Tunisie : Al Bawsala appelle à l’abandon de la loi sur la répression des atteintes aux forces armées

L’organisation Al bawsala a appelé à la nécessité d’abandonner définitivement le projet de loi sur la répression des atteintes aux forces armées, mettant en garde contre toute atteinte à l’intégrité du système juridique.

Dans une déclaration publiée mercredi, l’organisation affirme rejeter ce projet « pour sa méconnaissance des fondamentaux du droit pénal, son non respect de toute logique juridique et du fait qu’il constitue une grave menace pour les droits et libertés fondamentales consacrés par la Constitution de janvier 2014 ».

Pour Al Bawsala, ce projet de loi repose dans sa majeure partie sur une liste d’infractions qui constituent des atteintes contre les forces armées et qui visent leur personne, leurs biens ou les institutions et édifices sécuritaires et militaires.

Et de noter qu’il apparaît après simple lecture du code pénal que ces atteintes sont déjà incriminées et mentionnées aux chapitres des attentats contre la sûreté intérieure de l’Etat et des attentats contre l’autorité publique commis par les particuliers.

Et si le cadre existant était jugé insuffisant, Al Bawsala considère qu’il serait plus opportun d’amender le code mentionné ci- avant et d’alourdir les sanctions lorsque les atteintes ciblent les agents des forces armées.

Il est également pertinent de mentionner que l’Assemblée des Représentants du Peuple a d’ores et déjà entamé les débats autour du projet de loi de lutte contre le terrorisme et l’interdiction du blanchiment d’argent et que ce projet traite déjà des infractions ciblant les agents des forces armées en appliquant des peines plus lourdes que celles prévues par la législation pénale, note l’organisation.

Al Bawsala considère ainsi que le code pénal comme cadre de principe et la loi sur la lutte contre le terrorisme en tant que seule exception, suffisent à réprimer les atteintes auxquelles les agents des forces armées risquent de faire face. L’organisation signale aussi que ce projet fait état de nombreuses lacunes qui le rendent incohérent du point de vue de la logique juridique.

Elle cite, notamment, les articles 5 et 6 qui distinguent entre une personne disposant d’une habilitation et celle qui n’en dispose pas au moment de la commission l’infraction de divulgation de secrets de défense nationale.

Ces deux articles appliquent la même sanction, ce qui rend la distinction obsolète. De plus, ajoute-t-on de même source, le projet de loi se veut plus sévère que le code pénal à l’encontre des infractions considérées comme menaçant « la stabilité de la société dans son ensemble ».

Or, le code pénal réprime déjà ces infractions, et y applique en plus des sanctions qui sont plus lourdes que celles prévues par ce projet de loi. Al Bawsala estime par ailleurs, que cette loi reflète une volonté délibérée de restreindre les droits et libertés. Elle cite l’article 12 « Est puni de deux ans d’ emprisonnement et d’une amende de dix mille dinars, quiconque dénigre délibérément les forces armées dans le but de nuire à la sécurité publique ».

L’organisation critique aussi l’absence totale de définition de la notion de « dénigrement », qui apparaît vague, opaque et absolue, laisse libre cours à l’interprétation et permet de restreindre la liberté d’expression garantie par l’article 31 de la Constitution.

Elle appelle les députés à s’opposer à cette loi et le gouvernement (les ministères de la Justice et de l’Intérieur particulièrement) à porter plus d’attention aux détails et contenus des textes juridiques qu’il approuve et transmet à l’Assemblée des Représentants du Peuple.

Al Bawsala exhorte les deux ministères à mettre au point une stratégie claire et une politique cohérente pour garantir la sécurité et la stabilité, sans atteinte à l’essence des droits et libertés individuelles. Elle insiste, également, sur la nécessité d’amender le Code pénal pour l’harmoniser avec la nouvelle Constitution et la politique pénale qu’exigent un Etat de Droit et les standards minimums de démocratie.