Tunisie : Les récentes rixes, de simples faits divers ou la révélation d’une décadence sociale?

Plusieurs cités du Grand Tunis ont été récemment le théâtre de bagarres rangées entre bandes rivales de jeunes voyous. Leur multiplicité et leur concomitance, en cette période de crise multiforme, suscitent plus d’une interrogation. 

Abou SARRA

Pour ne citer que la rixe la plus récente, elle a éclaté dans la nuit du lundi à mardi (26-27 octobre 2020), entre deux clans rivaux de deux quartiers près du Bardo. Selon le rapport de police, des dizaines de jeunes se sont affrontés avec une rare violence, jusqu’à une heure tardive de la nuit, en dépit du couvre-feu décrété en raison de la pandémie du coronavirus.

Au cours de cette bagarre dont on ne connaît pas encore les motifs, des couteaux et cocktails Molotov ont été utilisés par les deux bandes.

Cette bagarre, qui a déclenché un état de panique générale parmi les habitants de cette banlieue, a pris fin grâce à l’intervention de la police qui a procédé à des arrestations parmi ces délinquants.

La même nuit du 26 au 27 octobre 2020, une autre rixe encore plus violente a eu lieu au sud-est de la capitale entre des délinquants des quartiers “El Mouroujet“ et “El Mourouj 1 & 2“.

Selon des informations recueillies par Directinfo, une bagarre a éclaté entre deux jeunes des quartiers précités avant de dégénérer en bataille rangée collective. Au cours de cet affrontement inter-quartiers, outre les jets de pierre, des couteaux, bâtons, bouteilles Molotov ont été utilisés par les deux belligérants.

Résultats : une panique générale parmi les habitants de ces quartiers et le saccage d’une dizaine de voitures. La police a dû intervenir pour faire rétablir le calme.

Des rixes parfois meurtrières

La bagarre de rue la plus dramatique s’est déroulée dans la nuit du 20 au 21 octobre 2020, dans le quartier Borj Louzir à Ezzahara (banlieue sud de Tunis). Cette rixe, qui a mis face à face quelque 800 chenapans, a causé un décès, celui d’une jeune fille lors des affrontements, qui serait la sœur de l’un des belligérants.

Au cours de cette bagarre, qui a semé peur et désordre dans le quartier, les bandes rivales se sont adonnées à des actes de violence en usant de fumigènes et de feux d’artifice, entre autres.

Une autre bagarre, aux relents xénophobes et racistes semble-t-il, a eu lieu, le 13 octobre 2020, entre des Subsahariens et des Tunisiens, à Bhar Lazrek relevant de la municipalité de La Marsa (banlieue nord de Tunis).

A l’origine de cette dispute générale, un vol à la tire. Selon une source policière, des délinquants tunisiens ont subtilisé le sac d’un Subsaharien habitant le quartier. Ce dernier, pour récupérer son sac, a dû faire appel à ses amis. Une altercation devait éclater ensuite entre les deux camps jusqu’à l’intervention des forces de l’ordre.

Symptôme d’une dérive de la société ?

Pardelà le rappel de ces bagarres de rue, la question qui se pose est de savoir s’il s’agit de faits divers isolés ou d’un nouveau phénomène de violence urbaine.

Généralement, lorsque ce genre de fait divers se multiplie et devient fréquent, les sociologues parlent de «fait de société». Il est alors promu, selon eux, au rang de “symptôme des dérèglements de la vie sociale“.

Pis, toujours d’après les sociologues, ces faits divers, lorsqu’ils interviennent dans une ambiance générale de morosité et d’inquiétude sur l’avenir, comme c’est le cas actuellement en Tunisie, il devient le révélateur d’une décadence sociale.

A bon entendeur.