Personne ne conteste le fait que le parti destourien a construit l’Etat tunisien, l’infrastructure économique et sociale du pays, mais il avait échoué politiquement dans l’installation d’une République démocratique qui accepte la différence et la pluralité d’opinions. Le PSD est mort suite au coup d’Etat de 87 et personne ne peut ressusciter un tel cadavre. Le RCD n’a jamais été la continuité du PSD, c’est un hold-up juridique ayant permis à Ben Ali de mettre la main sur le patrimoine du PSD.Par contre, la philosophie bourguibienne, non seulement elle est toujours présente mais elle est d’actualité et d’une contemporanéité insolente !
Le Bourguibisme est une «doctrine» claire renfermant un projet de société moderniste compatible avec nos valeurs arabo-musulmanes. Je suis convaincu qu’un parti bourguibien « pur et dur » –fond et forme- pourrait s’imposer sur la scène politique et devenir le premier parti politique capable de faire face aux islamistes.
Nidaa Tounès a attiré dans son giron les bourguibistes parce que BCE est d’abord bourguibiste et ne renie en rien le bourguibisme. BCE n’a pas le courage de déclarer Nidaa Tounès comme un parti bourguibien craignant le départ de la gauche syndicale, seul lien avec l’UGTT. Nidaa Tounès ne pourra pas jouer éternellement sur l’ambiguïté, surtout si un parti bourguibiste fait surface. Il faut avoir le courage de revenir à la source et éviter de prendre en charge le passif du PSD.
Pour revenir à l’histoire du parti destourien, Bourguiba est entièrement responsable du Néo-Destour dès sa création jusqu’à 1964. Tous les bourguibiens assument la lutte pour l’indépendance et la stratégie qui a fait de la Tunisie un pays indépendant et souverain. Qui peut remettre en cause la République, le CSP, l’éducation pour tous, la gratuité des soins, le système des caisses des retraite, la politique de maîtrise de naissances, et tant d’autres réalisations structurantes dans tous les domaines? A cela, Bourguiba a mis les bases d’une politique étrangère juste et équilibrée ayant permis un rayonnement de la Tunisie à travers le concert des Nations.
De 1964 à 1987, le Néo-destour s’est transformé en Parti Socialiste destourien (PSD). Trois périodes importantes ont jalonné la vie du parti et de la Nation :
(1) période 1964-1969 – la construction économiques et industrielles- les ugttistes ont pris en charge la destinée et de la Nation à travers Ben Salah et son équipe. Ils ont introduit une politique franchement volontariste en matière d’investissement public ayant permis d’asseoir l’économie tunisienne par des réalisations structurantes dans tous les domaines. Le collectivisme irréfléchi et anarchique mené par cette équipe a vite tourné à la catastrophe et à la révolte populaire.
(2) période 1969-1981 – libéralisation de l’économie et son ouverture à l’environnement international – : les libéraux du PSD, à leur tête, Hédi Nouira, ont repris la relève et ont introduit une politique impliquant l’investissement privée dans la production ds biens et services et une option stratégique dans l’ouverture de la Tunisie au capital étranger à travers la loi dite de 1972 permettant à l’investisseur étranger d’utiliser la main d’œuvre tunisienne pour produire des biens destinés exclusivement à l’exportation. Une période caractérisé par des conflits sociaux et crise majeur avec la Libye. L’UGTT a joué un rôle ambigu dans cette période.
(3) 1981-1987 – la désintégration du système politique tunisien- Mohamed Mzali et son équipe arabisante a cherché à introduire une couche de démocratie dans la vie politique du pays sans faire les préalables nécessaires à savoir la mise à niveau du PSD. L’expérience a vite tourné au cauchemar. L’ouverture de la Tunisie au capital golfique est restée au niveau des intentions et déclarations des politiciens à quelques exceptions près. Cette période a été marquée essentiellement par une lutte acharnée pour le pouvoir qui a anticipé le coup d’Etat de 1987.
Dans les trois périodes, Bourguiba a joué beaucoup plus le rôle d’arbitre et de pompier que de président de l’Exécutif et de la République. Il était presque à l’écart. Ses interventions étaient rares voire absentes compte de son état de santé. En toute objectivité, Bourguiba n’était que comptable et un spectateur actif de ses 20 dernières années du pouvoir qui correspondent exactement à la période de son mariage avec Wassila Ammar. Un hasard intriguant !
Donc, le bilan bourguibiste ne concerne que la période comprise entre la date de création du Néo-Destour et la date du congrès de Bizerte en 1964 mettant en sourdine l’intervention directe de Bourguiba dans l’action publique.
Seul l’héritage bourguibien rénové peut mobiliser la masse et battre les obscurantistes et les salafistes qui cherchent à « balancer » la Tunisie au 6ème siècle !
(Photos: Di)