JCC 2019 : la Sud Africaine Nicole Schafer, journaliste reconvertie en documentariste

La Sud Africaine Nicole Schafer, réalisatrice et productrice du documentaire “Buddha in Africa” (90′) revient sur son parcours de combattante pour cette coproduction, sortie en 2019. Le film est réalisé entre “Thinking Strings Media”, propre boîte de Schafer, et la compagnie suédoise “Momento Film.”

Tunis accueille la première panafricaine de “Buddha in Africa”, sélectionné en compétition officielle des longs-métrages documentaires à la 30ème édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC). Dans un entretien avec l’agence TAP, Schafer a parlé de l’idée du film qui lui est venue alors qu’elle vivait et travaillait au Malawi comme reporter free-lance. Elle confie avoir été “intriguée de la façon par laquelle on allait assister à la convergence de deux cultures largement distinctes, la culture africaine et la culture asiatique, pour se réunir sous le même toit”.

Elle revient sur une période où l’on assistait à la poussée du volume d’investissement et du nombre des expatriés chinois dans le pays (Malawi) et autres parties de l’Afrique. Une idée qui a peu à peu germé dans son esprit et finira alors par réaliser son premier documentaire.

“Buddha in Africa” est le premier documentaire de Schafer qui vient d’un background journalistique. A l’époque, elle faisait de la vidéo dans de nouvelles assez courtes, en tant que correspondante free-lance au Malawi, sur une période de 3 ans. Le film est conçu contre l’expansion de l’influence chinoise, offrant une vision unique quant à la “force culturelle Douce” qui essaye de changer l’identité des plus démunis sur un Continent déjà confronté à des influences de toute part. L’investissement chinois en Afrique serait selon la réalisatrice une nouvelle forme de colonisation déjà pratiquée par les grandes puissances.

Pour cela, elle a choisi d’aborder la question à travers le récit de la vie d’un enfant malawite et ses camarades de classe, dans un orphelinat, dirigé par un missionnaire taïwanais. Ils grandissent déchirés entre deux cultures. C’était le point de départ pour cette jeune femme habituée à la nouvelle journalistique. C’est aussi la reconversion vers un genre qui n’est pas aussi étrange pour elle, puisque le récit de la nouvelle dans le journalisme et celui dans le documentaire se rejoignent dans l’adoption d’un certain style narratif.

Sa décision était d’abord de regagner son pays où dit-elle “j’ai exploité l’histoire comme palette pour la collecte de fonds de développement et de production et entamer le tournage”. Au Malawi, elle était confrontée à des écarts d’ordre culturels avec la barrière de la Langue dans “un pays où l’on parle peu l’anglais. Les langues les plus parlées sont le Chewa, langue officielle, et le Mandarin”. Sur des années, elle dit avoir “appris à connaître son personnage” et à être en contact avec lui pour capturer les quelques moments intimes de sa vie, visibles dans le film.

Un processus qui a pris du temps avant de pouvoir faire des aller-retour entre l’Afrique du Sud et le Malawi dans des séjours qui peuvent atteindre les trois semaines, à chaque fois. Les financements arrivaient au fur et à mesure que le tournage avance. Manifestement, “j’étais en même temps la réalisatrice, la productrice, celle qui collecte les fonds et qui faisait également le montage”. Le coût à payer, allait du matériel de tournage, aux voyages, jusqu’à la postproduction pour un montage fait par des professionnels.

“Un véritable challenge” pour Nicole Schafer qui a, par la suite, consolidé son récit grâce à l’aide d’une cinéaste chinoise vivant en France pour enfin avoir une copie prête à l’exploitation par son producteur suédois. En l’absence immédiate de fonds, la confection de son film lui avait pris “près de 7 ans dont 4 ans pour le tournage et presque 3 ans pour la postproduction”.

La première mondiale de “Buddha In Africa” avait eu lieu au Canada dans le cadre du “Hot Docs International Documentary Festival”. Le film a déjà remporté le premier prix du Festival international du film de Durban (DIFF), en Afrique du Sud.

Nicole Schafer pourra peut-être espérer à une nouvelle distinction qui couronne l’effort et l’abnégation d’une documentariste engagée par les questions de son époque.