A quelques jours des élections législatives prévues le 6 octobre prochain, les listes candidates mettent les bouchées doubles pour convaincre les électeurs du bien fondé de leur programme.
Voire de les inciter à aller voter tout simplement.
Des passants dans la rue, toutes tranches d’âge confondues, s’arrêtent quelques instants devant les affiches électorales placardées sur les murs de la ville de Tunis.
Devant le foisonnement des affiches, rares sont ceux qui sont éclairés sur ce qui les intéresse surtout que le nombre des listes candidates aux législatives s’élève à plus de 1500 listes (partisanes, de coalition ou indépendantes).
Des jeunes étudiants et des diplômés ont du mal à apprécier le rôle du parlement voire l’intérêt des élections législatives. Certes, il s’agit des deuxièmes élections législatives après la révolution de 2011, mais au bout de 8 ans, il règne encore un certain flou quant à la mission exacte des parlementaires.
Ghofrane, prothésiste (21 ans), souhaite que les futurs députés, indépendamment du pouvoir dont ils disposeraient, remettent le pays ” sur les rails et les choses en leur place”.
” Les députés doivent œuvrer au renforcement de la sécurité de manière à réduire les menaces terroristes et à améliorer le niveau de vie des Tunisiens “, dit-elle.
Le premier tour de l’élection présidentielle anticipée s’est déroulé le 15 septembre dernier avec un taux de participation de jeunes estimé faible surtout en début de journée.
Un taux qui a augmenté durant les deux dernières heures avant la fermeture des bureaux de vote, selon le président de l’Instance Supérieure Indépendante pour les Elections.
Pour Faouzia, enseignante, les listes candidates aux législatives ne méritent pas la confiance des électeurs.
” Il n’y a aucune liste qui me représente réellement ou répond à mes attentes, elles sont toutes suspectes et incapables de lutter fermement contre la corruption “, assène-t-elle.
Hanen qui poursuit des études en anglais des affaires semble avoir d’autres soucis liés à son statut d’étudiante et à ce qui l’attend sur le marché de l’emploi.
” Nous voulons que les futurs députés s’attaquent plutôt à l’économie, à l’emploi et à la culture “. La lutte contre le terrorisme est importante, certes, mais les tiraillements politiques empêchent les députés et les acteurs politiques à déterminer clairement les besoins de leurs électeurs, a-t-elle estimé.
Des milliers de diplômés chômeurs dont le nombre augmente jour après jour s’attendent à ce que leurs futurs représentants au parlement prêtent plus d’attention à leurs besoins, insiste-t-elle. Hanen propose également un intérêt plus accru à la culture dans les programmes d’enseignement.
Asma, étudiante souhaite, elle, qu’il y ait des jeunes parmi les listes candidates pour représenter véritablement cette tranche d’âge, ” je veux voir des jeunes députés au parlement, eux seuls sont capables de nous comprendre et de mesurer l’importance d’initier des projets de loi favorisant la création d’emplois “, a-t-elle martelé.
L’ISIE avait mené des campagnes de sensibilisation auprès des étudiants au cours de l’année universitaire précédente.
Son objectif, étant de les inciter à s’inscrire sur le registre électoral et d’amener les jeunes à participer massivement aux élections législatives et présidentielles.
Sofien, un agriculteur de 38 ans de Kebili pense que le capital humain représente la richesse du pays.
” J’espère que les députés vont investir dans les ressources humaines, qu’ils nous garantissent des moyens de transport en commun décents, qu’il nous fournissent les commodités nécessaires et les attributs d’une vie décente pour qu’on puisse produire et développer notre pays “, a-t-il dit.
” Je souhaite aussi que les futurs députés encouragent le secteur agricole, qu’ils valorisent les productions locales dans chaque région ainsi que les exportations, notamment des dattes “.
Fathia, étudiante (26 ans), dit connaître les prérogatives des députés une fois élus. Une vision qui émane de son implication dans la société civile. Pour elle, le parlement aura deux volets importants voire prioritaires durant le prochain mandat.
Les politiques publiques et économiques, et les projets litigieux liés aux libertés et à l’identité.
Elle cite à ce titre le projet de loi sur l’égalité dans l’héritage et le respect des libertés sexuelles…
” Ce que j’attends de nos députés, plaide-t-elle, est qu’ils tranchent sur les questions identitaires.
Je souhaite qu’ils s’attaquent ensuite à l’économie et qu’ils développent de nouveaux modèles économiques, comme le modèle social et solidaire, un modèle aidant les habitants des régions les moins développées, rurales et marginalisées “.
Fares, un jeune lycéen de 18 ans qui va voter pour la première fois aspire à ce que les futurs députés élaborent des lois capables d’améliorer le quotidien des Tunisiens: transport en commun, sécurité et éducation pour tous dans les différentes régions du pays.
Houcine, un chauffeur retraité de 70 ans, s’inquiète, pour sa part, pour l’avenir de ses enfants et de la jeunesse tunisienne.
” Le prochain parlement doit être plus soudé et doit savoir communiquer avec le citoyen affecté par la dégradation de la situation économique depuis la Révolution “, se lamente-t-il.
D’après lui, la priorité pour les futurs députés consiste à soutenir le Tunisien “fragilisé”.
” Les futurs députés doivent mettre le paquet sur la jeunesse.
Ceux qui fuient de plus en plus le pays, par des voies légales mais aussi en cherchant au péril de leur vie à émigrer de façon irrégulière”.
Mehrez, 50 ans, désire quant à lui, que les députés descendent dans la rue pour être à l’écoute des citoyens, connaître leurs problèmes et agir sur cette base.
Il ne cache pas, cependant, son pessimisme quant à leurs aptitudes à répondre aux vrais besoins du citoyen.