Sommet de la Francophonie : Ce que doit Béji Caïd Essebsi à Bourguiba et aux Tunisiennes

S’il doit beaucoup à son intelligence et sa capacité de convaincre les foules et des fois à les manipuler pour des raisons que, généralement, il est le seul à connaître, BCE, le président de la Tunisie, doit beaucoup aussi aux femmes et à son héritage bourguibien.

Emmanuel Macron, le chef de l’Etat français, n’a pas manqué d’y faire allusion lors de son allocution à l’occasion du 17ème sommet de la Francophonie à Erevan, capitale de l’Arménie.

En effet, Macron a loué les mesures prises par BCE pour consolider les droits des femmes en Tunisie. Ceci dit, il faut rappeler que Béji Caïd Essebsi doit beaucoup à l’électorat féminin dans sa victoire aux législatives en tant que président du parti et à la présidentielle de 2014. Des femmes qui attendaient de lui qu’il rende la Tunisie aux Tunisiens -d’histoire, de cœur et de savoir- et non de signer un consensus avec ceux qui ne voient dans la Tunisie qu’un islam extrémiste et rétrograde.

Aujourd’hui, le mal fait à l’Etat tunisien est pire que celui qu’il a accusé lors du règne de la Troïka. La déception des Tunisiens, et particulièrement des Tunisiennes, malgré toutes les lois promulguées dont certaines n’ont pas encore été adoptées par le Parlement, est grande.

Le président français n’a pas, pour une fois, parlé de transition politique démocratique, de consensus ou d’islam modéré. Il a limité ses propos à une lutte menée par BCE contre les obscurantistes qui tiennent en otage tout un continent.

«Je veux ici souligner le courage du président Essebsi, qui, alors que nous vivons la montée des obscurantismes, la montée de celles et ceux qui veulent enfermer tout un continent dans une lecture déformée d’une religion, s’est dressé et avec courage, a pris encore ces dernières semaines des textes fondamentaux pour les droits des femmes, a-t-il déclaré. C’est le droit à être libre, le droit dans le mariage, le droit dans l’héritage alors que tous les autres avaient peur, alors que les obscurantistes disaient de ne pas faire, le président Essebsi l’a fait, et nous devons le soutenir dans ce combat et nous serons là. … Ne cédez rien ! Ne cédez rien dans ce combat, vous venez d’un pays où l’indépendance a été faite par un grand président qui a éduqué les femmes et les hommes, qui a éduqué les petites filles et les garçons. Vous venez d’un pays qui a été un exemple dans la francophonie et dans la conquête de l’Afrique. Vous venez d’un pays qui nous rend fiers et nous a rendus fiers. Alors nous continuerons à être là».

Ces propos expriment-ils un léger virage de l’Etat français concernant ses positions antérieures qui ont toujours exprimé un soutien sans failles à l’islam politique «démocratique» et ses acteurs en Tunisie ?

La large couverture médiatique de la dernière conférence de presse organisée par le Front populaire (FP) à propos des assassinats de Chokri Belaïd et de Haj Mohamed Brahem prouve un regain d’intérêt de la presse français pour la politique intérieure tunisienne et particulièrement le parti Ennahdha. Mais nous ne pouvons en aucun cas y déceler plus de clarté dans les postures de la France vis-à-vis de l’islam politique.

Cette ambiguïté est-elle voulue en attendant que la scène politique tunisienne devienne plus facile à décrypter et savoir vers qui penchera le rapport de force ?

Nous ne perdons rien à attendre !

Par contre, l’image de BCE sera toujours rayonnante à l’international grâce aux femmes et à l’héritage bourguibien.

A.B.A