Le film Weldi de Mohamed Ben Attiaen lice pour le prix au meilleur long-métrage
Les courts-métrages Le Fleuriste de Bouslama Chamakh, Ikhwène de Meryam Joobeur et Les Pastèques du Cheikh de Kaouther Ben Hani sélectionnés en compétition
Tarifa, 26 d’avril 2019. La 16ème édition du Festival de Cinéma de Tarifa-Tanger se tiendra du 26 avril au 4 mai 2019. Il s’agît d’un événement transfrontalier se déroulant de part et d’autre du détroit de Gibraltar. La programmation de cette année se divise en huit sections : Hypermétropie, En bref, Afroscope, Séances nostalgie – histoires africaines-américaines, Ghana en quatre actes, La Troisième racine, Cinéma en famille et Hommages. 82 films, dont 29 premières en Espagne et une première mondiale. Meu amigo Fela du réalisateur brésilien Joel Zito Araújo sera le film d’ouverture de cette édition. Le documentaire porte sur la complexité de la vie de Fela Kuti, qui se dévoile à travers les yeux et les conversation de son ami et biographe officiel, l’africain-cubain Carlos Moore, avec d’autre personnages qui ont connu Fela Kuti de près. Une fois de plus, la qualité artistique est au cœur de la sélection des titres présentés à Tarifa, la ville la plus au sud de l’Europe occidentale, et à Tanger, la ville la plus septentrionale d’Afrique. Deux sièges, deux villes, deux continents, séparés uniquement par 14 kilomètres de mer Méditerranée.
La présence tunisienne au FCAT
Le cinéma tunisienparticipe avec quatre films dans les deux sélections officielles du FCAT 2019. Le drame Weldi du réalisateur tunisien Mohmed Ben Attia, retenu à la Quinzaine des réalisateursdu Festival de Cannes en 2018, fait partie des longs-métrages en compétition.Il s’agit du deuxième film ce cinéaste, centré comme le premier sur les problématiques liées aux hommes tunisiens. Après Hedi, un vent de liberté, primé à la Berlinale en 2016, Ben Attia a créé cette histoire sur un jeune qui part faire le Jihad et unpère qui entreprend d’aller le chercher pour le ramener vivant. L’acteur principal, Mohamed Dhrif, sera présent au festival.
Par ailleurs, trois films tunisiens ont été retenus dans la sélection officielle de courts-métrages, En bref Le Fleuriste du cinéaste Bouslama Chamakh nous montre un fleuriste solitaire agressé en permanence par le monde extérieur qui décide d’agir pour le changer. Ikhwènede Maryem Joobeur raconte l’histoire d’un berger endurci qui vit dans un village de Tunisie avec sa femme et ses deux fils. Le retour de Syrie de son fils aîné en compagnie d’une jeune femme voilée bouleverse profondément Mohamed et provoque des tensions entre les deux hommes jusqu’à un point de non-retour. Finalement, Les Pastèques du Cheikh de Kaouther Ben Hania met en scène un imam pieux et respecté qui accepte de prier sur la dépouille d’une femme qu’il ne connaît pas. Son acte de piété s’avère être le péché de trop qui précipitera la spoliation de son pouvoir par Hamid, son jeune sous-fifre machiavélique et ambitieux.
La Tunisie sera aussi représentée dans Les Nuits du Festival de cette édition grâce au musicien tunisien Nuri. Il fait partie de la nouvelle génération de musiciens apparue dans les dernières heures de la dictature de Ben Ali et qui est descendue dans la rue pour exiger son départ lors de la Révolution de jasmin. Résidant au Danemark, il a lancé son premier album Drupen 2017, un hommage à l’héritage africain dans la musique tunisienne et qui relie celle-ci aux traditions ancestrales. Nuri complète son hommage en jouant en direct sur des instruments traditionnels de percussion. Il conjugue ensuite cette trame mélodique avec un mélange de sons du Sahel. Il a dernièrement présenté ce travail en Tunisie, au Maroc, au Danemark, en France, Belgique, Allemagne, Espagne et en France.
L’œuvre du cinéaste tunisien Nacer Khemir sera analysée en profondeur dans le cours de formation Pionniers et révolutionnaires du cinéma africain, dispensé par Javier H. Estrada, critique et programmateur de cinéma. Cette formation adressée au public général du festival mettra en lumière les titres les plus applaudis de Khemir, comme Les Baliseurs du désert(1986) ou Le Collier perdu de la colombe(1991), un cinéaste hors-norme dont l’œuvre est l’une des plus originales des cinémas d’Afrique.
La programmation du FCAT au Maroc
Tanger a été la ville choisi par les réalisateurs espagnols Pablo Macías et Soledad Villalba Cumpián pour la première mondiale du documentaire La vida perra (Chienne de vie) le 30 avril, un portrait de l’écrivain tangérois Ángel Vázquez et du lieu où il a développé son œuvre, le Tanger International.Ce film met en avant l’histoire d’une ville oubliée et d’un auteur enterré de son vivant. Et nous interpelle en nous posant deux questions : Comment l’une des grandes œuvres de la littérature universelle a pu passer inaperçue ? Qui fut Ángel Vázquez ?
Au Maroc, le FCAT multipliera les espaces de projection. L’Institut Cervantes ouvrira ainsi les portes de sa salle d’exposition au cinéma ; le festival a également prévu des projections en plein air dans des quartiers populaires, ainsi que dans des écoles, lycées, associations et ONG de trois villes : Tanger, Tétouan et Chefchaouen. Le cinéma sortira ainsi des salles obscures pour offrir aux habitants tangérois des projections nocturnes en plein air. « Une expérience enrichissante pour un festival qui n’est jamais resté les bras croisés face aux difficultés », explique la directrice du FCAT.
Le continent américain, invité de cette édition
Le FCAT 2019 accueillera aussi la diversité cinématographique du continent américain. La rétrospective Séances nostalgie – histoires africaines-américaines propose une large sélection de films qui ont façonné l’histoire du cinéma afro-américain. Parmi les titres projetés, le public du détroit de Gibraltar découvrira entre autres les films des pionniers qui ont pris la caméra pour dénoncer les clichés racistes d’Hollywood ainsi que le dernier opus de Spike Lee, BlacKkKlansman (2018).
Conçue par Keith Shiri, programmateur du London Film Festival, cette section rassemblera 14 titres ayant pour but de mettre en lumière l’importance du cinéma afro-américain : depuis les racial films de l’époque du cinéma muet, jusqu’à l’ère de la ségrégation raciale aux État-Unis, le mouvement Blaxplotation, le cinéma de Gordon Parks Jr.ou d’auteurs contemporains comme Spike Lee, Julie Dash, Kasi Lemmons ou Marlon Riggs.
Le succès de stars comme Denzel Washington, Idris Elba ou Omar Sy, ainsi que l’irruption de Steve McQueen aux Oscars en 2014, ont facilité le développement d’un public transnational, composé en majorité de jeunes d’origine africaine de plus en plus conscients et désireux de se voir représentés par des acteurs noirs assumant des rôles importants.
Cinq films feront partie de la section La Troisième Racine: des créations réalisées par des cinéastes d’origine latino-africaine et portant sur les problématiques des communautés noires de plusieurs pays d’Amérique Latine. Dans le cadre de « la Décennie internationale des personnes de descendance africaine en Amérique Latine et dans le monde entier », déclarée par l’Organisation des Nations Unies en 2015, le FCAT renforce un nouvel axe de travail centré sur l’afro-descendance en Amérique Latine.
Cette nouvelle approche permettra au festival d’évaluer à travers le cinéma le degré de visibilité des Noirs sur un continent où la population d’ascendance africaine atteint les 200 millions de personnes (sur un total de 625 millions de latino-américains).Cette année, le FCAT se centrera sur trois pays choisis selon deux critères : l’intérêt de la production cinématographique nationale et le taux d’ascendance africaine au sein de la population. La sélection présentera donc cinq longs-métrages de fiction issus de Colombie, du Mexique et de République Dominicaine.
Hshouma de Zainab Fasiki
L’artiste marocaine Zainab Fasiki présentera à Tarifa l’exposition Hshouma. Ce projet a été développé durant El Ranchito, un programme de résidences artistiques qui s’est tenu au Matadero (Madrid) en juin 2018, et en collaboration avec le Queens Collective de Marrakech. Le mot hshouma, issu d’un dialecte marocain, désigne un tabou, un sujet qui ne doit pas être évoquer avec les autres. Dans ce pays, les tabous liés aux différents aspects de la société empêchent toute possibilité d’aborder certains sujets concrets, que ce soit en famille ou à l’école. Le manque de communication sur ces questions entraîne de nombreux problèmes sociaux, comme l’acquisition de connaissances erronées sur des thèmes essentiels qui requièrent l’intervention de professionnels dans le secteur de l’éducation.
Les illustrations que l’artiste présente à Tarifa montrent plusieurs des tabous les plus enracinés dans la société marocaine : l’éducation sexuelle, l’égalité des genres, le corps, la violence, la discrimination et la liberté.
Âgée seulement de 24 ans, Zainab Fasiki est devenue une figure féministe de référence dans le monde arabe. Sa volonté farouche de diffuser aux quatre coins du monde les diverses difficultés auxquelles sont confrontées les femmes au Maroc lui a permis d’exposer ses œuvres dans de nombreux pays.