Santé : Comment le cannabis altère la mémoire de travail

La mémoire de travail, celle qui permet de réfléchir, lire, calculer…est altérée chez les personnes ayant consommé des drogues à base de cannabinoïdes. Dans la revue Cell, l’équipe de Giovanni Marsicano (unité Inserm 862 “Neurocentre Magendie” à l’université Bordeaux Segalen), en collaboration avec l’équipe de Xia Zhang à l’université de Ottawa (Canada), montre pour la première fois par quel mécanisme ces substances ont un effet délétère sur les connexions entre les neurones du cerveau.

L’un des effets majeurs de l’intoxication aux cannabinoïdes, composés que l’on retrouve dans la feuille et la fleur de cannabis, est une altération de la mémoire de travail, à la fois observée chez l’homme et l’animal. La mémoire de travail permet de réaliser des opérations cognitives courantes (réfléchir, lire, écrire, calculer…) sur des informations stockées temporairement. Elle est responsable de l’intégration des informations sonores, visuelles et spatiales. Les mécanismes cellulaires à l’origine des effets délétères du cannabis sur ce processus de mémorisation étaient inconnus à ce jour.

Les cannabinoïdes agissent sur le cerveau via “les récepteurs cannabinoïdes”. Dans cette étude, l’équipe de recherche s’est penchée sur le récepteur CB1, particulièrement abondant au niveau des terminaisons nerveuses du cerveau. Il est présent à la fois sur la membrane des neurones mais aussi sur la membrane de cellules dites “astrogliales” de l’hippocampe et qui servent de support aux neurones.

Pour découvrir les mécanismes d’action des cannabinoïdes, les chercheurs ont évalué la mémoire de travail spatiale chez l’animal en présence de THC (le cannabinoïde le plus connu). Deux groupes de souris, chez lesquelles les récepteurs CB1 ont été supprimés respectivement sur les cellules astrogliales ou les neurones, ont été étudiés.

Giovanni Marsicano, chargé de recherche Inserm et ses collaborateurs du Neurocentre Magendie (unité Inserm 862/université bordeaux 2) montrent que les récepteurs CB1 localisés au niveau des cellules astrogliales sont responsables des effets délétères du THC sur cette forme de mémoire. Une fois liés à leurs récepteurs, les cannabinoïdes, diminuent la force des connexions entre les neurones au niveau de l’hippocampe, ce qui perturberait la mémoire de travail.

“Ces résultats montrent de façon surprenante, in vitro et in vivo, l’importance de l’activation des récepteurs CB1 des cellules astrogliales, et non ceux des neurones, dans la médiation des effets des cannabinoïdes sur la mémoire de travail” explique Giovanni Marsicano.

Selon les chercheurs, la description des mécanismes d’action spécifiques des cannabinoïdes au niveau de l’hippocampe permettra d’optimiser leur potentiel d’utilisation thérapeutique, aujourd’hui limité par d’importants effets indésirables associés à leur consommation.

(Source AFP)

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