Tunisie – Mehdi Jomaa : Pourquoi veut-on, déjà, l’abattre?!

A beau mentir, celui qui vient de loin ! Ce proverbe paru au 17ème siècle signifiait qu’il était aisé de cacher les vérités lorsque l’on est sûr que ce que l’on dit est difficilement vérifiable.

Ce qui est étrange aujourd’hui, c’est le tissu de mensonges que l’on peut inventer pour mettre en pièce une personne sans même lui laisser le temps, non pas de se défendre, mais de se dévoiler. «Al Hiss nikssmou bil ba3y» (au moindre bruit, on commence à se partager le butin) comme le dit si bien cette maxime qui vient de chez nous.

Pourtant, le monde étant devenu un village planétaire, nous pouvons recueillir des informations fiables. Ceci, bien entendu, à condition de ne pas émettre dès le départ des jugements de valeur non adossés à des vérités avérées et établies.

Cette fois-ci, les attaques ont touché Mehdi Jomaa, ministre de l’Industrie, qui succèderait à Ali Larayedh, oh surprise!, après avoir été choisi par 9 partis et approuvé par le quartette mettant fin à un Dialogue national qui n’en finissait pas.

Ce monsieur, que l’on ne connaît pas vraiment, a été traité de tous les noms. On lui a pris femme et enfants et on lui a créé de toutes pièces une belle famille concoctée par des lobbys politiques qui ne l’ont pas senti venir et lesquels, perdant pied sous l’effet de l’effarement, ont vite fait de faire fonctionner mercenaires de la plume et réseaux sociaux pour le mettre en miettes. On lui a donc rapidement fabriqué un arbre généalogique dans lequel il serait le beau-fils de Mohamed Ben Salem et le beau-frère de Slim Ben Hmidane. Faux et archifaux.

Mehdi Jomaa est-il un saint? Qui pourrait le jurer? Personne. Pourtant, l’histoire dit que ce monsieur, qui avait occasionnellement été présenté en Allemagne, lors d’une foire de l’automobile à Hamadi Jebali en quête de compétences pour son gouvernement en chute libre, surtout depuis l’assassinat de Chokri Belaïd, a été approché pour occuper le poste de ministre de l’Industrie. Il était payé 10 fois son salaire actuel dans un grand groupe industriel français, mais il a considéré après l’insistance de la partie tunisienne pour l’intégrer dans le nouveau gouvernement qu’il devait bien cela à son pays.

Il avait déclaré, il y a quelque mois: «Je considère que je m’acquitte de mon service militaire que je n’ai pas fais. J’essayerai de remettre de l’ordre pendant ces neuf mois au ministère, de mettre en place une stratégie de relance, et je reprendrai mon travail dans mon groupe qui a besoin de moi». La preuve? Il n’a rapatrié ni femme, ni enfants, comme beaucoup d’autres -croyant s’éterniser au pouvoir- l’ont fait. Mehdi Jomaa est le neveu de Mohamed Masmoudi, l’un des instigateurs du projet avorté de l’union tuniso-libyenne en 1974, qui devait unifier les deux pays.

Principal membre du gouvernement tunisien à soutenir cette union car elle aurait été, selon lui, bénéfique pour l’économie tunisienne,, serait devenu vice-Premier ministre si le projet avait été mené à bien. Suite à l’échec du projet, il fut destitué de ses fonctions le 14 janvier de cette même année et remplacé par Habib Chatti.

Mehdi Jomaa est issu d’un milieu conservateur, son père est un Zeytounien. Est-ce que cela fait de lui un Nahdhaoui pur et dur?  Est-ce une cellule dormante comme beaucoup se plaisent à le répéter? Il revient peut-être aux services de renseignements de le dire. Aujourd’hui, les syndicats de police ou d’autres sources fiables n’ont pas les langues dans la poche et peuvent le déclarer haut et fort, s’ils s’en assurent.

Ceci dit, tous les Tunisiens conservateurs ne sont pas des Nahdhaouis. La majorité d’entre eux est aux antipodes d’un parti qui a usé de la religion pour arriver au pouvoir. Bien sûr qu’il n’a pas fait de militantisme politique. Pendant 25 ans, il n’a fait que travailler dans une multinationale et en gravir les échelons un à un, cela nous épargne au moins à nous, Tunisiens, l’historique douteux de certains pseudo-militants «droit-hommistes» qui ont trompé dans nombre d’affaires d’argent et d’influence.

Il connaît la valeur du travail, contrairement à ceux qui ne savent que prononcer des discours… Il a un cousin au parti Ettakatol, doit-il s’en excuser? Ou peut-être exiger de lui qu’il change d’orientation idéologique? (sic)

Un certain Hassan Zargouni, que tout le monde connaît, a posté ceci: «Les absents ont toujours tort. Nidaa Tounes et le Front populaire ont fait deux erreurs majeures en quittant le Dialogue national; ils n’ont pas su, pu ou voulu “marketter“ les personnalités qu’ils ont proposées (Essid a obtenu 2 voix par exemple); ensuite, ils n’ont pas su ou pu ou voulu négocier la suite du plan du Dialogue national, à savoir le démantèlement des LPR, le verrouillage des ministères de souveraineté, l’audition des nouvelles nominations au niveau des collectivités locales et entreprises publiques. Si c’est voulu pour faire échouer le Dialogue national et jouer la carte du pourrissement, ce n’est pas responsable. Et ça, ni l’UTICA ni l’UGTT ne le veulent à juste titre. L’erreur stratégique de NT et du FP risque de se voir au grand jour quand la paix sociale va enfin s’instaurer, quand Mehdi Jomaa choisira un homme à poigne au MI pour irradier les salafistes et leur cortège de violence ainsi que le terrorisme. Quand il va choisir un fin politicien pour l’aider à gérer les égos des politiciens et les élucubrations des membres de l’ANC. Enfin, quand il va choisir un indépendant très compétent en matière de réformes économiques et sociales. La Tunisie vaut tous les sacrifices… Je dis cela modulo la conscience de MJ que l’heure est grave et que les grands choix n’attendent plus! Une fenêtre historique lui est grande ouverte…»

Cela fait plus d’une année que la Tunisie souffre de manque de visibilité, d’absence de sécurité, d’une récession économique, d’une instabilité sociale et du recul des fondamentaux économiques sur fond de querelles sans fin entre partis d’opposition et un gouvernement autiste et sectaire sans qu’on s’inquiète outre mesure. Les uns et les autres assistaient à un Dialogue national dont les reports successifs ont fini par mettre à dure épreuve la patience des Tunisiens. On a mis sur la table des noms d’octogénaires auxquels plus de la moitié de la Tunisie qui a moins de 25 ans ne pouvait en aucun cas s’identifier sans que les partis au «sang bleu» qui nous ont rendu vert de rage n’ont bougé le petit doigt.

Aujourd’hui que l’on arrive à un consensus, même fragile, autour d’une personne, il y a des voix qui s’élèvent pour la descendre sans lui avoir donné aucune chance de montrer ses preuves. Une honte! Lorsqu’on se rappelle qu’il y a plus d’une année, le processus pour la création d’un gouvernement de compétences nationales a été saboté par un Néjib Chebbi et d’autres, qui avait briefé une Maya pour proposer au vénérable Cheikh de prendre le bâton par le milieu. Mehdi Jomaa a fait partie de la moitié qui comprenait les compétences, devons-nous lui en vouloir pour cela?

Il est révoltant de voir les pions conduits par des marionnettistes de l’ombre et des lobbyistes organiser des campagnes hideuses parce qu’ils sont mis hors jeu par le quartette et les autres partis. Il est scandaleux de voir une horde de mercenaires payés les uns et les autres s’acharner sur un tout bout d’espoir de sortie de crise, car rien à ce jour n’est encore définitif. Ceux dont le seul but est d’occuper le siège de la présidence sont du coup «purifiés».

Mehdi Ben Jomaa n’aura pas de chèque en blanc, les Tunisiens sont aujourd’hui édifiés par trop de déceptions. S’il respecte la Feuille de route, tant mieux, dans le cas contraire, il n’est pas indispensable comme beaucoup d’autres!