Tunisie – Politique : L’Etat d’urgence, on en parle sérieusement

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Au lendemain de l’attentat du port Kantaoui, le chef du gouvernement, Habib Essid, a rencontré les secrétaires généraux des différents partis politiques en Tunisie, avec lesquels il a discuté d’un éventuel état d’urgence.

Pour mémoire, l’état d’urgence, qui est une mesure prise par un gouvernement en cas de péril imminent dans un pays et au cours de laquelle certaines libertés fondamentales peuvent être restreintes, comme celle de circuler ou la liberté de la presse, a été observée au moins trois fois en Tunisie. En 1978 suite à la grève générale de la centrale syndicale (UGTT), lors des «émeutes du pain» entre le 27 décembre 1983 et le 6 janvier 1984 en Tunisie, et lors du soulèvement du 14 janvier 2011 -ce dernier état d’urgence fut le plus long, car il n’a été levé qu’après plus de trois ans, en mars 2014.

A noter que l’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire de la République, soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, soit en cas d’événements présentant par leur gravité le caractère de calamité publique.

Il est déclaré pour une durée maximum de trente jours fixée par décret qui détermine la ou les circonscriptions territoriales à l’intérieur desquelles il entre en vigueur. Il ne peut être prorogé que par décret qui fixe sa durée définitive.

La déclaration de l’état d’urgence donne pouvoir aux autorités régionales et centrales d’interdire la circulation des personnes ou des véhicules, d’interdire toute grève ou lock-out même décidés avant la déclaration de l’état d’urgence, de réglementer les séjours des personnes, d’interdire le séjour à toute personne cherchant à entraver de quelque manière que ce soit l’action des pouvoirs publics, de procéder à la réquisition des personnes et des biens indispensables au bon fonctionnement des services publics et des activités ayant un intérêt vital pour la nation.

Autres mesures prévues par la législation régissant l’état d’urgence: le ministre de l’Intérieur peut prononcer l’assignation à résidence dans une circonscription territoriale ou une localité déterminée, de toute personne, résidant dans une des zones prévues à l’article 2 dont l’activité s’avère dangereuse pour la sécurité et l’ordre publics desdites zones.

Il peut ordonner la remise, contre récépissé, des armes et des munitions dont la détention est soumise à autorisation et prescrire leur dépôt entre les mains des autorités et dans les lieux désignés à cet effet. Toutes dispositions doivent être prises pour qu’elles soient rendues à leurs propriétaires en l’état où elles étaient lors de leur dépôt.

Le ministre de l’Intérieur pour l’ensemble du territoire où est institué l’état d’urgence, ou le gouverneur pour le gouvernorat, peuvent ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature.

Peuvent être également interdites les réunions de nature à provoquer ou entretenir le désordre.

Dans les zones soumises à l’application de l’état d’urgence, ces mêmes autorités peuvent ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit et prendre toutes mesures pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature ainsi que celui des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales.

Les infractions aux dispositions du présent décret sont punies d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende de 60 à 2.500 dinars ou de l’une de ces peines seulement.

L’exécution d’office par l’autorité administrative des mesures prescrites en vertu du présent décret peut être assurée nonobstant l’existence de ces dispositions pénales.

Pour éviter toute tentative de dissolution du gouvernement, cet éventuel état d’urgence gagnerait à être accompagné par une suspension provisoire de la Constitution et par une accélération des réformes tant attendues (réformes des taxes fiscales et douanières, l’intégration de l’informel dans le circuit formel, la lutte contre la contrebande…

ABS