Tunisie : Conférence sur “la prévention de la corruption dans les institutions judiciaires”

Une conférence sur « la prévention de la corruption dans les institutions judiciaires » s’est tenue ce mardi à Tunis à l’occasion de la Journée mondiale contre la corruption. Le ministère de la Justice, des droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle en était l’initiateur, avec le concours du Bureau des Nations Unies en charge de la lutte contre le narcotrafic et la criminalité.

L’Etat a fait de la lutte contre la corruption une de ses priorités afin de conforter l’Etat de droit, protéger les institutions démocratiques et réaliser le développement économique et la justice sociale, a souligné le ministre de la Justice dans une allocution à l’ouverture de la rencontre.

En souscrivant à l’effort international de lutte contre la corruption, notamment par la ratification de la Convention des Nations Unies contre la corruption, la Tunisie s’est dotée de nouveaux mécanismes et d’un dispositif institutionnel approprié pour combattre la corruption, comme la Commission tunisienne d’analyses financières, le Pôle judiciaire et financier et l’Instance nationale de lutte contre la corruption, a ajouté Hafedh Ben Salah.

Le ministre a, d’autre part, annoncé qu’il sera procédé, sur le terrain judiciaire, à l’activation des principes énoncés par la Convention concernant les dispositions relatives à l’appareil judiciaire et les organes du ministère public, et ce dans le but d’accroître la transparence et d’anticiper les risques de concussion des membres du corps judiciaire.

Il a, également, indiqué que la prochaine étape sera marquée par la promulgation de lois et la mise en place des règles professionnelles pour une application à bon escient de ces textes, parallèlement au développement de la coopération internationale et à la réunion des conditions de procès équitables.

De son côté, le président de l’Instance provisoire de l’ordre judiciaire, Khaled Ayari, a assuré que l’instance ne manquera pas de prendre des « mesures coercitives contre quiconque, parmi les magistrats, qui dévierait du droit chemin ». Il a, aussi, fait part de la volonté de l’instance de participer, en cette étape de transition, à l’élaboration de textes de loi destinés à asseoir les règles devant régir le fonctionnement de l’appareil judiciaire.

La représentante du Bureau des Nations Unies en charge de la lutte contre le narcotrafic et la criminalité a salué, quant à elle, les efforts de la Tunisie en matière de lutte contre la corruption, soulignant l’importance qu’il y a de parfaire la qualification de la magistrature pour l’instauration de la stabilité et la lutte efficace contre la prévarication.

Dans une déclaration à l’agence TAP en marge de la conférence, le président de l’Observatoire tunisien de l’indépendance de la magistrature, Ahmed Rahmouni, a souligné la nécessité de doter l’institution judiciaire d’un nouveau dispositif garant de transparence et d’impartialité, reprochant à l’institué d’avoir joué « un rôle négatif » dans le passé et d’avoir prêté son « concours à des violations antérieures ».

Il y a eu trop de perte de temps pour réformer les institutions, ce qui a fait que la justice n’a pas rempli son rôle lors de la mise en place de la loi sur le justice transitionnelle et en matière de lutte contre la corruption, a-t-il ajouté, formant le voeu de voir adopter des mécanismes nouveaux pour « un vrai début de réforme de la justice ».

Rahmouni a, par ailleurs, jugé « insuffisants » les textes de loi promulgués et les mécanismes mis en place pour combattre la corruption et promouvoir la bonne gouvernance. La lutte contre la corruption ne peut réussir que dans le cadre de l’Etat de doit et « les mesures improvisées seront inopérantes comme les limogeages collectifs et la mise à la retraite massive ».

Un expert de la lutte contre la corruption, Fayçal Ajina, a estimé de son côté que les efforts en la matière sont entrés “en hibernation” après la révolution, faute de réformes et de vision d’avenir pour combattre véritablement ce fléau, mais aussi en raison de la focalisation de toute l’attention sur le politique et le travail constituant.