En présence d’un grand nombre de militants des droits de l’Homme, de victimes des exactions de l’ancien régime et de représentants de la presse nationale et internationale, la Chambre criminelle spécialisée dans la justice transitionnelle au Tribunal de première instance, à Gabès, a tenu, mardi, une première audience, sur l’affaire de Kamel Matmati, dont le dossier avait été transféré au Tribunal par l’Instance Vérité et dignité (IVD).
Le président de la séance a procédé à la lecture de l’acte d’accusation rédigé par l’unité d’investigation à l’IVD qui cite des cadres de la sûreté et des responsables de l’Etat, dont l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali, en tant qu’auteurs ou parties prenantes dans plusieurs crimes dont l’homicide volontaire précédé de torture et dissimulation du corps de la victime.
La mère et l’épouse de la victime ont été entendues lors de cette audience.
Celle-ci a parlé des pressions dont elle a été victime et de la torture dont son mari a fait l’objet, au commissariat de Gabès, jusqu’à sa mort.
Elle a indiqué que les autorités avaient nié l’arrestation, la torture et la mort de son mari, allant jusqu’à organiser son procès après son décès (pour dissimuler le crime).
L’épouse réclame la réhabilitation de sa famille, le jugement de tous ceux qui ont participé à sa torture et à sa mort et la révélation du lieu de son inhumation.
Plusieurs avocats de la partie civile ont qualifié l’audience d’historique, exprimant leur confiance en la justice tunisienne. Ils rappellent que la chambre criminelle spécialisée dans la justice transitionnelle permet aux victimes de faire valoir leur droit et de juger les criminels, car les violations des droits de l’Homme n’y sont pas considérées comme prescriptibles.
Le collectif de défense du martyr Kamel Matmati a organisé un sit-in, devant le Tribunal, appelant au jugement de tous ceux qui sont impliqués dans l’assassinat de la victime, à la réhabilitation de sa famille et au dévoilement du lieu de son enterrement.
L’affaire remonte au 7 octobre 1991, lorsque Kamel Matmati fut arrêté sur son lieu de travail, au district de la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (STEG), à Gabès, et conduit au commissariat où il aurait été torturé jusqu’à la mort, selon le témoignage des membres de sa famille.