Un goût douloureux de déjà vécu, récit de Dr. Bouguira

Quand j’étais à l’Instance vérité et dignité de Ben Sedrine, j’ai vécu le droit de réserve comme une véritable torture… C’est un droit de ne pas parler en public des affaires internes inhérentes de l’IVD.

Tout leur est permis sauf à toi le membre à part entière d’ouvrir la bouche et d’éclairer l’opinion publique.

Pendant deux années entières, ils m’ont torturée avec ce droit et je me suis resignée à l’appliquer, croyant fermement à leurs dires. Je pensais vraiment qu’ils œuvraient pour le bien de mon pays.

Avec le temps et devant leurs erreurs répétées mais jamais avouées, je me suis décidée de le rompre en me dirigeant vers l’ARP un certain 31 août 2016 avec mon collègue Mustapha Baazaoui.

Pour avoir osé, une série de sanctions s’est abattue sur nous deux.

Moins de deux mois après cette date fatidique, ils nous ont démis de notre fonction pour avoir alerté les autorités qui nous avaient désigné pour ce rôle national. Ils nous ont sans aucun scrupule sacrifié.

Hier en écoutant le discours de Mechichi, j’ai eu un haut le coeur et une envie terrible de vomir. De vomir ce chef de gouvernement et ses membres pour avoir essuyé ses échecs répétés sur un ministre de la Santé (Faouzi Mehdi) qui, jusque là, s’est montré peu affable, peu agressif, peu communicateur, peu peu peu peu… sauf dans l’humain.

Je ne suis pas là pour le blanchir. Il n’en a pas aucunement besoin, ce monsieur que je n’ai rencontré qu’une fois dans ma vie.

Le jour de la photo avec mon vaillant Zakaria Bouguira qui, depuis une année, tient les mêmes convictions pour sauver sa nation. Ce monsieur s’est montré à maintes reprises à l’écoute de ceux qui le critiquent ou critiquent surtout la gestion de son gouvernement.

Il s’est ouvert aux propositions et aux initiatives. Il a été là pour les malades de tout le pouvoir qu’il avait. Jamais il n’a fermé son coeur à ceux qui avaient besoin d’aide.

J’avoue qu’il m’a aidée dans la prise en charge de plusieurs patients indigents et très malades. Il n’en a jamais fait un plat ni un ordre pour grimper en pouvoir. Il est resté humble et un bon médecin.

Son seul tort – et je le lui ai maintes fois rappelé – c’est de cautionner par sa non démission de ce gouvernement de la honte qui a fossoyé sans hésitation 18 000 Tunisiens en moins d’une année.

Hier le président du gouvernement ne l’a pas raté. Il l’a même achevé sur l’autel de la vaccination. Il a même traité tel acte de haute criminalité et c’est tellement vrai.

Envoyer nos deux millions de jeunes de 18 ans se faire vacciner le même jour et à la même heure dans des centres non préparés à la gestion d’autant de monde et avec un nombre limité de vaccins relève du suicide et de la haute criminalité.

Seulement monsieur Mechichi oublie qu’il en est le premier responsable puisqu’il est à la tête de ce gouvernement et que les 18 000 morts et plus de 600 000 infectés reviennent directement à sa gestion nulle et chaotique de la crise pendant près d’une année. Un pays entier tenu en otage par ses décisions non réfléchies et tout un peuple jeté dans l’arène comme des pauvres gladiateurs. Un véritable cirque à ciel ouvert dont seul et en premier Mechichi détient les clés et la responsabilité.

De la ruée vers la contagion pendant l’Aïd dernier, il est coupable.

De l’ouverture du stade de Radès au grand public pour un match, il est coupable.

De la ruée vers le vaccin ce mardi meurtrier, il est coupable.

De tout cela et plus encore, il est coupable à l’unanimité et tout le peuple le sait.

Aujourd’hui encore, je m’assume entièrement en tant que médecin sur une terre qui pâtit gravement de sa gestion Covid-19 et je signe de mon nom.

Docteur Lilia Bouguira

Médecin tunisienne.