Les pays dont la banque centrale est crédible et où il existe des capacités inutilisées peuvent se permettre de ne pas se soucier de la hausse de l’inflation globale provoquée par les cours des matières premières.
Les hausses des prix des produits alimentaires peuvent avoir des effets secondaires particulièrement importants dans les pays où la banque centrale est moins crédible et qui subissent la pression d’une demande excédentaire; une riposte plus active des pouvoirs publics est préconisée dans ces pays.
Les cours des matières premières ont des effets plus intenses sur l’inflation dans les pays où la part de l’alimentation est élevée et la crédibilité de la politique monétaire faible – ce sont des caractéristiques que partagent un certain nombre de pays émergents et en développement.
Il peut être difficile d’atteindre un objectif d’inflation quand les cours des matières premières fluctuent. Une banque centrale qui essaie d’atteindre un objectif d’inflation globale risque de saper sa crédibilité et de déstabiliser l’économie.
Le ciblage de l’inflation sous-jacente, qui peut être mesurée de diverses façons, permet de renforcer la crédibilité et, ainsi, de parvenir à de meilleurs résultats économiques. Il vaut mieux viser un objectif que l’on est en mesure d’atteindre.
Ce chapitre étudie les effets inflationnistes des mouvements des cours des matières premières et la riposte monétaire appropriée. Les cours mondiaux des matières premières ont récemment connu une certaine volatilité (voir graphique). D’après notre analyse, les mouvements de ces cours ont des effets plus intenses et plus durables sur l’inflation dans les pays où la part de l’alimentation dans le panier de consommation est élevée et dans les pays où les anticipations inflationnistes sont ancrées moins fermement. Ce sont des caractéristiques que partagent un certain nombre de pays émergents et en développement.
L’inflation sous-jacente est une mesure qui reflète les variations de l’inflation qui risquent de se prolonger à moyen terme. Une telle mesure est résiliente aux chocs temporaires sur les cours des matières premières. L’une des mesures possibles exclut l’alimentation et l’énergie. Il est aussi possible d’utiliser une prévision de l’inflation globale. Ce sont toutefois les circonstances du pays qui déterminent la mesure la plus appropriée.
Pour réagir à des chocs sur les prix des matières premières, il est important de voir quelle mesure de l’inflation la banque centrale utilise pour définir son objectif, à cause de son effet sur la crédibilité de l’autorité monétaire. Dans les pays où la crédibilité initiale de la politique monétaire est basse et la part de l’alimentation dans le panier de consommation élevée, il est plus facile de renforcer cette crédibilité en se concentrant sur l’inflation sous-jacente plutôt que l’inflation globale. Cela provient du fait qu’il est plus difficile d’atteindre des objectifs d’inflation globale que des objectifs d’inflation sous-jacente quand les cours des matières premières sont volatils. Une meilleure crédibilité permet alors de mieux ancrer les anticipations inflationnistes et de réduire la volatilité de la production et de l’inflation.
Le message principal de ce chapitre est de «viser les cibles que l’on peut atteindre». Puisque les chocs sur les cours des matières premières sont généralement durs à prévoir et qu’ils ne durent souvent pas longtemps, une banque centrale qui cherche à asseoir sa crédibilité fera généralement mieux d’expliquer les objectifs de sa politique en fonction de l’inflation sous-jacente plutôt que de l’inflation globale. En effet, si le ciblage de l’inflation globale permet de réduire la volatilité de l’inflation globale, cela n’est possible qu’au prix d’une volatilité considérablement plus forte de l’activité économique. C’est l’importance relative que l’on accorde à la stabilisation des prix des produits alimentaires et des matières premières plutôt qu’à celle de la production et de l’emploi qui détermine ce qu’il est souhaitable de faire.
Les pays dont la banque centrale est crédible et qui disposent de capacités inutilisées peuvent se permettre de ne pas se soucier de la hausse de l’inflation globale provoquée par les cours des matières premières. Dans les pays où la crédibilité de la banque centrale est forte – ce qui se traduit par des anticipations inflationnistes bien ancrées – et où les capacités inutilisées sont substantielles, la politique monétaire peut rester accommodante même si l’inflation globale augmente à cause des chocs sur les prix alimentaires. Ce sont les circonstances auxquelles sont confrontés un certain nombre de pays avancés et certains pays émergents de nos jours.
Dans les pays où la demande exerce une pression et où l’inflation est supérieure à l’objectif fixé, un choc sur les prix alimentaires aura probablement des effets secondaires particulièrement intenses. Une riposte des pouvoirs publics plus active que dans les autres pays est préconisée, tout en prenant garde à l’évolution de la demande extérieure. Plus l’écart initial entre l’inflation constatée et l’objectif fixé est grand, plus la perte de crédibilité est grave. Un certain nombre de pays émergents et en développement font face encore aujourd’hui à ce genre de pression.
FMI Fonds Monétaire International – 15/09/2011 12:00:05 (2)