Moez Chakchouk innocenté  : Une loi de change idéale pour intimider les hauts responsables

Acquitté ! Aussi simple que ça ! Accusé d’avoir commis une infraction à la réglementation de change, Moez Chakchouk, vient d’être acquitté. Il a gagné son procès en appel ! Et pour cause ! L’absurdité de l’accusation n’a de pareille que l’illogisme d’une réglementation de change incroyablement incohérente et qui donne aux services de douanes, disposant de grands pouvoirs discrétionnaires, les moyens de discréditer des hauts fonctionnaires de l’Etat, de les humilier et de les ridiculiser à cause de lois fourbes, injustes et inéquitables !

Après avoir, alors ministre du Transport, vu son nom traîné dans la boue par des médias et des réseaux sociaux férus de sensations fortes et jubilant à l’idée de rabaisser les compétences de l’Etat, la cour d’appel de Tunis vient de déclarer l’accusation de transgression de réglementation de change qui visait Moez Chakchouk caduque ! Dans d’autres pays démocratiques (sic), la victime aurait intenté un procès contre l’Etat et aurait exigé des dédommagements pour sévices moraux.

Les faits d’abord :

Un monsieur appelé R.A s’est présenté le 14/04/2015 au port de La Goulette pour achever les formalités de voyages à destination de Rome en Italie. A la question « qu’avez-vous à déclarer ? », il a reconnu « disposer de la somme de 1 755 euros échangés le jour même au bureau de poste de l’Ariana contre le montant de 3 697 dinars en tant qu’allocation touristique ».

Vérification faite, il s’avère que le monsieur n’y a pas droit car résidant depuis 2011 à Milan en Italie. L’employée de poste qui a procédé à l’opération a précisé qu’elle avait feuilleté le passeport et s’est assurée que le monsieur n’avait pas bénéficié d’une allocation touristique en 2015. Elle ne s’était pas rendu compte qu’il résidait à l’étranger.

L’employée de poste n’a pas été jugée responsable de ses actes, c’est son PDG qu’on accuse, juge et condamne et encore, Moez Chakchouk, avait été nommé PDG de la Poste tunisienne après les faits en date du 27/04/2015.

Il a, malgré cela, été traîné devant la justice en vertu des articles 22/35/ et 35 et 37 de loi n° 18 de 1976 en date du 21/01/1976 ainsi que l’article 44 du décret 608 de 1977 et condamné à un mois de prison !

Ce n’est pas un film d’horreur, ce sont juste les lois et la justice dans notre pays !

Pire, l’instruction qui a eu lieu en 2015 a été clôturée en 2018 et l’affaire outrageusement médiatisée en 2019 alors que Moez Chakchouk était ministre du Transport, les médias associant deux affaires, l’une où il est condamné à la prison, celle de laquelle il vient d’être acquitté et innocenté, et l’autre où aussi en tant que PDG de la Poste, il est condamné à une amende !

Un amalgame qui n’est pas gratuit de la part de certains médias qui exultent rien que de voir une compétence traînée devant un tribunal nous rappelant que dans l’histoire de la Tunisie, il y eut les amphithéâtres romains où les spectateurs se régalaient devant les gladiateurs qui se battaient à mort !

A combien s’élève le coût de ces lois absurdes et de ces procès insensés ? Quel est le prix que paye un Etat sclérosé par une armada de lois, les unes plus aberrantes que les autres pour qu’elles paralysent totalement l’administration publique ?

Aujourd’hui, une grande partie de nos compétences hésitent avant d’occuper de hauts postes ! Quand on leur demande : qu’est-ce qui bloque ? La réponse est simple : « nous refusons d’aller en prison parce que nous avons osé décider dans l’intérêt du pays et qu’un petit employé délateur a jugé que nous avons abusé de notre pouvoir et un juge -qui n’a pas une grande maîtrise de certains cadres réglementaires- use de lois mal faites pour nous traîner devant la justice avant de se rendre compte qu’il a commis une erreur ! ».

C’est pour cela que nous voyons aujourd’hui autant de médiocres occuper autant de hauts postes.

Amel Belhadj Ali