Les magistrats étaient ce mercredi matin en sit-in devant le Palais du Bardo, à l’appel de l’Association des magistrats tunisiens (AMT). Ils entendaient, par ce mouvement de protestation, obtenir de l’Assemblée nationaleconstituante l’abandon des modifications envisagées pour l’article 103 de la Constitution figurant au chapitre du pouvoir judiciaire et la reformulation des articles 109 et 112 du même chapitre relatifs au Conseil supérieur de la magistrature et au parquet.
« La manipulation des articles figurant au chapitre du pouvoir judiciaire de la Constitution, notamment l’article 103 recalé au vote, met gravement en péril l’indépendance de la magistrature alors que, dans sa mouture initiale, cet article apparaissait comme une garantie de l’indépendance des juges et rompait avec l’hégémonie du pouvoir exécutif sur la nomination des magistrats aux hautes fonctions judiciaires », a estimé la présidente de l’association Raoudha Grafi dans une déclaration aux médias.
« La modification de cet article que certains députés de la Constituante tiennent à faire passer constitue une atteinte à la révolution et une tentative de légitimation constitutionnelle de la main-mise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire ».
Même tonalité dans les propos de la présidente du Syndicat des magistrats tunisiens (SMT), Raoudha Labidi: « Cette bataille est celle de tous les magistrats, voire de l’ensemble du peuple tunisien », a-t-elle déclaré, assurant qu’aucune limite « n’a été fixée pour les futures actions protestataires du Syndicat qui iront crescendo en cas de persistance à vouloir faire passer un projet destiné manifestement à torpiller l’indépendance du pouvoir judiciaire et le droit de tout un peuple à l’égalité devant la loi ».
Niant qu’il y ait « des initiatives de l’Assemblée constituante pour entendre les revendications des magistrats », Labidi a indiqué que « les magistrats cherchent sans relâche à entrer en contact avec les parties concernées, qu’il s’agisse de commissions ou d’élus, pour faire entendre leur voix et plaider l’intérêt de sceller constitutionnellement l’indépendance du pouvoir judiciaire ».
Les participants à ce sit-in auquel la présence de nombreux journalistes, avocats et représentants de la société civile et de partis politique a été remarquée aux côtés des juges, ont scandé des slogans et brandi des pancartes en faveur de l’indépendance de la magistrature et de la presse.
Le président d’honneur de la Ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme, Mokthar Trifi a estimé à cette occasion que « l’indépendance de la justice doit être tangible et ne souffrir aucune tentative de la remettre en cause, encore moins les manuvres tendant à placer le pouvoir judiciaire sous l’hégémonie du pouvoir exécutif comme il était de mise avant la révolution ».
De son côté, la présidente du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), Néjiba Hamrouni, a fait part du soutien de la profession aux magistrats dans leur grève et à toutes leurs actions protestataires pour une justice indépendante.
Rappelant qu’une magistrature indépendante et une presse libre sont les principaux piliers de la démocratie et du pluralisme, Hamrouni a fait état des démarches entreprises depuis une semaine par le SNJT et la HAICA auprès de l’Assemblée constituante au sujet des articles 122 et 124 de la Constitution afin d’obtenir qu’ils soient expurgés des lacunes qu’ils comportent au détriment des garanties dont la HAICA doit disposer.