Le Collectif de défense dans l’affaire d’assassinat de Chokri Belaîd a affirmé, mardi, que les dossiers sont toujours ouverts et qu’ils ne seront pas clos avant de traduire en justice toutes les personnes impliquées dans ce meurtre. Le Collectif a fait appel du jugement rendu, le 26 mars dernier, en première instance contre 23 accusés .
Koutheir Bou Allègue, membre du comité, a affirmé lors d’une conférence de presse organisée, ce mardi à Tunis, sous le slogan « le Verdict et après ? » que le jugement prononcé concerne les auteurs seulement et que la division de l’affaire en deux (une affaire contre le groupe qui a planifié l’assassinat et une autre contre les personnes qui ont exécuté » était une décision prise par le juge d’instruction, le 14 juin 2014.
Selon Boualllègue, la chambre criminelle près le tribunal de première instance devrait entamer le jugement d’une partie du groupe de planification et une partie du groupe qui a favorisé l’impunité . L’affaire porte sur la planification d’opérations d’assassinat d’un groupe de politiciens et de personnalités nationales dont Chokri Belaîd.
Le dossier concerne plusieurs partisans d’Ennahdha dont Taher Boubahri, conseiller de Ali Laarayedh, Mostafa Khedhr, Kamel Laifi, Hichem Cherbib, Ali Ferchichi et Belhassen Naccache en plus de trois cadres sécuritaires qui occupent des postes de responsabilité au sein du ministère de l’Intérieur.
Bouallègue a aussi annoncé le démarrage des audiences dans l’affaire de l’appareil secret par le pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme.
Ces audiences concernent 35 individus soupçonnés d’appartenir à l’appareil secret d’Ennahdha en plus de cadres sécuritaires. Parmi les personnes accusées , figurent Rached Ghannouchi, Samir Hannachi, Fethi Beldi, Kamel Laifi, Kamel Bedoui et le conseiller sécuritaire de Rached Ghannouchi.
Bouallègue a rappelé que Mostafa Khedhr a écopé d’une peine de prison dans le cadre de l’affaire Chokri Belaid et est accusé dans le cadre de l’affaire de l’assassinat Mohamed Brahmi en plus de Ameur Belaazi et Mohamed Akkari.
L’avocat a, dans ce contexte, affirmé que de nouvelles informations ont été révélées lors des audiences et que de nouvelles investigations ont été ouvertes à la demande du pôle de lutte contre le terrorisme en février dernier.
Imen Gzara, membre du comité de défense a pour sa part affirmé que la contestation de la décision de la justice a pour but de poursuivre ceux qui n’ont pas encore été condamnés et de garantir l’application de peines complémentaires qui pourraient conduire à la révélation de la vérité et des motifs de l’assassinat de Chokri Belaid.
Ennahdha et Ansar Achariaa pointés du doigt
Gzara a mis en garde contre la dangerosité des terroristes condamnés au double plan national et international. Ce groupe de 23 personnes qui représente la partie de l’exécution, comporte 6 dirigeants qui appartiennent à l’appareil secret d’Ennahdha et qui seront jugés le 30 avril courant.
Elle a, dans ce contexte, salué la position de la justice tunisienne face aux dépassements commis par l’ancien juge d’instruction Bechir Akremi qui a innocenté 12 accusés et remis en liberté des membres dangereux, citant notamment, Mohamed Amri et Ahmed Melki, connu sous le nom de Soumali.
Gzara a affirmé que des investigations en cours pourraient révéler des liens entre certains avocats et des individus appartenant à l’organisation Ansar Chariaa.
D’après elle, les audiences entamées, le 6 février dernier, ont permis de rouvrir de nouvelles investigations sur l’implication dans la décision d’assassinat, de Ridha Barouni, un cadre du mouvement Ennahda, et de Noureddine Gandoz, qui est également membre du mouvement depuis 1991. “Ce dernier était présent lors de la réunion de planification et sa décision avait été déterminante dans l’élimination du martyr Chokri Belaïd”, apprend-on de même source.
Sami Ben Ghazi, membre du comité de défense, a, quant à lui affirmé que les personnes condamnées dans l’affaire Chokri Belaid appartiennent à l’organisation Ansar Achariaa et peuvent être réparties sur 5 groupes ayant des points de contact principalement par le biais des mosquées, dont principalement la mosquée Errahma à cité El Khadhra.
Il a également cité l’accusé Mohamed Awadi, condamné à mort et à 105 ans de prison. Ce dernier serait le chef de la branche armée de l’organisation. Il aurait pris la direction après la fuite d’Abou Iyadh en 2013, classé comme le deuxième homme le plus important d’Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI).
Il a également indiqué que Mohamed Akkari, condamné à mort et à 120 ans de prison dans cette affaire, était le chef de la branche sécuritaire de l’organisation. Il aurait reçu une formation en Irak, avant d’être incarcéré à la prison d’Abou Gharib. Akkari avait admis lors de son interrogatoire avoir surveillé des personnalités politiques, médiatiques et publiques (Taieb Baccouche, Sofiane Ben Farhat, Olfa Youssef, et d’autres) afin de recueillir des informations sur eux en vue de les assassiner.
Les assassins, enfin écroués
Le 26 mars dernier, quatre accusés dans le procès pour l’assassinat de l’opposant de gauche Chokri Belaïd ont été condamnés à mort. Au total, 23 personnes avaient été inculpées pour l’assassinat, dans sa voiture et devant son domicile, le 6 février 2013, de cet avocat de 48 ans, critique virulent d’Ennahdha, à l’époque au pouvoir.
Après 15 heures de délibération et 11 ans d’enquêtes et procédures judiciaires, le tribunal de première instance de Tunis a également condamné deux accusés à la prison à perpétuité, avait annoncé en direct Aymen Chtiba, procureur général adjoint du pôle judiciaire antiterroriste.
Des peines de 2 à 120 ans d’emprisonnement ont aussi été prononcées pour d’autres inculpés tandis que cinq individus ont été acquittés, même s’ils restent poursuivis dans d’autres affaires.