la corruption, et à préserver les droits et libertés”, a indiqué jeudi, la présidente de l’Association des magistrats tunisiens (AMT), Raoudha Garafi.

Démontrant les conséquences de certaines décisions de mutation sur la lutte anticorruption, Garafi a fait observer que le procureur de la République près le tribunal de première instance de Sidi Bouzid a été muté à Sfax pour avoir ordonné l’ouverture d’une enquête sur de faux constats d’accidents de la route pour extorquer les assurances. Selon Garafi, “plusieurs parties officielles ont tenté de dissuader le magistrat de poursuivre cette enquête”.

Lors d’une conférence de presse, jeudi, Raoudha Garafi a dénoncé le favoritisme dans l’attribution des fonctions judiciaires sensibles, tels que la présidence des chambres de cassation, des cours d’appel et des tribunaux de première instance ou encore le poste de procureur général.
Elle a, par ailleurs, déploré l’absence de toute transparence dans les travaux du Conseil de l’ordre judiciaire concernant le mouvement des magistrats.
A ce propos, Garafi a appelé les magistrats concernés à intenter des recours à cet effet.

Sur la situation financière des magistrats, Garafi a indiqué que les autorités avaient affirmé, mercredi, que les décisions d’attribution de primes aux magistrats attachés aux pôle judiciaire économique et financier et pôle judiciaire antiterroriste vont bientôt être publiées.

Selon Gafari, la décision d’exonérer la mutuelle des magistrats des impôts est, également, entrée en vigueur, ajoutant que l’amélioration des conditions de travail dans les tribunaux est la priorité actuelle de plusieurs départements ministériels.

Le report des élections municipales joue en faveur des tribunaux régionaux

Le secrétaire général de l’AMT, Hamdi Mrad, a pour sa part critiqué l’état des locaux fournis par les autorités aux sections régionales du Tribunal administratif. “Certains locaux ne répondent pas aux critères et ne peuvent pas abriter des tribunaux”, a-t-il expliqué, citant l’exemple de la chambre de Bizerte qui n’est autre qu’”un simple appartement”.Pour Mrad, le report des élections municipales joue en la faveur de la mise en place des tribunaux administratifs. “Cela nous permettra de nous préparer convenablement à ce rendez-vous important et à notre devoir d’examiner les recours dans les délais”, a-t-il expliqué.

Il a, également, appelé à l’accélération des procédures de recrutement des ressources humaines. Le report des élections, a-t-il ajouté, ne doit pas être un prétexte pour ralentir l’achèvement de la mise en place de ces tribunaux.

Rappelons que l’AMT a déclaré, lors de sa réunion dimanche à Hammamet, que les recours formés contre le mouvement du corps des magistrats, et dont le nombre avoisine les 300, révèle la gravité des dépassements commis lors de la prise des décisions relatives à la mutation des magistrats, à leur avancement et à l’attribution des fonctions judiciaires.

Le conseil national de l’AMT a invité les magistrats, dans une motion publiée à l’issue de ses travaux, à saisir le Tribunal administratif en cas de réponse négative aux recours déposés.