Tunisie : Rendez-vous avec Marcel et Rami Khalife pour un dialogue artistique père-fils

Entre le chanteur Marcel Khalife et le public tunisien, une longue histoire d’amour tissée depuis le début des années 80 se poursuit.

Pour la saison estivale 2018, l’artiste libanais fera une tournée dans divers festivals du Grand-Tunis et autres régions du pays. Sa première escale sera, le 19 juillet, au théâtre de plein air du Festival international de Hammamet puis sur la scène mythique de l’amphithéâtre romain de Carthage pour un spectacle prévu le 26 juillet.

Marcel Khalife et son fils Rami Khalife, pianiste et compositeur ont tenu mercredi un point de presse à la Cité de la Culture, en présence de Mohamed Zine El Abidine, ministre des Affaires Culturelles et Tony Frangieh, ambassadeur du Liban à Tunis.

Le duo d’artistes a présenté les grandes lignes d’un spectacle commun de haute facture entre un père et son fils chez qui la passion pour la musique est transmise depuis le jeune âge. Une écriture musicale novatrice sera offerte au public tunisien dont un morceau intitulé “Crie”, conçu spécialement en hommage aux martyrs tunisiens. Les Khalife ont également prévu un morceau réalisé d’après un poème datant de 1967, “la fin de la nuit” du poète palestinien disparu Mahmoud Darwich, compagnon de route de Marcel pour lequel il a beaucoup chanté.

Loin de cet cette musique funèbre, -inspiré du répertoire religieux-, le jeune artiste issu d’un pays où cohabite une large diversité culturelle et religieuse, promet un troisième “morceau porteur d’un appel à la reconstruction et à la vie”. Rami Khalife a parlé d’un spectacle fruit d’une recherche continue et réfléchie qui déroge avec les règles préétablies de la musique dans lequel il proposera des chansons revisitées du patrimoine musical oriental. De ses propres compositions, le jeune artiste proposera des partitions musicales réalisées dans une sorte de dialogue singulier entre père et fils.

Marcel Khalife a annoncé d’autre part qu’un projet musical orchestral engagé sera réalisé en partenariat avec l’Orchestre symphonique tunisien et auquel seront associés des chanteurs d’opéra tunisiens.

Selon le ministre des Affaires culturelles, ce projet verra le jour au mois d’octobre prochain au démarrage de la nouvelle saison culturelle. Il n’a pas manqué à cet égard d’évoquer le style musical engagé de Marcel Khalife qui a toujours été fidèle à sa vocation d’artiste défendant les droits humains universels et les valeurs humaines justes.

Au cours de cette rencontre avec la presse tunisienne, une lecture a été faite d’un texte intitulé “Là où les chansons ne trichent pas” que Marcel dit avoir écrit la veille. Comme à chaque visite à Tunis, il est revenu sur son enfance alors élève dans son village natal Amchit, au Mont Liban. Tant de souvenirs ont façonné sa personnalité d’adulte, d’un artiste clamant son refus de se plier aux règles du jeu des dirigeants politiques et pour qui “la vie demeure possible si l’on arrive à reconsidérer ses constances”.

Riche d’un large répertoire musical autour des valeurs de paix et de liberté humaine, Khalife le père réaffirme sa totale adhésion à la volonté des peuples et des pays de la région à réclamer ce besoin de “se libérer, âme et esprit, tant que la musique les réunissent pour s’exprimer”.

L’hôte libanais connu pour sa défense de la cause palestinienne, est souvent dit “engagé”. Il refuse certaines appellations qui ont tendance à classer l’artiste dans un genre bien particulier. Il se met plutôt dans la peau de l’artiste “rebelle et calme, à la fois, mais aussi d’un être humain qui a ses hauts et ses bas, entre amour et haine, ses moments de folie et de quiétude extrême…”.

Dans un contexte général où la politique est devenue omniprésente dans le vécu des sociétés notamment arabes, Marcel Khalife aspire à l’avènement d’un “mode de pensée sain chez les peuples de la région et d’un éveil de la conscience pour échapper à cette dominance du politique”.

Dans un monde de “guerres et conflits, le citoyen arabe semble avoir perdu le don d’aimer”, regrette l’artiste. Cependant, il garde espoir quant au futur, dans ce vaste horizon d’où il voit surgir “un bout de lumière qui mène vers la liberté”. S’accrocher à ce principe vital de la liberté, est à son avis, ce qui permet au créateur de “tâtonner les valeurs et toute l’esthétique de la vie”.

Khalife le père, affiche une position hostile aux valeurs véhiculées par “certaines boites de production actives dans le secteur de l’art qui placent la culture sous le dictat de l’argent et des clans politiques”. Ceci a largement affecté l’acte culturel devenu “un produit commercial”, déplore l’artiste.

Face à ce constat, il parie que “la culture se portera bien tant qu’il existe des créateurs soucieux de faire perpétuer les nobles valeurs humaines”.