Mokhtar Trifi, membre du collectif de défense du martyr Chokri Belaid, a fait état d’une présomption selon laquelle l’arme qui avait servi à assassiner les martyrs Chokri Belaid et Mohamed Brahmi “serait en rapport avec la direction générale de la sureté publique”.
S’exprimant, jeudi, lors d’une conférence de presse conjointe avec l’Initiative IRVA pour la recherche de la vérité sur l’assassinat des martyrs Belaid et Brahmi, tenue à la Maison de l’avocat, à Tunis, Trifi a affirmé que le ministère de l’Intérieur avait, sciemment, passé sous silence le rapport d’expertise balistique relatif au meurtre de Belaid et d’après lequel l’arme du crime est un revolver Beretta 9 mm, le même type d’arme utilisé par certains agents et autres gradés de la direction générale de la sureté publique.
Il a précisé qu’il avait été fait recours aux services de l’Institut néerlandais de criminologie pour l’établissement de ce rapport remis, selon lui, en mains propres à une délégation du ministère de l’Intérieur qui s’était rendue, à cet effet, aux Pays-Bas, le 29 mai 2013, lequel rapport n’a été “ni transmis par la délégation au ministère de la Justice, ni versé au dossier de l’enquête”.
L’existence de ce rapport, a encore déclaré Trifi, a été découverte à la suite d’une note verbale du ministère néerlandais des Affaires étrangères à son homologue tunisien, en date du 25 septembre 2013, et relative à l’exécution d’une commission rogatoire internationale, avec production d’une copie conforme du rapport d’expertise balistique de l’Institut néerlandais de criminologie.
Après audition de la délégation dépêchée aux Pays-Bas, “il a été établi que le rapport en question a été versé aux archives du ministère de l’Intérieur”, a ajouté Trifi, précisant que la vérification de la liste nominative des personnes censées avoir eu connaissance de la notification du rapport au ministère de l’Intérieur a permis de constater qu’ils font tous partie de la direction générale de la sureté publique”.
Toujours selon les propres termes de Mokhtar Trifi, “le fait que de hauts responsables du ministère de l’Intérieur aient pris sur eux de cacher le résultat de l’expertise balistique, malgré la gravité de la chose, ne peut s’expliquer que si la direction générale de la sureté publique a un rapport et avec le crime commis et avec l’arme utilisée “.
Trifi a indiqué que l’Initiative IRVA déposera une plainte au pénal contre les personnes impliquées dans des faits de désinformation ayant un lien avec cette affaire, ” quel que soit leur poste”, affirmant que tous les faits présentés au cours de la conférence de presse sont “dûment actés” et ne sont nullement le fruit d’interprétations. Trifi a, également, fait observer que le ministère de l’Intérieur avait eu connaissance de l’existence “d’une voiture sans plaque d’immatriculation à l’arrière, repérée par les caméras de vidéosurveillance en train de roder autour du domicile du martyr Chokri Belaid”, et ce plusieurs jours avant la date de l’assassinat, sans que le ministère n’émette un avis de recherche concernant ce véhicule.
D’après la version de Trifi, la voiture en question allait s’avérer appartenir à un certain Ahmed Rouissi, impliqué dans l’affaire du dépôt d’armes de Médenine.
Selon Trifi, les services concernés du ministère de l’Intérieur auraient négligé nombre de données graves de l’affaire Belaid, comme la perquisition des domiciles et lieux de travail des personnes impliquées. De son côté, la veuve de Belaid, Basma Khalfaoui, a indiqué que l’Initiative IRVA rédigera un rapport destiné à détailler tous les manquements et autres dysfonctionnements constatés au niveau de l’enquête menée et que le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU en sera saisi.