Reportage: Instantanés dans un café d’El Menzah 6 pour un Cameroun-Tunisie qui a bien déçu.
C’est un café comme un autre. Du côté d’El Menzah 6. A un croisement qui mène à El Manar. Et en ce dimanche 17 novembre 2013, son gérant, Ridha, a planté ses chaises et tables dans tous les coins du café et allumé ses quatre téléviseurs.
L’occasion, évidement, c’est le match de qualification pour la phase finale de la Coupe du monde de football au Brésil en 2014. Entre le Cameroun et la Tunisie. Une rencontre on ne peut plus attendue.
Et en ce dimanche, fidèles au rendez-vous, il y a là Fethi, commerçant dans le coin, Slim, professeur d’éducation physique, Mohamed, Enseignant, et Mounir, dit Manou, fonctionnaire dans une entreprise publique.
« Vous êtes avec nous ou avec les Camerounais ? »
L’ambiance est chaude au début du match. D’autant plus que le signal du stade Ahmadou Ahidjo, le père de l’indépendance du Cameroun, n’arrive pas du tout.
Lorsque l’image apparaît à l’écran, la Tunisie a déjà encaissé un but. Douche froide pour les nombreux clients du café. Mais on garde espoir. « N’challa Marbouha », lance Faouzi, bleu jean et barbe de quelques jours, un étudiant en gestion, qui a installé sa chaise à côté de notre groupe.
Les visages se durcissent peu à peu devant le peu d’engagement du onze tunisien. Mohamed agace ses amis pour ses « remarques désobligeantes » envers les joueurs. Il lance ses critiques envers tout le monde. Le plus agacé est Manou qui lui lance, de temps à autres, cette phrase : «Vous êtes avec nous ou avec les Camerounais?» en fumant sa chicha. Et toujours réponse de Mohamed : «Moi, je ne carbure pas aux sentiments».
Et c’est la mine des mauvais jours que va avoir tout le monde avec le deuxième but camerounais de Moukandjo à la 30ème minute. Mohamed se déchaîne contre tout le monde. Y compris l’entraîneur national, le Hollandais Krol. «On a cru en lui. Il a fait de bons résultats avec le Club Sportif Sfaxien. Mais, comme toujours, chez nous, on s’installe dans le rêve et dans la glorification ! Il a fait de mauvais choix. La preuve !»
L’espoir renaît avec le but d’Ahmed Akaïchi, d’entrée de jeu en deuxième mi-temps (49 ème minute). Embrassades, joies, cris et hurlements remplissent le café. Nouvelle douche froide lorsqu’arrive le troisième but de Makoun à la 65ème minute. C’est le désespoir lorsque le même Makoun marque le quatrième but (86ème minute). «Le bateau a définitivement coulé», fait remarquer Amor, un habitué.
Le café se vide peu à peu. Ne restent que quelques irréductibles qui souhaitent vivre le match jusqu’aux derniers instants. «Pas par masochisme», soutient Slim, imperturbable, engoncé dans son parka. Mohamed, qui quitte sa chaise, essaye de le faire sortir du café en lui faisant remarquer que «Rien ne sert de rester. De toute façon, avec l’équipe nationale, c’est toujours du pareil au même. A moins de gager grâce à une réserve, comme contre les îles du Cap Vert, on n’est pas performant!»
Mohamed Farouk