“L’égalité dans l’héritage entre l’homme et la femme est aujourd’hui applicable conformément à la Constitution tunisienne et à la loi organique contre les violences faites aux femmes”, a affirmé l’avocate Radhia Jerbi, présidente de l’Union Nationale de la Femme Tunisienne (UNFT).
Dans une interview accordée à l’agence TAP à l’occasion de la célébration le 13 août prochain de la Journée nationale de la femme, Radhia Jerbi a indiqué que l’application de l’égalité dans l’héritage est aujourd’hui une suite logique du développement du rôle de la femme dans la société et de la reconnaissance de ses droits.
“Aujourd’hui la Constitution tunisienne énonce dans son article 46 l’égalité entre l’homme et la femme dans tous les domaines et la loi organique sur les violences faites aux femmes adoptée le 26 juillet dernier par l’Assemblée des représentants du peuple parle de violence économique et le fait de priver la femme de son droit d’avoir la moitié de l’héritage de ses parents tout comme son frère est une forme d’exploitation économique sanctionnée par la loi”, a-t-elle expliqué.
Dans ce contexte, elle a fait observer que plusieurs femmes et jeunes filles contribuent à la formation de la richesse familiale et se trouvent par la suite privées de leur droit à la moitié de l’héritage familial.
Selon Radhia Jerbi beaucoup de familles choisissent de partager à parts égales l’héritage familial sans avoir recours à la loi puisque le Coran et l’Islam en général évoquent l’égalité entre les individus.
Un grand chantier pour réaliser l’égalité effective et totale
“L’égalité effective et totale entre l’homme et la femme est possible mais elle dépend essentiellement du changement des mentalités mais aussi de l’application de la loi et de la volonté politique”, a estimé Radhia Jerbi.
“C’est un grand chantier qui requiert la mobilisation de toutes les parties prenantes (Etat, société civile, partis politiques, Imams, éducateurs…”, a-t-elle ajouté.
D’après la même source le changement des mentalités est essentiellement un travail de terrain de longue haleine qui nécessite la mobilisation de la société civile, le changement des programmes éducatifs, la formation des Imams, des dirigeants des entreprises et des responsables des maisons de jeunes outre le renforcement de la sensibilisation pour diffuser la culture de la citoyenneté et les principes des droits de l’homme basés sur l’égalité entre les tous les citoyens sans discrimination aucune.
“La création des jardins d’enfants dans les entreprises publiques et privées et la sensibilisation des hommes à la nécessité du partage des tâches au sein du ménage, sont aussi indispensables”, a-t-elle dit.
La loi contre la violence : une loi révolutionnaire
S’agissant de la législation tunisienne, Radhia Jerbi a indiqué que bien des femmes ignorent réellement leurs droits bien que le Code du Statut Personnel, la nouvelle Constitution de 2014 et la loi organique sur les violences faites aux femmes comportent des dispositions importantes.
“D’ailleurs, la loi organique sur les violences faites aux femmes est révolutionnaire à plus d’un titre. Elle protège non seulement les droits de la femme mais aussi ceux de toute la famille”, a-t-elle indiqué.
Elle a, en outre, mis l’accent sur l’importance d’accélérer la mise en œuvre de cette loi en commençant par la formation des cadres juridiques dans les tribunaux et des agents de sécurité, la création des espaces d’hébergement des femmes victimes de violences et des cellules d’écoute outre l’amendement des lois, le renforcement du cadre juridique et la facilitation des procédures.
La participation des femmes aux élections pour accéder aux postes de décision
Selon Radhia Jerbi, des diplômées et des compétences féminines dans plusieurs domaines ne détiennent malheureusement pas des postes de responsabilité et de décision. Elles demeurent écartées et leur participation à la vie politique est encore limitée.
“Dans quelques mois les Tunisiens participeront aux élections municipales et il est grand temps que les femmes soient aux premiers rangs et participent massivement à cette échéance politique pour pouvoir accéder aux postes de décision”, a-t-elle dit.
La présidente de l’UNFT a fait savoir que l’organisation s’est bien préparée à cet événement et a organisé plusieurs sessions de formation et des campagnes de sensibilisation dans plusieurs régions du pays pour inciter les femmes à s’inscrire et à voter pour faire parvenir leurs voix, et à présenter également leurs candidatures.
L’UNFT une organisation indépendante au service de la femme tunisienne
Après l’organisation d’un congrès extraordinaire en 2013, l’UNFT tiendra le 13 octobre prochain son Congrès ordinaire pour élire un nouveau bureau exécutif après des années de lutte pour survivre au lendemain de la révolution.
“Le nouveau bureau de l’UNFT et notamment la présidente doivent mettre de côté leurs appartenances politiques et idéologiques et œuvrer à garantir l’indépendance de l’organisation et œuvrer uniquement pour être au service de la femme tunisienne”, a souligné Radhia Jerbi, faisant observer que les militantes de l’UNFT ont combattu au cours de cette dernière année pour rétablir le rôle de l’organisation au sein de la société.