“Le pouvoir frériste dans le corps de la magistrature est devenu une chose évidente. On le dénoncera par tous les moyens”, a prévenu l’avocate Imen Gzara, membre du collectif de défense des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi.
“A ceux qui veulent classer cette affaire rapidement, nous tenons à leur dire que les dossiers des assassinats ne seront pas classés tant qu’il y a des données passées sous silence et que des appareils sécuritaires interviennent pour dissimuler l’implication de l’appareil secret du mouvement Ennahdha dans ces assassinats”, a-t-elle averti.
S’exprimant lors d’une conférence de presse tenue, jeudi, à Tunis, par le collectif de défense, Me Gzara a ajouté que la justice a, officiellement et définitivement, accusé Mustapha Khedher, le 28 mai dernier, d’avoir refusé de signaler aux autorités publiques des informations liées à l’assassinat.
“Le dossier de Khedher a été transféré à la chambre criminelle pour être jugé, ce qui signifie que l’appareil secret d’Ennahdha est devenu une partie intégrante de l’acte d’accusation”, conclut-elle.
L’avocate a fait savoir que le comité de défense a découvert, le 29 mai dernier, des milliers de documents relatifs à 21 dossiers, dont 15 dossiers en lien avec le terroriste Abdelhakim Belhadj (terroriste impliqué dans plusieurs affaires).
Ces dossiers, selon elle, comportent des informations qui n’ont pas été ajoutées au dossier de l’assassinat, sur les déplacements et les correspondances téléphoniques de Belhadj.
“L’appareil secret d’Ennahdha qui s’est infiltré dans les structures sécuritaires et judiciaires de l’Etat n’a pas intérêt à éclater la vérité sur le meurtre de Belaïd et Brahmi”, a-t-elle souligné.
Le comité de défense a, également, indiqué que la chambre d’accusation a demandé au juge d’instruction d’adresser une correspondance à l’ambassade américaine pour réclamer des informations qu’elle détient concernant l’assassinat.
Me Gzara a précisé dans ce sens que le collectif de défense ne dispose pas de données sur ces informations et ne sait pas si les autorités tunisiennes les avaient réclamées ou pas.
S’agissant de l’affaire dite de l’appareil secret et de la chambre noire, l’avocate a indiqué que “le relevé téléphonique de Mustapha Khedher contient des communications fréquentes avec deux numéros de téléphone; l’un s’étant avéré appartenir au chef du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi et l’autre à Kamel Bedoui, enregistré sous le nom de Khitam Zarqaoui”. Il s’agit d’un membre du groupe sécuritaire de 1991.
Ce dernier est chargé de superviser le staff sécuritaire de Ghannouchi.
Khedher avait fait appel à lui le jour de son arrestation, le 15 décembre 2019, indique-t-elle.
Le Collectif de défense a, en outre, déclaré que le dossier de l’assassinant a été transféré au tribunal de première instance de l’Ariana suite à une décision émise par la Cour de cassation, le 14 juillet courant.
Dans ce contexte, le collectif a rappelé qu’il accuse le procureur de la république près du tribunal de première instance de Tunis 1, Béchir Akermi, “de faire trainer l’affaire en vue de couvrir Rached Ghannouchi et certains de ses proches”.
Le Collectif de défense des deux martyrs Belaïd et Brahmi a organisé deux ateliers de travail pour expliquer en détails les entraves marquant le processus d’établissement de la vérité et la relation entre l’appareil secret d’Ennahdha et le dossier des assassinats.
Le tribunal de première instance de Tunis avait décidé, le 29 mai dernier, de reporter au 30 octobre 2020, le procès de l’assassinat de Mohamed Brahmi.
Chokri Belaid, avocat et secrétaire général du Parti des patriotes démocrates unifié, a été assassiné par balle le 6 février 2013 et Mohamed Brahmi, coordinateur général du Mouvement populaire et député a été tué également par balle le 25 juillet de la même année.