La séance de lundi après-midi de la plénière de l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP), consacrée à la prolongation du mandat de l’Instance Vérité et Dignité (IVD), a été levée à 20h00 avant de reprendre de nouveau une demi-heure plus tard.
Les débats ont été marqués l’après-midi par les divergences des points de vue sur la prolongation ou non du mandat de l’IVD. Le président de l’ARP Mohamed Ennaceur et le bureau du parlement ont été accusés de remettre en question le processus de la justice transitionnelle alors que certains autres députés se sont insurgés contre “l’atteinte des figures de l’Etat”.
Les débats ont tourné également sur la légalité de la tenue d’une plénière consacrée au vote pour la prolongation du mandat de l’IVD.
Pour Imed Daimi, (bloc démocratique), la plénière n’est pas légale et le vote au terme des débats sur la prolongation du mandat “ne peut être accepté”, rendant responsable le président de l’ARP de la “tension persistante depuis samedi”.
“La président de l’ARP n’a pas été neutre et a dirigé la plénière de manière politique alors qu’il devait céder la présidence à un de ses adjoints étant donné qu’il fait partie de la justice transitionnelle et a servi sous le régime de Ben Ali”, a-t-il estimé.
Le député du même bloc parlementaire, Ghazi Chaouachi a souligné que “le règlement est clair et net et accorde le droit à l’IVD de prolonger son mandat d’un an”.
Pour Farida Laabidi (bloc d’Ennahdha) “en lisant le règlement intérieur du parlement et la constitution, l’ARP ne dispose d’aucune attribution pour décider de la prolongation du mandat”. “C’est une décision souveraine de l’IVD”, a-t-elle fait valoir.
“Je m’interroge sur le sort réservé aux 60 mille dossiers soumis par l’Instance aux juridictions spécialisées en justice transitionnelle et je rends l’ARP responsable de ne pas avoir comblé les vacances au sein de l’IVD, d’avoir manqué à ses devoirs et engagements, abstraction faite de la prestation et des erreurs de l’Instance”, a-t-elle indiqué.
De son côté, Zied lakhadar (bloc du Front Populaire) a rappelé que son groupe parlementaire n’était pas favorable à l’élection de Sihem Ben Sedrine à la tête de l’IVD, tout en soulignant que “la justice transitionnelle est une échéance qui commence par la révélation de la nature des violations avant la reddition des comptes”. Il a accusé les présidents d’Ennahdha et Nidaa Tounes de ” saper le processus de la justice transitionnelle avant de le récupérer pour des intérêts partisans”.
Pour sa part, Hassan Laamari (Nida Tounes), a qualifié l’IVD de “mascarade”, estimant que la présidente de l’Instance “a divisé les Tunisiens et n’a pas respecté les institutions de l’Etat, y comprit l’ARP, après avoir quitté hémicycle sans autorisation”.
Se déclarant solidaire du président du parlement Mohamed Ennaceur “pour les attaques et accusations dont il a fait l’objet”, la députée Rabha Ben Hassine (bloc Machrou Tounes), a estimé que “l’IVD a perdu sa légitimité légale et morale pour avoir été récupérée politiquement par sa présidente”.
Walid Jalled (bloc démocratique) a invité quant à lui la présidente de l’IVD qualifiée de “symbole de la division et de la sédition” à se démettre “pour l’intérêt du processus de la justice transitionnelle, en contre parti l’ARP s’engage à combler les vacances au sein de l’Instance et à poursuivre le processus”.
La députée Yamina Zoghlami (Bloc Ennahdha) a appelé de son côté le président de l’ARP à tenir une réunion avec les présidents des blocs parlementaires pour “arriver à un consensus garantissant la poursuite du processus de la justice transitionnelle, le traitement des dossiers des victimes, leur conservation et le dédommagement” avant le vote sur la prolongation du mandat de l’IVD. Elle a mis en garde le président de l’ARP contre les conséquences de l’arrêt du processus de la justice transitionnelle.
Siheme Ben Sedrine avait quitté la séance malgré la poursuite des débats, se contentant de déclarer à la presse qu’elle tiendra mardi une conférence de presse.
Les travaux de la séance plénière avaient repris lundi matin, en sa présence, après avoir été levés samedi dernier par le président de l’ARP en raison de la forte tension et l’impossibilité de la poursuite des débats, notamment après le retrait de Sihem Ben Sedrine.