L’engagement politique est toujours admirable. L’honneur de servir les citoyens, tous les citoyens, sans se servir, est une forme de noblesse au-delà du devoir. L’humilité devant la confiance des électeurs est la clé de la réussite du mandat d’un représentant du peuple. L’écoute permanente des concitoyens et la proximité avec les gens de tous bords est le lot de tout député conscient de la mission dont il a la charge. L’exemplarité dans le comportement, l’attitude et l’empathie réconcilierait les Tunisiens avec la chose publique, les affaires de la cité, la politique et les politiciens.
Or en Tunisie, on a eu un précédent, l’honorable Assemblée nationale constituante, son rendement et le rendement de ses membres. De toutes les institutions composant le dispositif de la transition vers la démocratie en Tunisie après le 14 janvier 2011, l’ANC avait la plus mauvaise image auprès du grand public. Ses membres n’ont que rarement fait attention à l’impact désastreux de leurs sorties médiatiques, très souvent maladroites, diffusées en direct à la télévision et relayées par les réseaux sociaux. L’image globale qui en sortait n’était pas à la hauteur de la mission de cette Assemblée. Les citoyens ont en gardé une perception de confusion, de violence, de déchirement et de fausseté, loin de ses préoccupations et ses aspirations. Les Tunisiens ont assisté, durant trois ans, à un concours de traîtrise, de dégradation vestimentaire, de trouble de comportement, et d’attitude non exemplaire de leurs représentants. Les taux de participations aux différentes échéances politiques et qui n’ont jamais dépassé les 40% des Tunisiens de plus de dix-huit ans en est la conséquence directe.
Près de 5 millions de Tunisiens ne se sont pas déplacés les 26 octobre ni le 23 novembre 2014 pour accomplir leur droit et devoir pour les échéances électorales nationales. Ce ravage a concerné notamment les jeunes qui n’avaient pas, a priori, une haute idée de la politique et des politiciens. Les voilà fixés maintenant dans leurs préjugés par le spectacle donné par l’ANC notamment, et qui a fini d’achever la réconciliation éventuelle d’un pan entier de Tunisiens avec le monde politique.
Tout n’est pas perdu pour autant. On a une nouvelle Assemblée. Beaucoup parmi les députés sont de nouveaux élus. L’impression générale est qu’on a à faire à des représentants du peuple et non des représentatifs, c’est un motif de satisfaction en soi, car cela dénote d’une plus grande maturité et de la part des forces politiques qui ont proposé des candidats à la hauteur de la mission attendue et de la part des électeurs qui ont fait le tri.
Une nouvelle page s’ouvre : la politique c’est important et il lui faut recouvrir ses lettres de noblesse auprès d’un peuple qui doute de son avenir, de ses élites politiques, de l’intérêt de l’engagement politique ou citoyen pour changer les choses. Des échéances électorales attendent les Tunisiens en 2015, les municipales notamment…
Le renouvellement progressif de la classe politique, le changement du discours politique et la prise en compte de l’opinion publique dans l’exercice d’un mandat politique pour consacrer l’attente du citoyen comme l’aiguillon de l’action publique, augurent d’une nouvelle Tunisie, démocratique et politiquement apaisée.
* Hassen Zargouni est statisticien et PDG de Sigma Conseil