JCC2017-Carte Blanche : Sur les traces de Frantz Fanon

A l’occasion de la 28 ème édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC, 4-11 novembre 2017), une conférence ayant pour thème “Sur les traces de Frantz Fanon ” a été organisée lundi matin à l’hôtel Le Majestic-Tunis, conjointement par TV5 Monde et les JCC. Au cours de cette conférence, Medhi Lallaoui réalisateur, scénariste et écrivain, a présenté un extrait de son film sur Fanon, “un projet qui a été conçu depuis 15 ans et qui prendra finalement forme dans une année ” a-t-il indiqué.

Dans cet extrait, qui retrace le parcours de Frantz Fanon à Tunis entre 1957 et 1961, Marie-Jeanne Manuella, qui fut l’assistante du psychiatre et essayiste antillais évoque le souvenir de l’homme déroutant qu’elle a connu : psychiatre fervent de l’anti-psychiatrie, penseur, essayiste en vue, Nègre tonnant contre la négritude, révolutionnaire, militant anticolonialiste, très engagé en faveur de la cause algérienne et aux côtés des peuples du tiers-monde.

A la fin de la projection, Alice Cherki, biographe de Frantz Fanon, enchaine avec une communication plus profonde, plus documentée. Elle a évoqué un Fanon qui, dès son arrivée à Tunis, a occupé un poste à l’hôpital de la Manouba et qui a eu de surcroît la charge de combattants algériens traumatisés. Alice Cherki, qui viendra le rejoindre en tant qu’interne, souligne à quel point il aimait profondément le travail clinique et institutionnel de la psychiatrie.

Elle a affirmé qu’il a essayé d’introduire la sociothérapie dans cet asile comme il l’avait fait à Blida. On apprend que Fanon a aussi eu l’occasion d’expérimenter une structure nouvelle, le Centre neuropsychiatrique de jour à l’hôpital Charles Nicolle.

Elle a dressé le portrait d’un homme indivisible qui ne saurait être réduit à une dimension particulière des luttes: il a été antiraciste au nom de l’universalité et anticolonialiste au nom de la justice et des libertés. Fanon, l’un des penseurs de la révolution algérienne, lisait Marx avec les yeux de Freud et Freud avec ceux de Marx, il se situait hors de toute réduction dogmatique ou d’interprétation doctrinale.

Progressiste et anti-impérialiste sans référence “théologique” au marxisme proche mais sans obédience aucune au camp socialiste. Un homme qui a décrit, avec des années d’avance, la pathologie néocoloniale, cette perpétuation de la domination par la soumission de gouvernements nationaux corrompus et antipopulaires aux intérêts des anciennes métropoles coloniales.

Le débat qui a suivi son allocution a permis à la salle d’échanger davantage sur l’œuvre de Frantz Fanon et d’avoir plus de détails sur son passage à Tunis.