Bastonnez-le, c’est un chômeur!

Par : Autres

Ce n’est pas conseillé du tout d’être chômeur par les temps qui courent en Tunisie. Surtout si en plus vous habitez un quartier pauvre (comme El Mallaha à Radès) ou une localité délaissée par Dieu et les hommes comme Moularès (Om Laarias en arabe!).

La police a chargé à Radès avec une violence inouïe et une efficacité retrouvée après des mois de laxisme contre les violences salafistes. Ils sont entrés à l’intérieur des maisons, ils ont déversé une pluie de bombes lacrymogènes sur les habitants et ils ont arrêté beaucoup de jeunes pour avoir manifesté et coupé la route du port en protestant contre une liste des candidats admis à travailler au sein de la STAM (Société tunisienne d’acconage et de manutention). Il paraît que les manifestants étaient d’une rare violence verbale contre les flics et qu’ils ont jeté des pierres et autres projectiles contre les forces de l’ordre… Des photos sur Facebook attestent de cette dure violence de la part des manifestants traduisant un malaise certain chez ces jeunes en rupture de ban et qui ont été trahis dans leur espoir de voir s’ouvrir pour eux les portes d’une vie décente.

Le pouvoir n’a pas de réponses économiques pour eux ni pour les milliers d’autres chômeurs qui attendent depuis bien longtemps au bassin minier de Gafsa et qui, à chaque tentative d’embauche dans la compagnie CPG, remettent sur le tapis leurs doléances et elles sont légendaires!

C’est la quadrature du cercle dans lequel les décideurs de la Troïka se trouvent et sur plusieurs fronts à la fois. N’ayant pas de réponses pour le pays et n’ayant pas de langage pour le dire correctement aux médias et aux citoyens, ils sont en train de naviguer à vue d’œil comme on dit. On a vu d’abord un laxisme total qui a fortifié la partie salafiste qui s’est emparée de plusieurs centaines de mosquées dans le pays et qui a même tenté de fonder des «émirats» à Sejnane et ailleurs. Le pouvoir a en même temps targué ses opposants de préparer un complot allant jusqu’à faire dire à certains ministres que les preuves d’une collusion entre des opposants et les ambassades étrangères existent. Il s’est avéré après que c’est un poisson de février vs poisson d’avril. Il a attaqué les médias qui, bien sûr, ne lui plaisent pas, puisqu’ils parlent à longueur de journée de ses faillites sans arrêts!

Le pouvoir a, ensuite, sorti la matraque contre les manifestants du 9 avril, puis contre les chômeurs qui protestent à Radès. La presse pro-gouvernementale, elle existe bien sûr, trouve le moyen de dire que l’opposition qui pleurniche à longueur de journée sur les chômeurs et sur l’économie en panne fournit le plus mauvais service aux chômeurs en empêchant le gouvernement de régler les problèmes sociaux et par ricochet l’empêche de faire redémarrer l’économie! (C’est ainsi!). Cette même presse vilipende ouvertement les autres médias en les taxant de tous les noms allant même jusqu’à dire, à l’instar de plusieurs chefs Nahdhaoui, que les médias sont en train de faire couler la révolution tunisienne….

C’est pour cette raison que les chômeurs sont à plaindre chez nous et sur tous les fronts. D’abord, ils sont trop nombreux et difficiles à gérer puisque bon nombre d’entre eux ont des diplômes … Ensuite, ces chômeurs sont souvent jeunes et il y a un grand risque qu’ils “déconnent“ rapidement et puissent nous faire sortir le syndrome de Bouazizi ou quelque chose du même genre, comme ça s’est vu avec le sit-in des blessés de la révolution au ministère de Samir Dilou!

Alors, par les temps qui courent, il ne vaut mieux pas être chômeur!

Par Ali Laïdi Ben Mansour

(Source: WMC)