D’après certaines informations sorties des arcanes du palais présidentiel algérien, il paraîtrait que Béji Caïd Essebsi aurait sollicité le président algérien pour approuver un gouvernement d’unité nationale qui départagerait les postes ministériels entre Nida et Nahdha. Lui-même, faute d’occuper le poste de président qu’il briguait -sans le dire ouvertement- se suffirait de reprendre celui de Premier ministre.
BCE se serait, la veille de sa visite en Algérie, dimanche 17 novembre, entretenu avec Hassine Abbassi, secrétaire général de l’UGTT, mais ne lui avait pas glissé mot de son audience avec le président algérien! C’est dire à quel point les intérêts nationaux sont discutés entre nationaux dans la transparence, la cohérence et l’attachement aux mêmes objectifs, soit sortir le pays de l’ornière dans laquelle il se débat depuis des mois.
Le dialogue national a échoué, reconnaissons-le, même si les politiques veulent taire leur incapacité à gérer les affaires du pays.
Nidaa Tounes ne paye plus de mine et perd de plus en plus du terrain. Pour les observateurs étrangers, «ce parti a montré le véritable visage d’un parti qui broie ses hommes, qui manque de cohésion et d’efficience sur le plan politique». Cette machine a semé la confusion sur l’échiquier politique national. Se faisant passer pour une alternative, elle a compliqué encore plus la dynamique politique en Tunisie. La valse des positions d’Essebsi et l’ambiguïté de ses déclarations allant de «Je m’entends bien avec Ghannouchi» à la «Ennahdha est incontournable», «la Constituante n’est plus légitime mais il y garde ses députés» jusqu’à, selon des bruits persistants, négocier un partage du pouvoir… ce n’est pas rassurant pour le peuple qui rêve d’un leader visionnaire, courageux, audacieux, patriote et constructif.
Ghannouchi, de passage, sur sa demande, à la présidence algérienne, aurait été débouté par Boutef. Il voulait des garanties pour être épargné et ses disciples, même dans le cas de preuves tangibles les incriminant, de toutes représailles, jugements, ou évaluation au cas où ils quitteraient le gouvernement… Mieux encore, il voulait s’assurer que rien ne pourrait atteindre le mouvement Ennahdha ou mener à sa dissolution comme ce fut le cas du RCD.
L’expérience égyptienne ne devrait en aucun cas se reproduire en Tunisie, d’autant plus que son rêve aujourd’hui est réalisé, puisque la Tunisie se transforme de plus en plus en un fief des Frères musulmans venus de tous horizons, soit une nouvelle “Internationale islamiste“ qui plus est, a un allié de taille en Libye en la personne de Abdelhakim Belhaj qui promettrait fonds et armes. A qui? Et pourquoi faire?
En un mot, qu’il s’agisse de BCE ou de Ghannouchi, les intérêts personnels ou partisans priment sur ceux du pays et c’est d’autant plus décevant venant du président de Nidaa Tounes, car des centaines de milliers de Tunisiens croient encore que leur salut viendrait de lui et de ce parti qu’ils voient comme l’arche de Noé.
La Tunisie peut-elle être perçue comme un pays réellement souverain lorsque nous voyons la «danse du ventre» des dirigeants politiques allant d’une chancellerie à une autre et les déplacements de plus en plus fréquents de ses leaders dans des pays comme les USA, l’Algérie, la France et même la Grande-Bretagne pour demander conseil ou soutien? Serions-nous, sans que nous le sachions, un pays sous multiples mandats politique et sécuritaire?
Lorsque l’Association de la pensée bourguibienne avait organisé, il y a deux années à Monastir, la grande rencontre qui avait rassemblé les destouriens de tous bords dans une tentative désespérée de remettre en scelle un parti qui avait été sciemment «liquidé», personne ne pensait qu’elle donnerait un second souffle et un nouvel élan à Béji Caïd Essebsi pour reprendre la main sur la scène politique tunisienne.
Ceux qui pensaient que BCE allait jouer au tuteur et fédérateur se sont très vite remis de leurs illusions; Essebsi veut guider, diriger, présider mais pas se limiter au rôle du «Sage», conseillant, orientant et arbitrant.
Aujourd’hui, les leaders politiques sont considérés par une grande partie de la classe moyenne tunisienne comme des vendeurs de mots et perçus comme la cause de tous les maux dont souffre notre pays. Normal, tous ceux qui opèrent sur le terrain politique veulent devenir des présidents ou des Premiers ministres.
Mais dans toute cette «chakchouka», la plus grande déception reste, pour le Tunisien lambda, BCE, pour lequel il vouait une confiance aveugle. BCE que l’on n’arrive plus à situer politiquement. Se présente-t-il avec son parti en tant qu’alternative à Ennahdha qui a échoué tous azimuts? Ou plutôt veut-il partager le pouvoir et les postes avec le parti islamiste?
Nombre de questions qui se posent et qui ne rassurent nullement ni les nationaux ni les internationaux.
A suivre