L’Union des magistrats administratifs et la faculté de droit de Sfax ont organisé, lundi à Tunis, une conférence sur le thème “le Tribunal administratif et les pouvoirs publics”. La relation entre juridiction et les pouvoirs publics a toujours été tendue, ont admis les participants à cette rencontre.
Selon le professeur de droit Néji Baccouche, le regard critique des politiques sur le rôle du tribunal administratif, taxé d’être politisé, fait que les pouvoirs publics se montrent suspicieux quand aux arrêts rendus par cette instance.
Il a cité à ce propos la position de certains politiques à l’égard des décisions du tribunal administratif, dont celle ordonnant la suspension des travaux de la commission de sélection des candidatures à l’Instance supérieure indépendante des élections (ISIE).
“Dans les régimes démocratiques, les décisions du tribunal administratif ne sont pas susceptibles de critique et l’obligation de réserve impose aux juges d’éviter toute polémique avec les politiques”, a ajouté M. Baccouche.
Intervenant lors de cette conférence, la présidente du Syndicat des magistrats tunisiens, Raoudha Labidi, a souligné que le tribunal administratif fait face, après la révolution, “à des attaques dans le but d’entraver son rôle en matière de contrôle de la constitutionnalité des lois, notamment en l’absence de constitution et d’une Cour constitutionnelle ainsi que d’une vision claire de la mutation démocratique”.
“Le tribunal a en effet gagné la confiance du peuple tunisien mais pas celle des politiciens et des dirigeants de partis politiques qui avaient annoncé leur position selon laquelle les décisions du tribunal ne seraient pas contraignantes”, a-t-elle ajouté.
Le juge administratif et membre de l’union des magistrats administratifs, Ahmed Saouab, a pour sa part souligné dans une déclaration à la TAP en marge de la conférence que la non-application des arrêts du tribunal concernant les délégations spéciales des municipalités de la Soukra, Sakiet Eddayer, Sfax et de Kerkennah, illustre la réalité de la relation entre les deux parties.
“L’inexécution des décisions du tribunal administratif est une violence perpétrée contre notamment les juges et représente une violation de l’Etat de droit”, a-t-il souligné. Le tribunal administratif fait face à une campagne d’attaques et de dénigrement par des représentants de la société civile et des médias pro-gouvernement, a-t-il déploré, précisant que ce comportement balise la voie pour l’avènement d’une nouvelle dictature.