Les experts présents aux colloque “le dividende démographique en Tunisie: réalités et projections”, organisé, mercredi à Gammarth, par l’Office national de la famille et de la population (ONFP), ont affirmé que la Tunisie a réussi sa transition démographique mais n’en a pas profité sur le plan socio-économique.
Mohamed Ali Ben Zina, enseignant chercheur en démographie a indiqué que la population active (15-59 ans) est la catégorie d’âge la plus importante en Tunisie (64,5% de la totalité de la population). La Tunisie aurait pu avec un tel pourcentage réaliser une croissance importante, a-t-il dit.
Accusant les politiques d’emploi et de développement, il a expliqué que la population tunisienne tend vers le vieillissement (la population âgée de 60 ans et plus est passé de 9,3% en 2004 à 11,7% en 2014), ce qui aura, selon lui, des conséquences négatives sur les caisses sociales, notamment en termes de versement de pensions de retraite.
“La Tunisie a atteint, depuis les années 2000, un dividende démographique permettant d’atteindre le potentiel de croissance économique”, a-t-il ajouté, faisant savoir que cette fenêtre démographique positive dure généralement une vingtaine d’année avant de commencer a s’inverser.
Il a mis l’accent sur la stabilité du taux brut de natalité (autour de 18 et 19 pour 1000 naissances depuis l’année 2000), du taux brut de mortalité (autour de 6,5 et 6,3 pour 1000 habitants depuis l’année 2000) et de l’indice synthétique de fécondité (autour 2,08% et 2,14% depuis l’année 2000).
Ben Zina a appelé à analyser les conséquences de cette transition démographique, notamment en termes de vieillissement progressif de la population, du recul de l’âge du mariage pour les deux sexes, du prolongement du célibat, de la sexualité et des comportements à risques chez les jeunes, ainsi que de l’accès des jeunes à la contraception et aux services de qualité de la santé sexuelle et reproductive.
De son côté, Ahmed Khouaja, directeur du département de sociologie à la faculté des sciences humaines et sociales de Tunis, a mis en exergue les nouveaux phénomènes socio-politiques liés au dividende démographique, notamment l’émigration clandestine (30 mille émigrants clandestins enregistrés depuis l’indépendance) et l’abandon scolaire (600 mille élèves ont abandonné l’école depuis l’indépendance).
“Il faut une approche multidimensionnelle et multisectorielle pour remédier à ces phénomènes”, a-t-il conclu. Quant à Bechir Maghrébin, enseignant chercheur à la faculté des sciences humaines et sociales de Tunis, il a affirmé que la transition démographique en Tunisie est confrontée à deux problèmes: l’homogénéisation des comportements démographiques et les disparités régionales.
Mettant l’accent sur le déséquilibre en termes d’accès à la santé, l’éducation, le développement et l’emploi, il a indiqué que les experts parlent de disparités entre “le littoral et le désert en Tunisie”. Pour sa part, le chercheur Adel Bousnina a indiqué que la régression de l’accroissement démographique en Tunisie (de 1,21% en 2004 à 1,03% en 2014) à exercé “une pression sur le marché de l’emploi”, faisant savoir que “72% de l’émigration en Tunisie est due au chômage”.
Par ailleurs, il a fait savoir que la population tunisienne se répartit comme suit : 36,9% célibataires, 5,2% veufs, 56,6% mariés et 1.3% divorcés.
Les experts et chercheurs ont indiqué que les politiques socio-économiques n’ont pas réussi à tirer profit du dividende démographique, faisant savoir que l’inversement de la courbe démographique aura des répercussions néfastes sur la croissance ainsi que sur la situation, déjà difficile, des caisses sociales.