Les députés de l’Assemblée des représentants du peuple, réunis mercredi, ont été unanimes à souligner la gravité de la situation sécuritaire et sociale et la nécessité de préparer un plan d’urgence pour y faire face.
Ils ont, par contre, été divisés sur la question de la proclamation de l’état d’urgence au cours de la séance de dialogue avec le chef du gouvernement consacrée à la situation sécuritaire et l’état d’urgence décrété, samedi dernier, par le président de la République.
Les députés de la coalition gouvernementale au pouvoir ont estimé que l’état d’urgence aurait du être décrété en mars dernier à la suite de l’attentat du Bardo (le 18 mars 2015), exprimant leur ferme appui à la décision de proclamation de l’état d’urgence ainsi et à la démarche du gouvernement dans sa lutte contre le terrorisme. Ils ont, dans ce contexte, insisté sur l’unité nationale et la nécessité de soutenir les forces armées et sécuritaires.
Les députés de la coalition au pouvoir ont mis l’accent sur l’impératif de mettre en place un plan de sauvetage de la saison touristique, notamment après l’attentat de Sousse, et de prendre les mesures sécuritaires et économiques nécessaires pour rétablir la sécurité et la stabilité.
Certains députés ont appelé à éviter provisoirement d’évoquer les questions sociales, arrêter les recrutements dans la fonction publique, geler les salaires, instaurer une justice fiscale, lutter contre la contrebande qui sert de vivier pour le terrorisme, estimant que le combat actuel n’est pas uniquement économique mais politique et sécuritaire par excellence.
D’autres se sont félicités de l’intervention du chef du gouvernement qui a affirmé, dans son intervention au début de la séance, son engagement à respecter les libertés et les dispositions de la Constitution.
Certains ont considéré que le décret réglementant l’état d’urgence n’est pas contraire aux dispositions de la Constitution.
Par ailleurs, la majorité des députés qui n’appartiennent pas à la coalition au pouvoir, ont été unanimes à soutenir que la proclamation de l’état d’urgence est anticonstitutionnelle et que le fait de se baser sur le décret n°50 de l’année 1978 pose un problème d’ordre juridique.
Iyad Dahmani (Al-Joumhouri) a critiqué le fait de proclamer l’état d’urgence en se basant sur le décret n°50 de l’année 1978, relevant que toutes les dispositions de ce décret ne concernent nullement la lutte contre le terrorisme, mais plutôt la lutte contre les troubles. De son côté, Zouhair Maghzaoui (Mouvement Echaab), a critiqué l’allocution télévisée du président de la République dans laquelle il avait annoncé l’état d’urgence, la qualifiant d’ « alarmante ».
Le président Caid Essebsi, a-t-il ajouté, a focalisé son allocution sur la situation sociale et les troubles qu’il a, délibérément, associées aux revendications sociales et au terrorisme. Ammar Amroussia et Nizar Amami (Front populaire) estiment que la proclamation de l’état d’urgence est contraire aux dispositions de la Constitution, mettant en garde contre l’utilisation de l’état d’urgence comme prétexte pour faire passer des politiques qui ne servent pas l’intérêt du peuple et sont en opposition avec les acquis de la révolution.
D’autres ont proposé de mettre en place un fonds de lutte contre le terrorisme et de trouver des solutions radicales aux problèmes de la jeunesse. Dans une déclaration aux médias, à l’issue de la séance, le chef du gouvernement, Habib Essid, a affirmé que la déclaration de l’état d’urgence est légale et conforme aux aux lois en vigueur en Tunisie, relevant que cette question a été débattue sous tous ses aspects avant la proclamation officielle de l’état d’urgence.
Au sujet de la barrière sécuritaire qui sera mise en place sur les frontières tuniso-libyennes, Habib Essid a précisé que cette mesure a été prise depuis le 18 mars dernier dans le but de renforcer la présence sécuritaire dans la zone frontalière pour éviter le trafic d’armes et l’infiltration de terroristes. La séance a été levée après trois heures de débat. Elle reprendra jeudi soir à 22h00.
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