Tunisie – Nominations dans les radios publiques : RSF écrit à Ali Laarayedh

Dans une lettre adressée le 22 août 2013 au chef du gouvernement tunisien, Ali Larayedh, Reporters sans frontières exprime sa déception et son inquiétude après l’annonce de la nomination par les autorités de nouveaux dirigeants à la tête de cinq radios publiques.

L’organisation regrette que cette décision ait été prise par le gouvernement, alors que ces nominations relèvent désormais, en vertu de l’application du Décret-loi 116-2011, de la compétence de la Haute instance indépendante pour la communication audiovisuelle (HAICA), nommée le 3 mai dernier.

L’organisation appelle les autorités à revenir sur ces dernières nominations effectuées en infraction de la loi tunisienne, et en violation du principe démocratique de l’indépendance des médias publics. Elle encourage également l’HAICA à revenir sur celles prises antérieurement à sa création, dans le respect du droit.

Monsieur le Premier ministre
Ali Larayedh
Siège du Premier Ministère
La Kasbah
Tunis

Tunis, le 22 août 2013

Objet : Nominations des dirigeants des médias publics

Monsieur le Premier ministre,

Reporters sans frontières, organisation internationale de défense de la liberté de l’information, exprime sa déception et son inquiétude après l’annonce, le 17 août 2013, de la nomination par les autorités de nouveaux dirigeants à la tête de cinq radios publiques (Radio Nationale, Radio Culturelle, Radio Jeunes, Radio Gafsa, Radio Tataouine).

Ces nominations contreviennent au principe d’indépendance des médias publics. En vertu du décret-loi 116-2011, elles relèvent de la compétence de l’HAICA, dont les membres ont été officiellement nommés en mai dernier. Il est crucial que le gouvernement respecte la plénitude des attributions de cette instance, afin qu’elle puisse nommer, en toute indépendance et transparence, les futurs dirigeants des médias publics.

Le 8 janvier 2012, les premières nominations annoncées par le Premier ministère, arguant de l’absence de cadre législatif régissant cette question, avaient soulevé une vague d’indignation parmi les professionnels de l’information et les organisations de défense de la liberté de la presse. Au cours des mois suivants, Reporters sans frontières a régulièrement fait part aux conseillers en charge du dossier auprès de votre prédécesseur, M. Hamadi Jebali, de ses inquiétudes face à la poursuite des nominations arbitraires à la tête des médias publics, ce qui s’apparentait à un refus de mettre en oeuvre les dispositions du décret-loi 116-2011.

Aujourd’hui, l’argument selon lequel il n’existe pas de cadre législatif est caduc. En vertu de l’article 19 de ce décret-loi, il incombe en effet à la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA) de “donner des avis conformes concernant la nomination des présidents-directeurs généraux des entreprises publiques de communication audiovisuelle”.

Par conséquent, Reporters sans frontières vous demande de revenir sur cette décision et d’apporter votre soutien plein et entier aux travaux de l’HAICA. Garantir l’indépendance de cette institution est un impératif nécessaire au respect de la liberté d’information en Tunisie. L’organisation encourage également l’HAICA à revenir sur celles prises antérieurement à sa création, dans le respect du droit.

Je vous remercie par avance pour l’attention que vous porterez à nos demandes et vous prie d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de ma très haute considération.

Christophe Deloire
Secrétaire général de Reporters sans frontières