La promotion médicale et pharmaceutique est très vulnérable à la corruption” révèle une étude sur l’évaluation de la transparence du secteur pharmaceutique public en Tunisie, réalisée en 2012 et dont les résultats ont été publiés récemment.
Cette étude réalisée dans le cadre du programme de bonne gouvernance, initié par le ministère de la santé en collaboration avec l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), a concerné huit segments du circuit du médicament, appelés “sections ou fonctions” et qui sont l’enregistrement des médicaments, l’octroi des licences d’exploitation, l’inspection pharmaceutique, les essais cliniques, la sélection des médicaments faisant partie de la liste des médicaments essentiels, l’approvisionnement et la distribution.
Cette évaluation a démontré aussi que l’inspection, les essais cliniques et la sélection de la liste des médicaments essentiels sont modérément vulnérables à la corruption alors que l’enregistrement, l’octroi des licences d’exploitation, l’approvisionnement et la distribution sont marginalement vulnérables à la corruption. la faible vulnérabilité des deux extrémités de la chaîne administrative de gestion du médicament (l’enregistrement, l’octroi des licences d’exploitation d’un côté, et l’approvisionnement et la distribution, de l’autre) serait due, selon l’étude, à la force des lois organisant ces sections et à l’importance du contrôle de l’Etat.
Cette étude souligne que, les sections centrales (promotion, Essai cliniques et sélection ) sont plus vulnérables à la corruption parce que l’organisation du système et les législations en vigueur ont la propension de servir les intérêts de l’industrie pharmaceutique. l’étude a montré qu’en contrôlant le processus des essais cliniques, l’industrie définit l’orientation du marché pharmaceutique et en exploitant la promotion, elle réalise ses objectifs commerciaux et financiers qui sont différents de ceux de la communauté et des autorités sanitaires.
Ces deux sections constituent, d’après l’évaluation, les moyens de mise en oeuvre des stratégies visant à inhiber les politiques d’usage rationnel du médicament, en brouillant le processus décisionnel par les conflits d’intérêt et dans certains cas internationaux extrêmes, par la corruption.
Ces résultats sont concordants entre les secteurs public et privé pour les sélections relatives à l’octroi des licences d’exploitation, l’inspection, la promotion, les essais cliniques et l’approvisionnement.
Par ailleurs, l’étude a démontré une surestimation de la transparence dans le secteur public relative à la sélection et à la distribution qui serait due au caractère administratif de ces sections, notant en revanche une sous -estimation de la transparence de l’enregistrement dans le secteur privé. 130 informateurs clés sont interviewés dans cette évaluations dont 66 représentants du secteur public et 64 représentants du secteur privé. La moyenne était de huit interviewés par fonction et par secteur.
En raison de leurs caractères administratif et techniques, seules les fonction de l’enregistrement et de l’inspection ont enregistré un nombre d’informateurs clés représentants le secteur public (9) supérieur à celui du secteur privé (8).
Cette étude a ciblé la transparence du système comme mesure indirecte de la prévention du risque de corruption dans le secteur pharmaceutique en Tunisie, et l’évaluation de son degré de vulnérabilité à la corruption et /ou aux pratiques non-éthiques dont les résultats sont collectés sous forme d’un rapport d’évaluation.
L’étude a formulé des recommandations générales et particulières qui ont mis l’accent, notamment, sur l’importance de regrouper toutes les structures technico- administratives en une agence de la pharmacie et du médicament, d’impliquer la société civile dans les différentes instances décisionnelles, de développer pour l’ensemble des fonctions les outils nécessaires pour assurer la confidentialité des données non divulguées ainsi que des codes de conduite pour le personnel administratif et les experts.
Ces recommandations ont souligné ,notamment, l’utilité de spécifier les délais de l’enregistrement des médicaments et d’en réviser la réglementation, de mettre en place un système de soutien à l’inspection pharmaceutique et une politique basée sur les médicaments essentiels, de réviser la réglementation liée aux essais cliniques et de créer un système de rotation dans les comités d’achat des médicaments…
Des enquêtes similaires menées par l’OMS dans 17 autres pays ont révélé, dans la majorité des cas, une vulnérabilité à la corruption commune et spécifique à la promotion et ce malgré la différence géographique, politique, économique, sociale, démographique et éthique de ces pays. Il est à mentionner que depuis 2004, le Programme de Bonne Gouvernance des médicaments (GGMP) a été lancé dans 37 pays répartis entre les continents sud-américain, européen, africain et en Océanie.