1- Point d’histoire
«Moncef Marzouki a déclaré récemment […] “Nous sommes en train de rédiger le 8ème texte constitutionnel depuis l’époque carthaginoise” … » ! Non, nous sommes en train de rédiger le troisième (3ème) texte constitutionnel dans toute l’histoire de la Tunisie. Les «constitutions» des colonisateurs phéniciens (carthaginois) et romains n’intéressaient aucunement les autochtones (les berbères d’Ifryqya). La première constitution de la Tunisie vit le jour le 09 septembre 1857 à l’initiative du roi Mohamed Sadoq Bey. Un siècle plus tard, c’est la première assemblée constituante qui rédigea la seconde constitution. Toutes les deux n’ont jamais vu le jour et naquirent mortes et restèrent «encre sur papier». Nous voilà, aujourd’hui, à attendre notre vraie première constitution dans l’espoir qu’elle n’aura pas la destinée de ses deux précédentes sœurs.
2- De la démocratie et du réalisme
«La constitution concoctée soigneusement pas la Nahdha, approuvée par ses alliés déclarés d’autres non déclarées» (A.B.A). L’auteure ne cache pas son désappointement, pour ne pas dire son mépris et sa haine, que cette troisième constitution tant attendue par les tunisiens soient «concoctée» par un parti «islamiste» ne cachant point ses intentions de tailler la constitution à sa mesure et voulant «rester au pouvoir longtemps». Dictature en vue, selon les «opposants» laïcs. Admettons mais soyons démocrates, réalistes et responsables. Il est tout à fait normal qu’un parti élu ayant sa propre majorité, ou une majorité composée, dans une Constituante, «concocte» le nouveau texte constitutionnel, c’est la règle dans le monde entier. Supposons que les laïcs ont cette majorité et nous «concocteraient» une constitution laïque à la française, l’opposition «islamiste» diraient la même chose et plus encore. N’oublions pas que nous sommes (déjà !) à la 3ème version bêta (brouillon) de la nouvelle constitution en moins de deux ans. Bon signe puisque la Nahdha du trinôme Ghannouchi-Ellouz-Zitoun n’a pas pu imposer ses choix. Alors, qu’est-ce qui fait «peur» dans ce brouillon ?
3- Du président fantoche
«La motion de censure contre le président de la République Moncef Marzouki, signée par 77 députés, est restée en suspens, le temps…qu’il approuve ou désapprouve la constitution» (A.B.A). Quelques repères pour ne pas nous égarer. A)- la motion de censure contre le président Marzouki est à l’initiative des « laïcs » et n’a rien à voir, au départ, avec la constitution. B)- Constitutionnellement et juridiquement Marzouki n’a ni le pouvoir ni le droit de refuser d’apposer sa signature au bas du texte constitutionnel. C)- Marzouki subirait-il vraiment «des pressions énormes … pour signer au plus tôt la constitution […] D’après la même source, ça serait même Rached El Ghannouchi, président de la Nahdha qui harcèlerait Moncef Marzouki pour l’obliger à entériner le projet de la constitution» (Amel.B.A) ? le titre de l’article est bien au conditionnel : «Marzouki subirait des pressions de la Nahdha». Pourquoi «harcèlerait-on» un président qui n’a d’autre choix que de signer le texte constitutionnel ?
4- Du pragmatisme, au moins
Madame Amel est certainement au courant des critiques positives et négatives, objectives et subjectives de ce texte constitutionnel «final». Personnellement, j’ai remarqué (sans m’adhérer à leurs avis) que des spécialistes et des «laïcs» disent plus de bien que de mal du texte. Il n’y a que les extrémistes rouges, noirs et «bleu-blanc-rouge» qui «crient au diable». C’est donc l’idéologisée qui parle et non le pragmatisme. Le pragmatisme et le réalisme veulent qu’on arrête cette guerre idéologique, que la constitution soit finie avant octobre 2013 et que les élections soient en décembre. Le texte n’est ni «exemplaire» ni vide comme toutes les constitutions du monde. Aucun peuple n’est entièrement content de sa constitution. Il est donc bizarre que certains et certaines veulent sacraliser un texte constitutionnel comme la bible judéo-chrétienne. Non à une constitution de «moulathamyn (الملثّمين)» (rigoristes hadithistes et fikhistes). Non à une constitution à la française. Non à une constitution sujette au «droit international» concocté par les sionistes à l’ONU. Le texte constitutionnel tunisien n’entre dans aucun de ces trois extrêmes Mais il est loin d’être « parfait » puisque ce «parfait» n’existe pas et quand même il ne satisferait pas tout le monde. Soyons TUNISIENS avant d’être «laïc», «religieux», « nahdhawy » ou « bourguibistes », serait-ce possible ?
Commentaire de Amad Salem à l’article «Tunisie-politique : Marzouki subirait des pressions de la Nahdha pour ratifier la constitution»