Les techniques innovantes de création de tapis ont fait l’objet d’un cycle de formation de trois jours organisé à Mahdia par l’Organisation internationale du travail (OIT) et la chambre nationale des femmes chefs d’entreprise (CNFCE). Le cycle de formation a ciblé des femmes artisanes des gouvernorats de Kairouan et Mahdia.
Cet atelier entre dans le cadre du programme “Un travail décent pour les femmes” financé par le ministère finlandais des affaires étrangères qui lui a consacré 5 millions d’Euros et réalisé par l’Organisation internationale du travail.
Selon Mme Fedwa Trigui Dagdoug, universitaire et designer en art textile, la formation est destinée à motiver les artisanes pour les orienter vers la création de produits qui mettent en valeur l’héritage culturel tout en le modernisant à travers un nouveau regard sur le patrimoine textile national. Il s’agit d’injecter un nouveau souffle au produit de l’artisanat, a-t-elle ajouté, précisant que des modèles revisités de tapis (Margoum et Kelim ) ont été présentées aux apprenantes qui s’en sont inspirées avec beaucoup de maîtrise.
Mme Trigui a souligné, par ailleurs, que la tapis tunisien ne peut être commercialisé et concurrencer le produit turc ou iranien qu’à travers l’exploitation de l’héritage culturel en lui conférant une valeur ajoutée du point de vue technologique et esthétique. Elle a regretté, à cet égard, qu’il n’ y a pas de brevet ou de label qui protège le produit artisanal tunisien.
Les ateliers qui se sont déroulés au cours de ce cycle de formation ont aussi permis de mettre en relief les difficultés du secteur au premier titre desquelles la matière première qui fait défaut selon un des formateurs, Younès Sarsout, qui fait remarquer que les artisans ne peuvent importer ou acquérir que de petites quantités de coton, de soie ou de laine ce qui n’intéresse pas les vendeurs en gros.
Evoquant la commercialisation des produits, il a indiqué que le secteur est infiltré par des non professionnels ce qui le rend vulnérable, ajoutant qu’au titre des entraves au développement et à la promotion du secteur du tapis, il y a les mauvaises conditions de travail des artisanes salariées dont la pénibilité de l’effort ne trouve pas de contreparties motivantes avec souvent des salaires dérisoires.
Malgré la fragilité du secteur, a-t-il souligné, on oeuvre à faire améliorer les choses tant sur le plan social que celui de l’innovation. “Nous sommes aidés en cela par les structures agissantes comme la CNFCE et l’OIT mais également par l’ambition dévorante des femmes artisanes, leur motivation et leur volonté d’adhérer aux projets de formation”.
Il a indiqué que certains centres de formation offrent gratuitement les techniques de création tels que les logiciels des couleurs dans le but d’améliorer qualitativement la production.
A juste titre, le cycle de formation est encadré par des professionnels et des universitaires à l’instar de M. Naceur Ayed, professeur en chimie fine qui a recommandé aux apprenantes de privilégier l’utilisation des produits naturels en matière de teinture comme les écorces de grenades, la noix de galles, le centaurée acaule ou encore la cochenille.
Les formateurs estiment, en effet, que le tout étant de trouver des alternatives sérieuses aux défaillances de la qualité du produit artisanal en revisitant le patrimoine nationale avec des techniques naturelles et de nouveaux designs qui améliorent la qualité du tapis tunisien. Il s’agit en fait de mettre la culture et le patrimoine textile innové au service du commercial.
Entamé en février 2013, le programme “Un travail décent des femmes”, initié par l’OIT, se poursuivra jusqu’en 2015. Il a pour objectif de soutenir la chambre nationale des femmes chefs d’entreprises à améliorer les performances de ses structures régionales, de renforcer l’autonomisation des femmes et sa présence sur le plan économique, social et politique et de rechercher des circuits de commercialisation de leurs produits.
Point de vue partagé par Mme Raoudha Ben Sabeur, présidente de la chambre nationale des femmes chefs d’entreprises, qui s’est félicitée des résultats du programme de l’OIT mais également du bond qualitatif réalisé dans le domaine de la maîtrise de la gestion des affaires par les femmes tunisiennes notamment les adhérentes à la CNFCE.