Tunisie-Accord factions libyennes : «Kharrabtouha Il Joumhouria» !

accord-libye«Kharrabtouha Il Joumhouria» (Vous avez anéanti la République). Quoi de plus éloquent que ce titre d’une chanson libanaise qui exprime tout le désespoir d’un peuple impuissant devant les incartades, les conflits inter-partisans et la prolifération de la corruption à tous les niveaux ? Pour illustrer également le coup porté au prestige de l’Etat, par un pseudo accord signé dans un hôtel à Gammarth entre des prétendues factions libyennes représentatives des deux camps dissidents occupant la scène politique libyenne et incapables de trouver un terrain d’entente entre eux dans leur propre pays ?

Rien d’officiel concernant la conclusion et la réussite de l’accord présumé, aucune couverture institutionnelle tunisienne, absence du médiateur des Nations unies, l’Allemand Martin Kobler, et pourtant on «braille» sur tous les toits la signature d’un accord libyo-libyen! Serait-ce un rêve ou un cauchemar?

Le ministre tunisien des Affaires étrangères,lui, n’était pas au courant. À quoi aurait servi sa présence ou celle de Kobler? Les artisans de cette farce ne cessent d’affirmer que c’est un accord libyo-libyen!
Là où des médiateurs réputés de l’ONU ont failli et des pays de l’envergure de l’Algérie, de l’Egypte et du Maroc, pour ne citer que ceux-là, peinent à accorder les violons des rivaux, ça serait donc le DG d’une télévision, amoureux des mises en scène hautes en couleurs et un affairiste, qui réussiraient! Bénie sois-tu, oh chère Tunisie postrévolutionnaire! Nous en avons vu des vertes et pas mûres avec toi !

Pire, il n’existe aucune indication quant au niveau de représentativité des signataires des factions antagonistes libyennes, au sérieux de leur engagement dans le processus de réconciliation nationale ou encore de la place qu’elles occupent sur la scène politique libyenne. Notre voisin est occupé, depuis 2011, par des milices surarmées et miné par la présence des djihadistes de tous bords allant de Daech à à Fajr Libia (Les plus doux, semble-t-il), en passant par Al Qaeda, Boko Haram.

libye

Salah Hemma, membre du Parlement libyen de Tobruk et membre de l’équipe menant les négociations à Skhirat au Maroc qui avaient été dirigées, à l’époque, par Bernardino Leon, a déclaré que l’accord de Tunis n’engageait en rien le Parlement reconnu à l’international. Son confrère Fethi Amiche, censé être en mission aux Etats-Unis d’Amérique, a, à leur grande surprise à lui et autres députés Libyens, participé aux négociations à Tunis sans les en avoir avisés au préalable. Ce qui, du coup, enlève toute légitimité et légalité aux pourparlers.

Allant dans le même sens, notre source au MAE nous assure: «Rien ne prouve que les parapheurs ont été chargés de mener cette mission par la majorité des acteurs libyens». Et cerise sur le gâteau, c’est l’Egypte qui annonce que tous les accords qui ne s’adossent pas à celui de Skhirat signé sous l’égide des Nations unies et mené par Leon ne sont pas acceptables. Nous nous sommes même distingués en nous mettant les Nations Unies et son nouveau médiateur sur le dos!

Pour rappel, un accord baptisé accord «de paix et de réconciliation» proposé par l’ONU signé par une partie des adversaires en Libye et paraphé dans la ville marocaine Skhirat, a eu lieu il y a quelques mois.

Voilà qui met la Tunisie dans de beaux draps d’autant plus qu’il y a tout juste une semaine, l’Algérie avait réuni la 7ème réunion ministérielle ordinaire des pays voisins de la Libye. Une réunion à laquelle ont participé, outre le pays hôte, l’Egypte, le Soudan, le Niger, le Tchad et la Tunisie ainsi que l’Union africaine, la Ligue arabe, l’Union européenne, la Libye ainsi que le nouveau représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour la Libye, Martin Kobler. C’est ce qu’on appelle un Etat qui agit en Etat!

Pour rappel aussi, au sortir de l’ARP, il y a quelques jours, Taieb Baccouche, ministre des Affaires étrangères, avait invité ses homologues en Algérie et en Egypte à une rencontre pour discuter d’une approche commune concernant la crise libyenne. Il nous a d’ailleurs affirmé que la Tunisie ainsi que les pays limitrophes de la Libye se rejoignent tous sur le principe de la formation d’un gouvernement d’unité nationale libyen avant d’aborder la question d’une possible intervention musclée dirigée en direction des milices armées!

Où a disparu le prestige de l’Etat monsieur le président ?

Une diplomatie tunisienne apparemment agissante, c’était ce à quoi nous aspirions, avant que d’autres protagonistes entrent en scène. On pensait la Tunisie sur le chemin de la reconstruction et du renforcement de ses institutions mais la voilà sur la voie de la somalisation. Quoi de plus évident, lorsque les lois de l’argent et des médias font foi en l’absence de l’Etat.

Qui a chargé ces lobbys des milieux des affaires douteuses et des médias d’assurer la médiation? Le chef du gouvernement aurait-il décidé d’éliminer, lors du prochain remaniement ministériel, le portefeuille du ministère des Affaires étrangères? Mieux encore, le président de la République aurait-il décidé de céder ses prérogatives en matière de diplomatie internationale à des personnes tierces? Lui qui n’a pas cessé de nous parler du prestige et de l’autorité de l’Etat? Lui, le pur produit d’une diplomatie de haute voltige apprise avec le grand Bourguiba? Où a disparu le statut de l’Etat monsieur le président?

Aurions-nous, nous Tunisiens, été les malheureux témoins ou spectateurs ébahis, offusqués et désorientés d’une mauvaise scène d’un film baptisée «Petites combines entre amis qui défendent les mêmes intérêts ? » C’est le cas de le dire. Pire, l’Etat tunisien a été ridiculisé et mis en miettes car après le l’accord mascarade, une délégation des signataires, a été reçu au Palais de Carthage par le Président de la République lui même lui offrant la couverture institutionnelle.
Dans le communiqué présidentiel, il est déclaré en substance: «Le président de la République a accueilli dimanche 6 décembre des délégations représentant les conseils de Tobrouk et du congrès national libyen… Il a pris connaissance de la teneur de l’accord signé entre les deux parties… a rappelé que la Tunisie approuve tous les accords signés sous l’égide des Nations unies, etc.». Des phrases creuses sans aucune consistance. On dirait que notre Président a été dans la complaisance! Par rapport à qui? A quoi et aux dépends de qui? De la Tunisie? De l’image de l’Etat?

Un observateur avisé de la scène politique a posté ces deux statuts: «J’AI L’IMMENSE REGRET, mais vraiment un regret incommensurable, DE VOUS INFORMER QUE L’ACCORD LIBYEN EST UNE SUPERCHERIE. J’allais écrire BRAVO GHANNOUCHI qui a vu l’orage arriver et a immédiatement demandé à Fajr Libya de signer un accord et de prendre 50% du pouvoir au lieu d’être balayé avec l’éradication de Daech. Mais les infos que je viens de recueillir depuis le siège de l’ONU me rendent subitement pessimiste. C’était trop beau, malheureusement… L’accord est pratiquement ficelé avec TOUTES les parties, oui toutes, sous l’égide de l’ONU. Les soi-disant représentants réunis à Gammarth ne sont que des fantoches mis en place par l’organisation mondiale des Frères Musulmans pour court circuiter l’accord. Les instruments utilisés pour tromper le monde (mais ils n’ont trompé que les tunisiens) sont Al Jazeera et Nessma. Ce qui est grave c’est l’implication de l’Etat Tunisien pour apporter l’unique caution à cette supercherie. La Tunisie est-elle si facilement manipulable contre l’ONU?

OÙ SONT NOS JOURNALISTES D’INVESTIGATION? Où sont nos journalistes tout court?

Ils ont l’obligation et le devoir de démonter la SUPERCHERIE blanchie par Al Jazeera et Nessma TV (et manigancée par qui vous savez) relative au soi-disant accord libyen de Tunis. Le drame pour la Tunisie c’est que le sol tunisien a servi de théâtre pour cette comédie aux graves conséquences pour notre pays. Et, pire, les plus hautes structures de l’Etat Tunisien ont été impliquées».

Le drame pour la Tunisie est que nous n’arrivons plus à séparer les structures de l’Etat des relations familiales ou amicales, ou encore des intérêts financiers. John Kerry, secrétaire d’Etat américain aux Affaires étrangères avait appelé le gouvernement tunisien à s’investir plus dans la lutte contre la corruption et la préservation des acquis fragile d’une démocratie embryonnaire. Ce que nous vivons aujourd’hui n’est pas rassurant du tout car les orientations de la Tunisie à commencer par le haut de la pyramide ne vont apparemment pas dans la bonne direction.

La corruption est partout tout comme les cellules dormantes du terrorisme. Lik rabbi ya Tounes!

A.B.A