Création officielle du FPCA : la Tunisie élue à la présidence, installation du premier bureau africain à El Abdellia

La première Assemblée générale Constitutive du Fonds Panafricain du Cinéma et de l’Audiovisuel (FPCA) réunie à Tunis du 4 au 8 juillet 2013 a procédé à l’approbation définitive des statuts juridiques et à l’élection du bureau directeur du FPCA.

La forme choisie a été celle d’une Association Internationale sans but lucratif (AISBL), apprend l’agence Tap en exclusivité auprès du cinéaste et universitaire tunisien Férid Boughdir, élu à l’unanimité président de cette nouvelle Association.

Cette structure internationale va désormais exister concrètement sur le plan légal et pouvoir planifier ses futures actions en faveur du développement des cinémas du continent africain, grâce aux donations publiques et privées, du Nord comme du Sud, ces dernières reposant notamment sur un voeu de solidarité Sud- Sud entre les pays africains nantis économiquement et ceux qui le sont moins, a-t-il souligné.

// Installation à Tunis du premier Bureau africain du FPCA: composition du bureau et modalités de fonctionnement //

L’Assemblée générale constitutive a porté à la présidence de l’association internationale, le cinéaste Férid Boughdir, (qui dirigeait déjà depuis 2012 le Conseil d’orientation transitoire /COT /, chargé de la mise en place du Fonds), et cela par 7 voix contre 4 en faveur de Mme Alimata Salemberé, ancienne Ministre de la Culture du Burkina Faso, laquelle a été ensuite élue à l’unanimité au poste de trésorière de l’Association.

Le poste de secrétaire général du FPCA est revenu au nom de la diaspora africaine, à la caribéenne June Givanni, qui fut longtemps représentante des cinémas africains à Londres. Les deux postes de vice-présidents revenant respectivement à l’ethiopien Abraham Hailé Biru, Chef opérateur et Directeur de l’école de cinéma d’Addis-Abeba , et au zimbabwéen Keith Shiri, historien des cinémas africains, tous ces candidats étant élus à l’unanimité. Youma Fall, directrice de la diversité et du développement culturel à l’OIF a annoncé que l’Organisation prendrait en charge pour l’année 2014 les honoraires d’un expert international pour soutenir le démarrage effectif du FPCA.

Le premier Bureau Africain du FPCA installé à Tunis et dont le siège est au palais El Abdellia à La Marsa sera le Bureau de Tunis, pour lequel le ministre tunisien de la Culture, Mehdi Mabrouk, s’est engagé devant l’Assemblée Constitutive interafricaine à prendre en charge l’ensemble des frais de fonctionnement, en lui fournissant tous les moyens matériels et humains nécessaires.

Pour des raisons de cohérence avec les nécessités du démarrage effectif du FPCA, la Présidence du Bureau de Tunis sera dans un premier temps assurée également par Ferid Boughdir, fraîchement élu président de la structure internationale. Les postes de Secrétaire Général et de Trésorier du bureau de Tunis reviennent respectivement au producteur et éditeur cinématographique Abdellatif Layouni, et au directeur du festival “Afrique-Méditerranée” de Hergla, Mohamed Challouf.

Comme prévu par le comité d’experts juristes africains lors de la rencontre interafricaine mise sur place par la Tunisie et l’OIF lors des Journées cinématographiques de Carthage (JCC) en 2012, le FPCA aura son siège juridique situé pour des raisons de neutralité dans une capitale internationale (le choix de l’assemblée constitutive s’est porté en l’occurrence sur Genève) et plusieurs bureaux opérationnels en Afrique. Dans ces bureaux se réuniront notamment les “commissions d’experts” décidant l’octroi d’aides en finances et en expertises, aux pays africains voulant installer des structures et des mécanismes appropriés pour rendre leur production cinématographique viable à l’échelle nationale et régionale.

Un autre Bureau africain est d’ores et déjà prévu dans les statuts adoptés par les membres fondateurs du FPCA, qui souhaiteraient le voir s’établir à Dakar, et cela surtout pour des raisons de légitimité historique.

// La Tunisie concrétise le rêve des cinéastes africains //

En effet, le rêve de “solidarité panafricaine” au service du développement des cinémas africains est né de la rencontre à Tunis en 1966 de deux hommes, le critique tunisien Tahar Cheriaa, fondateur cette année-là du premier festival panafricain de cinéma de l’histoire, les JCC, avec le grand écrivain et cinéaste sénégalais Sembéne Ousmane, dont le premier long-métrage ” La Noire de…” remporta le premier Tanit d’or, le Grand prix du festival. Devenus amis pour la vie, les deux hommes créèrent à Tunis en 1970, à partir des deux seules associations de cinéastes africains existantes, celle de Dakar et celle de Tunis, la Fédération Panafricaine des Cinéastes (FEPACI), concrétisant ainsi une idée lancée la même année lors du festival mondial des arts nègres de Dakar, et reprise au festival culturel panafricain d’Alger en 1969.

Sembene et Chériaa unirent ensuite leurs efforts pour que la Semaine africaine du cinéma de Ouagadougou, créée en 1969 au Burkina Faso sur le mode non compétitif, puisse obtenir tous les soutiens financiers et logistiques pour devenir dès 1972, un festival panafricain de grande envergure, réunissant, un an sur deux, en alternance avec les JCC, tous les cinéastes du continent africain.

La production des films d’Afrique subsaharienne dépendant majoritairement jusque-là de la coopération Nord-Sud, la FEPACI tenta de concrétiser le credo de Chériaa et de Sembene, soit la nécessité de la mise en place d’un complément de financement, basé sur une solidarité “Sud-Sud”, et cela notamment par la réunion de marchés communs régionaux de diffusion des films en Afrique, afin de dégager de nouvelles ressources, et la création d’un Fonds panafricain pour soutenir le financement des films, et les structures de leur viabilisation.

S’adressant sans succès à l’union Africaine à Maputo en 2003 et à Johannesburg en 2006, la FEPACI se tourna en 2007 vers l’OIF qui gérait déjà un fonds de soutien limité aux cinémas francophones. Abdou Diouf, ancien président du Sénégal, et Secrétaire général de l’OIF accepta alors en 2010, de dépasser les limites linguistiques et géographiques de son organisation, pour soutenir financièrement et logistiquement la mise en place du FPCA, et d’en devenir le parrain, et cela notamment en écrivant personnellement à tous les Chefs d’Etats africains pour leur demander de soutenir le projet.

Depuis la présentation de la première étude de faisabilité du FPCA lors des JCC 2010, la Tunisie a offert au projet une avancée décisive et cela grâce à l’annonce par le ministre tunisien de la culture, Mehdi Mabrouk, (à la Rencontre interafricaine sur le FPCA organisée par l’OIF dans le cadre du festival international de Cannes 2012), que la Tunisie allait soutenir le démarrage du projet à travers trois mesures: la mise en place du COT, la mise à sa disposition d’un siège, l’organisation avec l’OIF en novembre 2012 aux JCC, d’une Assemblée générale interafricaine parrainée par l’Unesco et l’union africaine, ainsi que la réunion d’un comité d’experts juristes afin de décider du socle juridique futur du FPCA.

Le Conseil d’orientation transitoire (COT) et son programme ont ensuite été légitimés et soutenus par l’ensemble des représentants des cinéastes africains venus de 39 pays, au neuvième congrès de la FEPACI tenu à Johannesburg en mai 2013.

Dorénavant assurée de la légitimation et de la validation panafricaine de son soutien au FPCA, la Tunisie a donc parachevé son action par l’organisation début Juillet 2013, de l’Assemblée constitutive du FPCA à Tunis.

Durant les travaux de l’Assemblée constitutive, les membres fondateurs sénégalais du FPCA, Baba Diop, président de l’union africaine de la critique de cinéma, et Ousmane William M’baye, co- fondateur des rencontres cinématographiques de Dakar (Récidak) ont été sollicités par tous les participants, leur demandant de prendre contact avec les autorités sénégalaises, au niveau Présidentiel, au niveau du Ministère de la Culture, et au niveau de la Direction de la Cinématographie nationale, pour leur proposer que l’autre bureau africain fondateur du FPCA prévu par les statuts, puisse éventuellement être installé à Dakar et cela en hommage légitime aux deux grands visionnaires que furent Sembene Ousmane et Tahar Cheriaa.

L’assemblée constitutive du FPCA était composée de membres fondateurs, tous militants bénévoles de longue date du panafricanisme cinématographique, et venant de pays représentant les différentes zones linguistiques du continent : Algérie, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Ethiopie, Maroc, Mozambique, République Démocratique du Congo, Tunisie, Sénégal, Zimbabwe, ainsi qu’une représentante de la diaspora africaine, originaire des Caraïbes, ainsi que de deux experts juristes, le suisse Benoît Muller et le tunisien Youssef Ben Brahim. L’assemblée a également accueilli, à titre d’observateur, une délégation de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), premier sponsor du projet, comprenant la djiboutienne Souad Houssein, et le Français Pierre Barrot, respectivement responsables du cinéma et de l’audiovisuel, à l’OIF, délégation menée par la Sénégalaise Youma Fall, nouvelle Directrice du département de la diversité et du développement culturel.