Mohamed Goumani, membre du bureau exécutif et président de la Commission de gestion de la crise politique au mouvement Ennahdha, estime que le décret présidentiel n° 2021-117 du 22 septembre 2021, relatif aux mesures exceptionnelles, “constitue une réelle suspension de la Constitution de 2014”.
“Il s’agit d’une organisation temporaire des pouvoirs montrant une volonté manifeste de la part du chef de l’Etat de détenir le pouvoir absolu et de modifier le régime politique dans son intégralité de manière individuelle, sans aucune intention de faire participer les partis politiques, ni les organisations nationales ou encore les forces vives du pays”, a-t-il dit.
Cité par l’agence TAP, jeudi 23 septembre 2021, Goumani indique qu'”en prenant cette décision, le chef de l’Etat s’est placé dans une position de coup d’Etat flagrant contre le processus démocratique et les principes de la révolution”.
Ainsi, a-t-il poursuivi, s’ajoute aux problèmes complexes du pays la question de la légitimité du pouvoir à l’avenir, ce qui menace l’unité du pays et le propulse dans une situation à haut risque et inédite.
“La Constitution de 2014 qui peut être amendée”
Goumani a, par ailleurs, déclaré que le bureau exécutif du mouvement Ennahdha, réuni après la publication, dans la soirée du mercredi 22 septembre, du décret présidentiel relatif aux nouvelles mesures exceptionnelles “refuse cette démarche”, soulignant l’attachement du mouvement à la Constitution de 2014 qui “peut être amendée”, admet-il au passage.
Il a fait part de la disposition d’Ennahdha à contribuer à sa révision à travers le dialogue et les mécanismes constitutionnels disponibles.
Recours au Tribunal administratif…
“Ennahdha appelle toutes les forces vives à passer, temporairement, outre les conflits secondaires et axer les efforts sur la défense de l’unité du pays afin de le préserver des dangers du discours de la division utilisé par le président de la République et ceux qui prétendent être ses partisans”, a-t-il encore souligné.
Mohamed Goumani a fait savoir, par ailleurs, que le mouvement a déposé, depuis le 25 juillet, des recours auprès du Tribunal administratif contre les mesures exceptionnelles, précisant qu’Ennahdha va entamer des concertations intensives avec les acteurs politiques pour coordonner les efforts et défendre la démocratie et la Constitution.
“Malgré les nombreuses erreurs commises cette dernière décennie, il n’est pas envisageable de retourner à la tyrannie et sacrifier le sang des martyrs”, a-t-il affirmé.
La triche…
Goumani a déclaré que le président de la République a “effectivement annulé toutes les instances de contrôle, maintenu le gel du parlement et suspendu les indemnités et avantages des députés et du personnel du parlement sans, pour autant, dissoudre le parlement”.
“Cela dénote un certain embarras de la part du chef de l’Etat qui continue d’adopter la méthode de la triche, puisqu’il annule la Constitution et déclare qu’il s’attache à celle-ci pour certains aspects”, a-t-il déploré.
Le président de la République Kais Saied a promulgué, mercredi soir, un décret présidentiel (n°2021/117) portant sur de nouvelles mesures exceptionnelles.
Il a décidé de maintenir toutes les activités du Parlement suspendues, maintenir la levée de l’immunité parlementaire des députés, suspendre toutes les indemnités et avantages accordés au président du parlement et ses membres et supprimer l’instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi.