Emprunter des pistes raboteuses pour arriver à une école est une rude épreuve pour les élèves et le corps enseignant. Le cas se présente pour un grand nombre d’établissements éducatifs dans les régions intérieures et isolées du pays, vu l’état délabré et alarmant de ces voies menant vers le chemin du savoir. Et malgré l’absence de moyens, la volonté y est.
Depuis son affectation en 2015, le délégué de Hajeb Layoun (sud-ouest de Kairouan), Hichem Jrad s’est fixé comme priorité majeure, la réhabilitation des écoles primaires et des voies qui les desservent.
Au départ, les habitants n’y croyaient pas beaucoup car les ambitions dépassaient, de loin, les ressources qui étaient quasi absentes.
” Mais quand les premiers résultats sont devenus perceptibles, ils ont réalisé que c’était possible alors ils se sont joints à notre action-citoyenne ” s’est-t-il réjoui.
Le délégué a réussi, petit à petit à convaincre de l’importance de son projet qui pourrait remédier à l’abandon scolaire dont le nombre pour le cycle primaire est relativement réduit par rapport à l’enseignement secondaire. En effet la délégation a enregistré cette année seulement 36 cas d’abandon scolaire que le délégué explique plutôt, par des facteurs sociaux et économiques, à savoir la situation matérielle des familles dans certaines Imadas et leur faible niveau d’instruction.
Des établissements dont la majorité est située sur des hauteurs rocheuses, difficiles d’accès, non sécurisées en l’absence de clôtures dignes de ce nom, sont autant de facteurs qui découragent les parents à envoyer leurs enfants à l’école. ” Nous avons persuadé 15 autres à regagner les bancs de l’école “.
L’école de Frahtia est à une vingtaine de kilomètres du chef lieu de la délégation. Elle est nichée au sommet de la montagne, loin des habitations. L’établissement héberge provisoirement certains instituteurs. Depuis que sa clôture a été renforcée ces derniers se sentent plus en sécurité.
De plus, les élèves ont désormais un terrain praticable. Les volontaires l’ont déblayé et revêtu de concassage.
Au total, la délégation compte 23 écoles primaires dont près de la moitié nécessite des interventions urgentes.
Ces établissements accueillent une population de près de 5500 élèves. Des enfants qui en cas de problèmes de santé sont obligés de se déplacer à Kairouan, près de 70 kilomètres de Hajeb Layoun qui ne compte pas de pédiatre. La médecine de spécialité étant quasi absente dans la délégation.
L’école Laanazia semble moins enclavée notamment après les travaux de réfection partielle réalisés sur la piste conduisant à cet établissement.
Les plantes épineuses qui débordaient sur la chaussée ont été dégagées et les fossés remblayées. Mais une partie de la clôture située à peu près un mètre des salles des cours inquiète toujours les parents. Au moindre sifflement du vent, ces cactus deviennent un véritable danger pour les enfants, proies faciles aux désagréables surprises des épines pointues. En outre, ce type de clôture est loin de dissuader les reptiles qui y trouvent refuge en période de chaleur, confie un ouvrier.
Les habitants de Laanazia rêvent encore d’une salle de lecture pour éviter aux élèves de s’aventurer durant les heures creuses dans un environnement indomptable et pas toujours clément.
Ayant démarré presqu’un mois avant la rentrée 2016/2017, les travaux de réfection et de réaménagement réalisés par les bénévoles ont jusque là ciblé 7 établissements. En plus de Frahtia, Ouled ameur, Dar Lakhrif, El Manassa, Ouled Abbes, Aithet ennsa, Laanizet, refont peau neuve.
Des écoles clôturées, peintes en bleu et blanc et boisées d’oliviers, la région étant connue par ses étendues d’oliveraies et d’abricotiers.
D’autres chantiers sont ont cours
Le mot d’ordre : défendre l’intégrité des établissements. Il s’agit de protéger élèves et éducateurs. Notre priorité c’est la clôture de ces établissements, nous élevons le niveau de certaines écoles et nous remplaçons les haies épineuses utilisées comme clôtures par des fondations en béton armé pour contrer l’intrusion des chiens errants, les sangliers et les reptiles. Il s’agit aussi de se protéger contre le vent, nous explique-t-il.
Ce projet a été rendu possible et réalisable grâce au soutien des habitants de Hajeb Layoun, affime fièrement le délégué.
Les habitants, chacun selon ses moyens, fournissent les matériaux de construction (sable, concassage, fer, ciment, peinture…..), et participent activement aux travaux.
Lorsque ces derniers déchargent les camions qui acheminent les matériaux de construction vers les chantiers, sous forme de dons de certains particuliers de Hajeb Layoun et d’autres régions, leur détermination est d’autant plus ferme qu’ils travaillent même durant les week-ends.
Des campagnes sont également organisées pour la collecte de vêtements, chaussures, couvertures, fournitures scolaires pour les distribuer dans les établissements scolaires et aux familles démunies. Une action à laquelle ont été associées plusieurs parties y compris la société civile.
A ce sujet, le délégué nous confirme que tous les travaux ont été réalisés par les mains des habitants qui, s’initient, pour la première fois à la maçonnerie, sous la supervision d’un professionnel. ” ils sont guidés par leur volonté et leur instinct de paternité”.
En effet, durant les week-ends, Les volontaires se joignent aux travailleurs permanents. Ils viennent en grand nombre participer aux travaux.
” Celui qui participe une fois, revient nous offrir son aide car il se considère désormais partie prenante de cette action citoyenne “, explique avec entrain Hichem Jrad.
Les fins de semaines sont devenues un rendez-vous attendu par tous. Une sorte de manifestation culturelle qui se termine par un grand festin.