Tunisie : L’armée veille sur la Révolution

Ben Ali, Général de police, avait gagné ses galons par la délation de complots imaginaires. Parvenu à la dictature suprême, il consacrait des heures à mettre à jour ses innombrables fiches qu’il plastifiait et classait méthodiquement. Le taciturne était un méfiant qui portait en toute circonstance un gilet pare-balles. Tous ceux qui l’approchaient étaient préalablement fouillés au corps. Par-dessus tout, il redoutait les militaires, en particulier les diplômés des académies qui lui paraissaient constituer une menace permanente à la survie de sa médiocrité. C’est pourquoi, plusieurs réseaux de mouchards spécialisés étaient chargés de les surveiller.

Un jour, par émulation, zèle ou jalousie, une équipe de cafards inventa un complot militaire islamiste. Le satrape parano de Carthage s’en délecta. Il ordonna l’arrestation de 25 officiers supérieurs, 88 officiers, 82 sous-officiers et 49 troupiers, en tout, 244 hommes d’élite.

L’un d’entre eux, Sami Kurda a raconté sa descente aux enfers. «Le Complot de Barraket Essahel» publié aux Sud éditions est un coup de poing à l’estomac qui donne envie de donner l’accolade à l’auteur.

En mai 1991 des arrestations se succèdent au sein de l’armée. «Non pas moi!», pense le jeune commandant, «je n’ai strictement rien à me reprocher». Il avait tort.

Livré à la police politique, il sera ignominieusement torturé

Son livre est le récit méthodique de ses souffrances et de celles de ses codétenus. Mais contrairement aux témoignages habituels du genre, l’homme ne fait pas le fier, il relate avec sincérité ses terreurs et ses lâchetés. Craignant la douleur, il confesse qu’il espérait la mort. Alors qu’on lui demandait la liste de ses complices, il suppliait ses bourreaux: «aidez-moi, mettez-moi sur la voie!». Un tortionnaire lui souffle la première lettre d’un patronyme à deviner. Aussitôt la boule de chair cherche désespérément des noms à livrer. Il avoue tout ce qu’on lui demande, il signe sans ouvrir les yeux. Enfin, on le laisse gémir en paix. Une nuit, le Général-Président de la République fait une ronde pour s’assurer du sanglant de ses ordres.

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