Un livre cher mais pauvre

Selon les spécialistes, le livre d’art en Tunisie connaît de nombreuses difficultés aussi bien au niveau de l’édition que celui de la distribution et automatiquement de la vente. Confondu avec ce qu’on appelle “le livre de luxe”, le livre d’art, dont le coût s’avère trop cher, est classé cependant dans la catégorie des livres “pauvres”.

Quel est le rôle d’un livre d’art et quels sont les moyens susceptibles de le commercialiser et de le rendre accessible auprès du lecteur?. Autour de ces questions, écrivains, auteurs et éditeurs se sont rassemblés hier autour de la première table ronde organisée dans le cadre du programme culturel de la 30ème édition de la foire internationale du livre de Tunis qui s’est ouverte hier pour se poursuivre jusqu’au 3 novembre. Le débat a été axé essentiellement sur les difficultés de la commercialisation du livre d’art.

Des difficultés qui empêchent en même temps de le faire connaître aussi bien auprès du lecteur tunisien qu’arabe. Dans son intervention, le poète et spécialiste en critique d’art, Nizar Chakroun, a indiqué que l’édition du livre d’art en Tunisie demeure un secteur faible, ce qui nécessite la conjugaison des efforts de toutes les parties intervenantes en l’occurrence écrivains, éditeurs et distributeurs, pour le promouvoir davantage.

En effet, l’industrie de ce genre de livres est étroitement liée aux problèmes de l’impression et de l’édition, vu que dans cette catégorie d’ouvrages, les illustrations à caractère artistique tiennent une place prépondérante par rapport au texte.

Dans ce sens, il a mentionné qu’en cette année 2013, année nationale des arts plastiques, l’on parle énormément des expériences plastiques mais très peu des livres d’art qui mettent à l’honneur aussi bien par la photo que les mots les multiples mouvements, expériences et créations artistiques de l’époque. Car, a-t-il avancé, il ne faudrait pas oublier que ce genre de livres peut servir désormais de base de données et donc un outil de reproduction artistique.

Pour le plasticien, chercheur et critique d’art, Khalil Guouia, le domaine d’intérêt du livre d’art demeure encore une question complexe. Car, a-t-il-expliqué, l’importance du livre d’art et donc le besoin à ce genre de livres, ne trouve pas encore la place qu’elle mérite. De par son processus créatif particulier, ce livre qui constitue en soi “un véritable joyau” de par sa valeur artistique, demeure un genre pauvre, au niveau de sa commercialisation. Dans un clin d’oeil historique, il a rappelé que le premier livre d’art en Tunisie a été publié en 1951.

Etant donné que ce type d’ouvrage nécessite une présentation bien soignée, plusieurs institutions ont pris en charge la publication de ces ouvrages. Prenons l’exemple de l’Office national de l’artisanat de Tunisie (ONAT) et aussi l’Académie tunisienne des lettres, des sciences et des arts “Beit El-Hikma” qui a entrepris un énorme travail dans ce domaine.

Parmi les derniers ouvrages de l’Académie citons à titre d’exemple “La calligraphie arabe” (2008) et “L’expérience du peintre Ali Ben Salem” (2011). Il a, dans ce contexte, mis l’accent sur la nécessité d’accorder davantage d’intérêt à ce genre de livres qui sont de nature à bien archiver notre patrimoine artistique dans toutes ses formes et courants, signalant qu’un livre d’art, sur un support papier ne peut guère être remplacé par un support numérique moderne. Fateh Ben Amor, critique d’art et chercheur a tenu à signaler que le problème de commercialisation du livre d’art est du en premier lieu à son coût élevé, un coût qui se répercute évidemment sur son prix de vente.

Ce qui nécessite, a-t-il indiqué, d’accorder une subvention financière pour la publication de ce livre afin d’encourager les maisons d’édition et même les auteurs à s’aventurer davantage dans l’industrie de ce livre, et donc, d’inciter le lecteur à l’acheter, à un prix abordable.