Alors que Béji Caïd Essebsi, président de la République, s’apprêtait à décorer le quartet pour les efforts qu’il a déployés afin de sortir le pays d’une crise politique aiguë, il a été interrompu, en ce mercredi 14 janvier, par les cris stridents et les huées de certains invités parmi les familles des martyrs.
Une évidence que celle de reconnaître qu’une vie humaine n’a pas de prix et que tous les dédommagements du monde ne peuvent compenser la douleur des parents et des familles qui ont perdu l’un des des leurs. Et dans le cas tunisien, il est tout de même utile de rappeler que la vague des premiers martyrs n’a pas dépassé la centaine, que le plus grand nombre des victimes de la “Révolution” sont morts dans les jours qui ont succédé au départ de l’ancien président et que parmi elles figurent des délinquants qui ont attaqué des centres commerciaux, des établissements et des biens publics jusqu’aux postes de police et de la garde nationale. Ceci pour qu’il n’y ait pas d’amalgame entre les jeunes militants morts parce que défendant un idéal de liberté et dignité et revendiquant une meilleure qualité de vie pour eux, leurs familles et leurs régions, et d’autres délinquants multirécidivistes et dangers publics.
Même si rien ne justifie le recours au tir à balles réelles. Malheureusement dans le chaos que traversait le pays à l’époque, tous les dépassements étaient possibles. Rappelons que dans des pays comme les Etats-Unis, la France ou la Grande-Bretagne qui financent les organisations défendant les droits de l’Homme, le recours à la force est légalisé et appliqué dès qu’il y a des menaces sur la sécurité des personnes et risques sérieux sur les biens et l’ordre publics.
En Tunisie, où Marzouki, qui fut désigné président par Ennahdha en 2011, a instauré la tradition d’inviter 500 membres des familles des martyrs chaque année, le populisme a pris le pas sur le prestige et l’autorité de l’Etat. Le palais de Carthage grâce à lui et ses compères est devenu un lieu de rencontre d’où a disparu tout le superbe et l’éclat d’un symbole de souveraineté nationale : le Palais présidentiel.
Un Palais qui a été aujourd’hui le théâtre de troubles qui s’apparentent plus à une émeute qu’à des protestations exprimant un sentiment de révolte de familles injustement traitées auxquelles justice n’a pas été rendue.
Nous avons entendu des femmes pousser des cris stridents, des insultes et même un père meurtri reprocher à BCE de ne pas avoir cité le nom de son fils alors qu’il avait cité celui de feu Chokri Belaïd! Comme si le président fraîchement élu pouvait citer les 365 noms des martyrs de la “Révolution”!
Durant ces 3 dernières années ces mêmes personnes assistaient sagement au discours de Marzouki ensuite à la réception qu’il organisait en leur honneur et repartaient aussi sagement chez elles.
Pourquoi pareils incidents, alors que pour la première fois depuis 4 ans, le 14 janvier est célébré par un président élu par le peuple et le provisoire prend fin pour céder place au pouvoir permanent?
Marzouki est parti, son administration est restée. L’agitation causée aujourd’hui par certains individus a-t-elle été spontanée ou fomentée sciemment pour nuire au nouveau président et susciter des réactions brutales de la part du personnel sécuritaire? Pire nuire à l’image du pays et la présidence devant un parterre de diplomates étrangers et de médias?
Les responsables devraient être identifiés et sanctionnés. Il s’agit de l’Etat et d’une fête nationale quelles que soient les personnes aujourd’hui en haut de la pyramide de l’Etat.
Ces incidents devraient également sonner le glas des pratiques instaurées par le provisoire qui n’a jamais été un homme d’Etat et ce pour au moins 3 raisons :
– le 14 janvier est la fête de la Révolution et non celle des martyrs,
– les familles des martyrs ont été dédommagées et ont accepté les dédommagements qu’on leur a accordés,
– elles ont le droit de connaître la vérité sur les meurtriers de leurs enfants mais pas de manquer de respect à l’institution présidentielle et nuire à l’image du pays.
La célébration du 14 janvier que l’on voulait cette année sobre, raffinée et prestigieuse au travers d’une décoration toute simple du podium par les drapeaux et l’Insigne de l’Etat, a tourné au vinaigre à cause de l’incivilité et des comportements irresponsables de certaines personnes. Lesquelles personnes, manipulées ou non, ont réussi à rompre le charme d’une fête que l’on voulait inédite.